Valls est un des rares membres de ce gouvernement à ne pas décrocher dans les sondages. Mais toute sa stratégie millimétrée pour conforter son image d’homme irremplaçable vient de prendre, en une semaine, un sacré coup. Ce qui ne l’empêche pas de continuer sa politique en faveur des patrons et par là même de s’affranchir totalement des précautions prises par la direction du PS...
Justement, au congrès du PS, tout allait bien pour le Premier ministre. Il s’était rendu à Poitiers pour faire le job : donner des gages pour satisfaire la majorité du PS, regroupant dans une même motion les ténors du gouvernement jusqu’à la pseudo-opposante Martine Aubry. Pour satisfaire tout ce beau monde, et y compris ne pas trop froisser les « frondeurs » (n’insultons pas l’avenir...), il n’a donc pas dit un seul mot sur les futures « réformes » envisagées, préférant insister sur sa fierté d’être socialiste et sa « loyauté » à François Hollande. Sortir de l’image du vilain petit canard du PS, de l’incarnation de la gauche de droite. Opération réussie, suffisamment en tout cas pour sentir pousser des ailes et s’envoler tranquillement pour aller voir un match de foot à Berlin...
Un match à nos fraisPris en flagrant délit d’utilisation abusive des moyens de l’État à des fins privées, Valls va dans un premier temps rester droit dans ses bottes, faisant mine de ne pas bien comprendre la polémique suscitée par son voyage à Berlin pour voir jouer l’équipe de Barcelone. Osant même dénoncer les « grincheux » et s’engouffrer dans le mensonge : un voyage aller-retour « pour voir Platini »... Cerise sur le gâteau, lors de ce petit voyage au coût estimé entre 14 000 et 18 000 euros, Valls était accompagné par deux de ses enfants. Cette « affaire » écorne sans aucun doute l’image de celui qui s’est attelé depuis plus de trois ans à être « irréprochable » et entache un peu plus ce gouvernement qui demande à la majorité de la population de se serrer la ceinture alors que d’autres s’empiffrent...Au-delà de la polémique, après Cahuzac, Thévenoud et bien d’autres, ce nouvel épisode montre une fois de plus que Hollande a aussi failli sur sa fameuse « République irréprochable » et que ce gouvernement est loin, très loin des difficultés que vivent au quotidien la majorité de la population. Une nouvelle affaire qui accentue la crise du politique. Au FN, on peut se frotter les mains...
Toujours plus servile...Dans ce contexte, l’annonce des nouvelles réformes « en faveur » de l’emploi a été accueilli très froidement. Après avoir promis aux organisations syndicales qu’il ne toucherait pas au CDI, Valls a estimé avoir les coudées franches pour rogner encore un peu plus les droits des salariéEs. Il s’est donc lâché. On savait qu’il aimait les entreprises, mais avec ces nouvelles mesures pour l’emploi, ce n’est plus de l’amour, c’est de la passion.Prenant prétexte de donner un coup de main aux TPE et PME, Valls vient d’annoncer un catalogue de nouvelles mesures qui affaiblit une fois de plus les droits des salariéEs et entérine l’idée que c’est le code du travail qui est la cause du chômage (voir l’Anticapitaliste n°293). En particulier, la limite des indemnités prud’homales est une réforme que réclamait à cors et à cris depuis longtemps le Medef. Et pour faire passer ces nouvelles attaques sans trop de controverse, Valls a eu une idée géniale : ni vu ni connu, elles vont être intégrées par petites touches aux lois Rebsamen et Macron. On est loin du fameux « changement de cap » ou de l’« inflexion » qu’espéraient tant les « frondeurs ». Pour tout dire, on n’est même plus dans les limites du gloubigoulba politique qu’était la motion majoritaire au congrès du PS qu’il a pourtant signée...Ces derniers jours, on le disait affaibli par la crise du vol Poitiers-Berlin... mais c’est loin d’être le cas pour servir la soupe au patronat. Plus que jamais, ce gouvernement, à commencer par son Premier ministre, aurait bien besoin d’une leçon de la rue.
Sandra Demarcq