Publié le Mercredi 24 novembre 2021 à 16h49.

Jean-Luc Mélenchon en Guyane : une visite aux relents coloniaux

Il y a un mois, Jean-Luc Mélenchon se rendait en Guyane au cours d’une visite qu’il a voulu fortement médiatiser. À l’heure où la situation devient de plus en plus critique dans plusieurs colonies françaises (Guadeloupe, Martinique et, dans un autre registre, Kanaky/Nouvelle-Calédonie avec le maintien du référendum du 12 décembre malgré l’opposition de l’ensemble des organisations kanak), retour sur une visite qui montre que du côté de Jean-Luc Mélenchon, la question coloniale est loin d’être réglée.

Visite du centre spatial, prise de parole devant l’Assemblée de Guyane, présence au lancement de la fusée Ariane et salut aux forces armées de Guyane avec visite des différentes opérations en cours : cela aurait pu être le programme d’une visite d’un ministre de la macronie, mais c’était bien le programme de la visite effectuée par Mélenchon du 20 au 25 octobre en Guyane !

Ce séjour de Mélenchon démontre une fois de plus toute l’ambiguïté qu’il entretient vis-à-vis des dernières colonies françaises. Accueilli par son « ami » Gabriel Serville, nouveau Président de la Collectivité territoriale de Guyane (CTG), Mélenchon aura ainsi parsemé son séjour de petites touches aux relents coloniaux.

La visite du centre spatial et la participation au lancement de la fusée Ariane traduit à elle seule toute cette ambiguïté. Le Centre spatial étant la principale ressource d’exploitation coloniale, pas un représentant de l’État français ne vient en Guyane sans y parader. On notera au passage que ce soir-là, Ariane a mis en orbite un satellite de communication développé par le ministère des Armées françaises, de quoi renforcer le symbole !

En continuité avec la domination coloniale

Durant son séjour, Mélenchon a également assisté à l’Assemblée plénière de la CTG. À cette occasion, il en a profité pour enfoncer un coin dans le processus d’évolution statutaire qui suit son cours après les Accords de Guyane issus du grand mouvement social de 2017. Alors qu’un consensus a été trouvé, par l’ensemble des éluEs de Guyane, pour inscrire l’évolution statutaire du territoire selon un statut propre sui generis à l’image du statut de la Kanaky, Mélenchon a quant à lui prôné une évolution statutaire dans le cadre de l’article 74 de la Constitution, et le maintien de la Guyane dans le giron de l’Union européenne ! Avec de tels propos, Mélenchon a montré son attachement à ce que la Guyane reste définitivement « française »…

Au cours d’une interview sur Radio Peyi, il y est en outre allé de son petit couplet sur la défense des frontières, au nom de l’intégrité territoriale « française », s’en prenant à l’armée brésilienne qui ne « ferait pas le boulot » à la frontière avec la Guyane. Et rappelant à qui l’aurait oublié que, pour lui, « la loi doit être respectée, les frontières existent, les visas aussi. »

Enfin, clou du spectacle, Mélenchon a achevé sa visite par un « salut aux forces armées » en Guyane ! Ainsi, on a pu le voir se promener en hélicoptère ou en pirogue côte-à-côte avec les militaires de la légion étrangère pour « constater » l’action des forces armées contre l’orpaillage illégal .Qu’importe que la présence des 2500 militaires en Guyane soit avant tout une présence d’occupation coloniale. Qu’importe que leur mission première soit de défendre les intérêts économiques de la France et en premier lieu le centre spatial. Qu’importe que les missions de lutte contre l’orpaillage illégal ou le pillage des ressources halieutiques ne soient que du saupoudrage pour calmer la population guyanaise exaspérée…

À l’issue de son séjour en Guyane, Mélenchon, qui ne cesse de souligner depuis des années que l’un des atouts de la France est qu’elle possède le « deuxième territoire maritime du monde » aura su montrer que lui aussi, un jour, pourrait être le Président de cette France qui s’enorgueillit d’avoir des colonies aux quatre coins de la planète !