Publié le Jeudi 19 février 2015 à 20h49.

Marseille (13) : Massilia manu militari !

Lundi 9 février, le voyage de Valls à Marseille, venu vanter les bons résultats de la police nationale et parler éducation, sécurité et politique de la ville, a signé la fin de la trêve, de « l’esprit du 11 janvier » cher à Hollande...

En effet, depuis cette date, les sondages sur la cote de popularité de l’exécutif étaient à la hausse, ce qui satisfaisait ses partisans de « gauche » qui pouvaient recommencer à espérer... tout en ne mécontentant pas ceux de droite qui voyaient dans les postures et les actes du gouvernement un grand pas en avant dans le tout sécuritaire ! Le Premier ministre, accompagné des ministres de l’Intérieur et de l’Éducation, ainsi que de la secrétaire d’état à la politique de la ville, espérait vraiment que ces deux journées à Marseille lui permettraient de bénéficier de ce renouveau de popularité.Hélas pour lui c’était sans compter avec les rafales de kalachnikov, tirées peu de temps avant son arrivée par des hommes cagoulés qui n’ont pas hésité à faire feu sur les policiers dépêchés sur les lieux... Et durant quelques heures, Castellane, quartier de 7 000 habitantEs, s’est retrouvé en état de siège, le GIGN sortant même pour l’occasion un véhicule blindé...Que signifient ces tirs ? Une visite du Premier ministre vécue comme une provocation, à laquelle une autre provocation devait répondre ? Des luttes criminelles entre différents gangs de l’économie souterraine pour de nouveaux partages de territoires et donc de parts de marché ? Il faut dire que le commerce juteux de la drogue y rapporterait, selon les chiffres de la police, 1,3 million d’euros par mois... Une volonté de donner à voir au Premier ministre et à son ministre de l’Intérieur, qui claironnent qu’« il n’y a pas de cités interdites », que pour le moins elles peuvent être dangereuses ?

Des cités mises en danger par le pouvoirDangereuse, la cité de Castellane l’est, comme beaucoup d’autres, surtout pour ses habitantEs. Et c’est ce qu’ont voulu exprimer de manière moins violente et donc moins médiatisée des enseignantEs en grève et des parents d’élèves. Mais, entre plan vigipirate « alerte attentat » et déploiement de ministres, le rassemblement était interdit dans la cité scolaire. Visite de ministres et droit d’expression sont visiblement incompatibles !Les manifestants très déterminés se sont pourtant réunis ailleurs pour dénoncer l’abandon total dont est victime la cité. Par exemple, celle-ci a été privée d’éclairage public pendant un an ; l’école reste le seul service public du quartier, menacée chaque jour ; la rénovation urbaine n’est toujours qu’à l’état de projet. Et la réforme des ZEP risque bien d’aggraver encore la situation, une réforme qui va notamment casser les équipes d’enseignants volontaires et motivés pour enseigner ensemble dans des quartiers où « l’école de la République » est synonyme d’échec pour une partie non négligeable des enfants et des jeunes.Un enseignant exprimait ainsi le sentiment général : « nos élèves morflent et nous aussi on morfle ! » La bonne nouvelle de la journée est sans doute la création d’un « collectif parents/enseignants pour comprendre et agir ». La municipalité et le gouvernement devront compter avec lui !

Roseline Vachetta