Secousses sévères ces derniers jours... La guerre au Proche-Orient a été un révélateur autant qu’un prétexte pour acter la mise en sommeil de la Nupes par ceux qui n’en veulent plus. Dans le même temps, les tensions internes à LFI, dont la mise en retrait sanctionnant Raquel Garrido, amplifient la crise d’une gauche morcelée autour de batailles pour son leadership.
Samedi dernier, l’ensemble des forces composant encore (sur le papier) la Nouvelle Union populaire écologique et sociale étaient ensemble dans la rue, au côté des syndicats et des collectifs de solidarité avec la Palestine, pour exiger un cessez-le-feu immédiat. Cela ne suffit pas à effacer que — quelques jours après de multiples épisodes où les principaux dirigeants du PCF, d’EÉLV et du PS ont à tour à tour pris publiquement leur distance avec Jean-Luc Mélenchon et LFI — le dernier fil ténu de l’existence de la Nupes était coupé. À savoir les réunions hebdomadaires de l’inter-groupe Nupes à l’Assemblée nationale. Comme le dit l’adage, en politique on n’est jamais mort… Mais quelquefois ça y ressemble !
Du « moratoire sur sa participation aux travaux » de la Nupes, décidé par le PS, à la déclaration du PCF qualifiant celle-ci d’« impasse » et appelant à « un nouveau type d’union » à gauche, en passant par les attaques virulentes de Marine Tondelier d’EÉLV contre Mélenchon, la cristallisation d’un nouvel arc de forces anti-Insoumis s’est accélérée en extériorité de la Nupes, en particulier à la faveur d’une bien mauvaise polémique politico-médiatique sur les positions de Mélenchon et de LFI concernant la qualification des crimes commis par le Hamas le 7 octobre. Plutôt un prétexte pour mettre à distance l’orientation, plus à gauche, portée par une Nupes hégémonisée depuis sa fondation autour de la ligne issue directement de la campagne présidentielle de Mélenchon. Pourtant, quel que soit le sujet, on n’y échappera pas : gestion du système ou rupture (au moins avec le logiciel néolibéral), il faut choisir !
Coups de pression
On ne peut comprendre les éléments de tensions internes, voire de crises, qui secouent actuellement La France insoumise que dans ce contexte de retour de balancier de gauche à droite. Après des débats internes mal maîtrisés, voire houleux, autour du scandaleux retour de Quatennens (condamné pour violence conjugale) ou d’une vie démocratique interne opaque (pour ne pas dire plus), le mouvement, fragilisé, a du mal à résister aux pressions exogènes actuelles. D’où l’exigence par sa direction d’une discipline pour le moins hors de propos, dans un climat de forteresse assiégée qui ne supporte aucune remise en cause. Ni celle d’un des éléments incontournables de l’appareil, Sophia Chikirou, ni celle de Mélenchon, qui incarne chez les Insoumis à la fois le consensus qui renforce l’unité politique du mouvement mais aussi sa profonde fragilité à envisager toute vie après lui…
Au-delà des calculs et des ambitions personnelles, les propos de Raquel Garrido pour lesquels elle est aujourd’hui sanctionnée (entre autres pour avoir dit publiquement que Mélenchon n’a « fait que nuire depuis dix mois »), illustrent le malaise d’une LFI en panne de perspectives. Pour les Insoumis, la construction d’une unité de l’ensemble de la gauche sociale et politique, y compris en voulant mettre sous le tapis des clivages politiques bien réels, reste la condition sine qua non des prochaines victoires électorales. Pourtant, cette unité ne peut se prolonger aujourd’hui qu’au prix d’une clarification du projet et de la mise en place d’un outil combatif et démocratique pour le porter.