Publié le Vendredi 1 avril 2016 à 06h43.

Les manœuvres du PS sur l’élection présidentielle

À peine plus d’un an avant l’élection présidentielle, les députés s’apprêtent à en modifier le règlement par une loi dite de « modernisation des règles applicables à l’élection présidentielle » déposée en novembre 2015 après avis du Conseil supérieur de l’audiovisuel (CSA), de la commission Jospin sur la réforme de la vie publique et du Conseil constitutionnel.

Le texte est revenu devant l’Assemblée le 24 mars pour une seconde lecture et un vote définitif. Et là encore, la modernisation pour le PS, c’est la régression démocratique.

Préserver le monopole des grands partis

Il s’agit tout simplement de limiter les possibilités et droits de ce qu’il est convenu d’appeler « les petits candidats », c’est-à-dire de protéger le monopole sur la vie politique du pays des grands partis institutionnels.

Jusqu’à présent, pour être candidat, il fallait rassembler 500 parrainages de maires, de parlementaires ou de conseiller régionaux et départementaux, et les remettre au Conseil constitutionnel avant une date butoir précédant le premier tour du scrutin. Pour chaque candidat, le Conseil constitutionnel publiait alors une liste de 500 noms de « présentateurs » tirés au sort.

Le projet de loi stipule que les éluEs enverront désormais eux-mêmes leur parrainage directement au Conseil constitutionnel. Ce dernier les publiera au rythme de deux fois par semaine. Pour le PS, il s’agirait avant tout d’éviter les « menaces, pressions, marchandages et chantages sur les petits maires » ! Une pure hypocrisie.

Les règles de répartition du temps de parole des différents candidatEs dans les médias sont aussi modifiées. La période d’égalité stricte du temps de parole pendant la campagne électorale passerait de cinq semaines aux deux semaines précédant le scrutin. Avant cette période, un principe  dit « d’équité », calculé par le CSA en fonction de la représentativité des candidatEs dans la campagne, s’applique aux médias. On le voit, le but est clair : garantir le hold-up du Parti socialiste, des Républicains et du Front national sur le débat public.

Faire appel à la démocratie

Ce texte, qui va être très probablement voté, s’appliquera dès 2017. Il nous pose des obstacles et des limites supplémentaires qui accentuent les profondes inégalités qui existent déjà dans une démocratie de plus en plus censitaire, où les limites de la loi viennent renforcer les pouvoirs de l’argent. Cela est particulièrement flagrant dans l’élection présidentielle qui institutionnalise le pouvoir d’un seul homme en charge de diriger l’ensemble de l’édifice institutionnel.

Nous sommes opposés à cette république monarchique, mais nous voulons cependant utiliser les possibilités d’expression qu’elle peut encore offrir. Et pour cela nous avons besoin de franchir l’obstacle renforcé des parrainages. Il ne s’agit pas pour nous de harceler, de faire pression, et encore moins de faire du chantage... Il s’agit de faire appel à l’esprit démocratique des éluEs qui ne sont pas sous la coupe des grands partis. Et nous savons qu’ils sont nombreux à être écœurés non seulement par la mainmise de ces partis sur la démocratie ainsi confisquée, mais aussi par leur mépris pour la population et ses éluEs les plus proches. Ils sont aussi écœurés par la façon dont sont utilisés les moyens étatiques pour servir les intérêts des riches et des puissants en asphyxiant les collectivités locales.

Nous faisons appel à leur esprit démocratique pour permettre au courant d’opinion bien réel que nous représentons d’être présent dans le débat politique de la présidentielle, qu’un simple travailleur puisse y faire entendre la colère du monde du travail face aux politiciens professionnels, contre le patronat et le gouvernement qui le sert, contre le capitalisme qui engendre la régression sociale et politique. Nous faisons appel à eux pour qu’une voix anticapitaliste et révolutionnaire, la voix de la contestation, de la jeunesse et des exploités, puisse ouvrir une perspective aux luttes, aux résistances et aux révoltes quotidiennes.

Nous savons que les pressions ne viennent pas de nous mais bien des grands partis pour étouffer la démocratie. Nous aurons besoin comme par le passé de solliciter les maires, de les rencontrer. C’est un gros effort mais c’est aussi un combat politique indispensable.

Les 500 parrainages, c’est parti... et c’est possible !

Yvan Lemaitre