Publié le Jeudi 25 avril 2019 à 15h13.

AP-HP : les urgences ne désarment pas !

Sans la mobilisation des infirmièrEs, des aides-soignantEs et des auxiliaires de puériculture qui s’épuisent dans les services d’urgence de l’Assistance publique-hôpitaux de Paris, l’appel à la grève générale, lancé par les 8 syndicats présents au sein de l’institution, serait passé inaperçu. Vendredi dernier, à peine plus d’une centaine de manifestantEs rassembléEs devant le siège de l’AP-HP, plus grand CHU d’Europe…

Avec le soutien d’une partie de l’intersyndicale, le collectif Inter-urgences qui coordonne les personnels en lutte a obtenu quelques avancées mais, sur l’essentiel, c’est-à-dire les effectifs soignants, la réponse du directeur général de l’AP-HP comme celle de la ministre de la Santé, qui nie la dégradation des conditions de travail, reste très en-deçà des besoins pour faire face à une activité qui a doublé en 20 ans et augmente de 3 % chaque année.

« Le gouffre se creuse entre les besoins et nos moyens »

Le référentiel construit par les urgentistes de SAMU-Urgences de France fixe à 700 le nombre de postes à créer, mais ce ne sont que 16 emplois de plus que la semaine dernière qui sont lâchés pour les urgences pédiatriques qui avaient été « oubliées » jusqu’ici. Avec 61 emplois à temps plein, le compte n’y est pas, et le million d’euros qui sera consacré, cette année, à la vidéosurveillance, comme la présence de vigiles dédiés ne changeront pas une situation qui reste dangereuse pour les personnels mais aussi pour les soignéEs. 

Déjà, au début de l’année, suite aux décès survenus à Paris et ailleurs, 14 chefs de service alertaient : « Les récents drames sont un malheur pour les patients et leurs familles. Pour nous et nos équipes, dont la raison d’être est de soigner et de sauver, ils sont des tragédies. Or, de tels accidents peuvent maintenant se répéter partout et à tout moment, car le gouffre se creuse entre les besoins et nos moyens. »

Face à la revendication de revalorisation des salaires d’un montant de 300 euros, exigée par les grévistes, la reconnaissance d’une indemnité spécifique « pour travaux dangereux, incommodes ou insalubres » même portée à son taux maximum de 3,6 euros par jour travaillé, et le versement unique d’une prime exceptionnelle de 250 euros, ne répondent pas à la nécessaire réflexion à engager sur l’attractivité et la reconnaissance de l’exercice en milieu hospitalier.

Contre une vision techniciste de la médecine

La grève s’étend et, aujourd’hui, ce sont 16 services d’accueil des urgences, sur les 25 que compte le CHU, qui rejoignent la mobilisation. Celle-ci devrait gagner l’ensemble des professionnelEs, qu’une restructuration d’ampleur, dont la visée est purement comptable, va priver de 1 000 postes par an. En effet, les 39 établissements déjà regroupés en 12 groupes hospitaliers vont être remodelés en supra GH au nombre de 4, comportant des départements médicaux universitaires multi-sites constitués sur la base d’indicateurs de « rentabilité » et d’une vision techniciste de la médecine qui prétend substituer l’innovation aux relations humaines.

C’est l’ensemble qui est mis à rude épreuve, et l’irruption des Gilets jaunes jette une lumière crue sur la montée de la précarité et des souffrances sociales nées de décennies de politiques néolibérales. Celle qui conduit une part croissante de la population à trouver refuge à l’hôpital, lui-même confronté aux manquements de la médecine de ville et à la concurrence du secteur privé, dispensé des obligations de service public. Les mobilisations pour défendre l’hôpital public s’intensifient mais peinent à se coordonner. Il est grand temps que les organisations engagées dans la défense de l’hôpital public et de l’accès aux soins pour toutes et tous s’accordent pour agir ensemble.

CorrespondantEs