Publié le Samedi 26 novembre 2011 à 10h56.

UMP-PS, une opposition (largement) factice

Qu’elles viennent de droite ou de gauche, les critiques contre Hollande pleuvent, mais elles ne concernent que rarement son programme.

Il y avait eu la mise en scène de Sarkozy sauvant l’Europe avec Merkel au moment où par ses déclarations irresponsables, le candidat du PS menaçait le triple A de la France. Juste après, le même sauvait le monde avec Obama au G20 de Nice, alors que François Hollande inaugurait… la Foire du livre du chef-lieu de la Corrèze. « C’est Astérix face à Babar ! » s’était enthousiasmé l’ineffable ministre de l’Éducation, Chatel. Ces derniers jours, le feuilleton des négociations PS-EÉLV a permis à l’UMP de continuer à enfoncer le même clou. Pour Copé, le PS représente « la gauche indécise » et « Hollande ne tient pas la barre de son camp », alors  que Sarkozy se distingue, lui, par sa remarquable « aptitude au commandement » !

Encouragée par la remontée de son chef dans les sondages, l’UMP se multiplie dans les médias pour faire passer un message : face à la crise, seul le président sortant a la stature, le courage, la force de piloter dans la tempête le navire France. Avantage collatéral : la politique concrète du gouvernement, le contenu de ses mesures d’austérité aussi violentes qu’impopulaires, peuvent ainsi être un peu, et un temps, relativisés. D’autant que la droite bénéficie de la conjonction de critiques de même type émanant de partenaires du PS, dirigeants de premier plan d’EÉLV ou du Front de Gauche, qui commentent les aptitudes du candidat socialiste plutôt que de s’attaquer frontalement à son programme. Hollande « se ségolénise », affirme Daniel Cohn-Bendit, tandis que le « capitaine de pédalo » de Jean-Luc Mélenchon ne finit pas de faire des vagues. « Alors, là, je dis respect, savoure le secrétaire général de l’UMP. Même moi, je n’aurais pas osé y penser » (le Monde, 18 novembre).

Bien sûr, il y a quelques différences entre le programme de l’UMP et celui de Hollande. Copé, toujours lui, s’en empare quand il dénonce dans l’accord PS-EÉLV « le troc de circonscriptions contre l’abandon de réacteurs nucléaires : 25 circonscriptions contre 25 réacteurs, une folie pure. » Mais ce qui est remarquable, c’est que le candidat et les dirigeants du PS ne répondent pas sur ce terrain, ne s’emploient pas, par exemple, à défendre contre la droite cette réduction – très partielle et progressive – du parc nucléaire français. Non, ils mettent en avant la capacité démontrée par Hollande d’être « ferme » face à ses partenaires d’EÉLV. Cela prouve qu’il « n’a aucun problème d’autorité », affirme Benoit Hamon, porte-parole du parti et représentant de sa dite aile gauche. Sa position sur le nucléaire « ne date pas de deux jours, c’était même un des points du débat des primaires », ajoute Manuel Valls. Quant à la politique énergétique, reprend Hamon, « nous écoutons [le PDG d’EDF] M. Proglio, nous écoutons Areva, nous écoutons aussi les écologistes et nous mettons en place une politique qui sert l’intérêt général. »

« Intérêt général, intérêt du capital », dit un vieux slogan anticapitaliste, voulant signifier ainsi que les intérêts des multinationales, la réalisation du profit maximum, ne peuvent en aucun cas être compatibles avec les intérêts sociaux et écologiques des classes populaires ; et que ce sont toujours ces dernières qui se trouvent sacrifiées sur l’autel de « l’intérêt général ». Le problème est bien là. Une semaine plus tôt, Hollande réagissait au nouveau plan Fillon en se proposant non de combattre les politiques d’austérité antipopulaire, mais de leur « donner du sens ». Son opposition à Sarkozy, prisonnière de la même logique est, dans une large mesure, factice. Cela explique les termes du « débat » droite-gauche auquel on assiste actuellement.

Jean-Philippe Divès