On n’attend jamais rien de bon de Valls, mais il faut avouer qu’il a quand même réussi à nous donner envie de vomir quand il déclare : « Nous ne pouvons pas perdre cette guerre parce que c’est au fond une guerre de civilisation. C’est notre société, notre civilisation, nos valeurs que nous défendons. » Reprenant les mots de Sarkozy et avant lui de W. Bush, il met ses pas dans ceux des défenseurs du « choc des civilisations », cette thèse qui fait de l’opposition entre l’islam et l’Occident l’une des grandes lignes de fracture du monde de l’après guerre froide. Autant dire qu’un communiquant professionnel comme Valls ne manie pas « à l’insu de son plein gré » une expression aussi lourde de sens. Le message est lancé...
Nous sommes donc en guerre, et pour Valls, il n’est bien entendu pas question des multiples interventions de l’armée française en Afrique et ailleurs. C’est la guerre, ici et maintenant, celle qui justifie tous les déploiements policiers et militaires, le flicage généralisé, la législation d’exception, la surveillance de masse contenus dans la loi sur le renseignement.
Le Premier ministre se sent ensuite obligé de faire semblant de rectifier : « ce n’est pas une guerre entre l’Occident et l’Islam, mais une guerre au nom même des valeurs qui sont les nôtres et que nous partageons au-delà même de l’Europe ». Mais l’expression en elle-même vise l’islam, elle est même faite pour ça, et dans le climat islamophobe actuel, c’est une véritable infamie ! Au nom de quelles valeurs humanistes européennes Valls s’autorise-t-il à faire la leçon ? Sans doute ces « valeurs » qui permettent de laisser mourir en Méditerranée des milliers d’enfants, d’hommes et de femmes !
Enfin, le cynisme est à son comble quand il s’avise de désigner les bons et les mauvais musulmans, l’islam fréquentable et celui qui ne le serait pas, ajoutant que « la bataille se situe aussi, et c’est très important de le dire, au sein de l’islam. Entre d’un côté un islam aux valeurs humanistes, universelles, et de l’autre un islamisme obscurantiste et totalitaire qui veut imposer sa vision à la société. » Et qu’est ce qui permet à Valls un tel discernement ? Sans doute son appartenance à un gouvernement qui fait de la grande bienfaitrice de l’humanité qu’est l’Arabie saoudite un allié privilégié... et un client choyé pour les ventes d’armes !
Christine Poupin