Publié le Mercredi 3 mai 2017 à 10h40.

Le Pen : Le danger tous azimuts

Au salon des expositions de Villepinte ce 1er mai, la question de savoir si le verre était à moitié plein ou à moitié vide ne se posait pas : la salle était vide à plus de la moitié lorsque Marine Le Pen a réuni ses troupes pour son « dernier grand meeting de campagne » avant le second tour...

Ce n’était visiblement pas une réunion publique attirant de nouveaux électeurs ou de « simples curieux », mais un rappel des troupes militantes venues de toute la France. Les bus et autres véhicules alignés devant la salle étaient immatriculés dans les Yvelines, dans le Nord ou encore dans les Alpes-Maritimes...

« Copié-collé » à droite...

Marine Le Pen, dont le parti a délaissé le traditionnel défilé de rue « pour Jeanne d’Arc » depuis deux ans, a donc tenu un meeting électoral dans une salle un peu trop grande. Le hall 5B du salon des expositions mesure 26 000 mètres carré et peut officiellement contenir jusqu’à 25 000 personnes, assises et debout. Or, une bonne partie de la salle était fermée et dissimulée par des rideaux, de façon plus ou moins visible. Une journaliste du Monde a compté environ 6 000 personnes, ce qui semble correspondre à la réalité. Au même endroit, en 2012, Nicolas Sarkozy avait, lui, mobilisé dans un autre hall des dizaines et des dizaines de milliers de personnes. L’affaire montre, au moins, que la base militante (active) et l’appareil du FN ne sont toujours pas très consolidés, et restent largement en décalage avec la surface électorale que le parti d’extrême droite a désormais acquise, avec 7,6 millions de voix au premier tour.

Dans les médias, le discours de Marine Le Pen a vite été épinglé en raison du fait qu’elle avait « plagié » quatre passages d’un discours tenu par François Fillon mi-avril au Puy-en-Velay, passages traitant de l’« identité » de la France. L’appareil du FN a aussitôt répliqué qu’il s’agissait d’un « clin d’œil » délibéré à la base ou à l’électorat de la droite LR. Une erreur de communication que la presse retourne désormais contre elle.

Braconnage à gauche

Les jours précédents, s’adressant directement à l’électorat de gauche, Marine Le Pen s’était aussi allègrement servie dans le vocabulaire de Jean-Luc Mélenchon, reprenant entre autres le terme d’ « oligarchie » à son compte (auparavant, elle parlait plutôt du « système » ou de la « caste »), disant même à propos de sa personne : « Je suis une insoumise ». Une allusion à peine voilée au mouvement de Mélenchon.

Dimanche 30 avril au matin, Marine Le Pen avait aussi parlé de « planification écologique », autre terme cher à Mélenchon, lors d’un déplacement à Gardanne, devant l’usine d’aluminium Altéo.

Cette dernière a été épinglée pour avoir déversé depuis des années des « boues rouges » toxiques dans la Méditerranée. Le but officiel de la visite de Le Pen était de démontrer qu’un « État stratège » – maître-mot de son discours économique depuis 2012 – devait être capable de marier préservation de l’environnement et emploi. Or, manque de bol, les portes de l’usine sont restées fermées à la candidate du FN : « Pas grave ! », les caméras étaient au moins présentes...

Des clics et des couacs

De son point de vue, sa visite à l’usine Whirlpool à Amiens – en lutte contre la menace de 300 suppressions d’emplois – mercredi 26 avril s’est nettement mieux déroulée. Elle a réussi à doubler Emmanuel Macron, rendant visite au piquet de grève en présence de nombreux médias, à l’heure où le candidat libéral était cantonné à la Chambre du commerce avec quelques représentants du personnel. À cette occasion, un délégué CFDT de l’usine s’est affiché comme électeur du FN, avant d’être rappelé à l’ordre par la direction du syndicat.

En revanche, un couac monumental a résulté du remplacement de Marine Le Pen – ayant pris « congé de la présidence du FN » jusqu’à la fin de l’élection – à la tête du parti. Jean-François Jalkh, membre du parti depuis 1974, devait la remplacer en tant que président intérimaire. Or, manque de bol, il a été immédiatement rendu public qu’il avait assisté à une commémoration en l’« honneur » du maréchal Pétain en 1991, et qu’en 2000, il a tenu des propos ouvertement négationnistes sur le génocide des juifs. En catastrophe, la direction du FN a dû le remplacer par Steeve Briois vendredi dernier.

Chassez le naturel, et il revient au galop…

Bertold du Ryon