10 jours après le premier tour de la présidentielle et à quelques jours du second, force est de constater que les tendances à la polarisation observées le 10 avril se sont confirmées. L’urgence est à la mobilisation contre Le Pen, qui ne doit pas obtenir une voix de notre camp, mais aussi à la préparation des batailles sociales à venir.
Les résultats du premier tour ont exprimé à la fois un rapport de forces dégradé et une polarisation, certes déformée par le mode de scrutin particulièrement antidémocratique, dans la situation politique avec, d’un côté un bloc réactionnaire dirigé par Le Pen, de l’autre un bloc de classe dirigé par Mélenchon, et un centre en équilibre instable autour de Macron. Macron a su consolider une base sociale derrière lui, « la France qui va bien », qui représente les intérêts de secteurs entiers de la grande bourgeoisie appuyée sur les couches moyennes qui structurent l’appareil d’État, l’encadrement des grandes entreprises et des services publics, l’encadrement des forces de répression, une partie de la petite bourgeoisie économique. Tous ces secteurs de la population vivent mieux qu’avant, ont profité du confinement et des centaines de milliards d’euros distribués. Ils constituent le socle de la domination de la bourgeoisie.
Le rejet de Macron
Une large partie de la population rejette violemment et massivement Macron et ce qu’il représente. Mais ce rejet n’est pas uniforme. D’un côté, dans les franges petites bourgeoises et décomposées, il y a la consolidation d’un courant d’extrême droite, avec des tendances fascistes affirmées et d’autres plus gestionnaires. L’accès au pouvoir de Marine Le Pen est désormais possible, ce qui représenterait un saut qualitatif dans la construction d’un pouvoir autoritaire, raciste et violemment antisocial, et un progrès pour les courants fascistes existants.
De l’autre côté, le score de Mélenchon est très élevé, en particulier dans les quartiers populaires et les villes ouvrières. Il s’agit d’une orientation réformiste renouvelée, plus radicale que ce qu’incarnait le PS depuis 1983. L’Union populaire conserve les mêmes ambiguïtés que la gauche a toujours eues depuis des décennies, qui conduisent, dans l’exercice du pouvoir, à une gestion du système de moins moins redistributrice en direction des couches pauvres et des travailleurEs. Toutefois, à l’heure actuelle, elle représente une grande partie des classes populaires, et contribue à la prise de conscience à grande échelle pour notre classe sociale de ses intérêts face à ceux des puissants et des riches.
Le danger de l’extrême droite
Face au danger que représente la prise des institutions de la 5e République par un parti d’extrême droite, nombreux sont celles et ceux qui se sont résolus au vote Mélenchon dans les derniers jours de la campagne. Cela n’a pas suffi pour éliminer Marine Le Pen. L’option Le Pen, bien que minoritaire dans la bourgeoisie, pourrait bénéficier du rejet populaire de Macron, et la période est dominée par l’affrontement entre deux blocs réactionnaires soutenus par deux fractions différentes de la bourgeoisie française. Une victoire électorale de l’extrême droite n’est pas à exclure le 24 avril prochain.
Il reste quelques jours pour construire une mobilisation massive contre l’extrême droite, regroupant toutes celles et ceux qui, dans les classes populaires, ont bien conscience du danger qu’elle représente. Mais il existe aussi une frange qui, par haine de Macron, voit d’un bon œil une victoire de Le Pen, voire pense voter pour elle. Il est ainsi essentiel de s’adresser à cette frange et de rappeler, sans concession, le danger spécifique que représente l’extrême droite. Une victoire de Le Pen serait bien pire encore qu’un nouveau quinquennat de Macron, avec des sauts qualitatifs sur le terrain du racisme et de l’autoritarisme. Cela libérerait par ailleurs les classes réactionnaires et les groupes fascistes.
Empêcher Le Pen d’accéder au pouvoir
C’est pourquoi, dans les classes populaires, pas une voix ne doit se porter sur Le Pen, afin que celle-ci soit battue dimanche 24 avril. Dans ce cadre, nous savons que certainEs utiliseront le bulletin « Macron » pour la dégager, pendant que d’autres choisiront de boycotter ce deuxième tour biaisé. L’essentiel n’est pas de se déchirer entre nous sur ce vote, mais de mettre l’ensemble de notre camp social en mouvement pour empêcher l’accession de l’extrême droite à l’Élysée, et pour préparer les nécessaires combats à venir.
Dans cette situation, des réactions ont lieu, dans la jeunesse, dans les lieux de travail et les quartiers populaires, contre l’extrême droite et les politiques libérales. Des réunions unitaires de toute la gauche demeurent nécessaires pour construire la suite : contre l’extrême droite, pour les luttes sociales, et pour discuter de comment reconstruire un projet d’émancipation. Et d’ici là, un seul mot d’ordre : Pas une voix pour Le Pen ! Construisons la riposte sociale !