Le projet de loi de financement de la Sécurité sociale (PLFSS) de 2019 sera présenté en conseil des ministres à fin du mois. Diverses mesures ont déjà été annoncées : elles préparent l’opinion à des mesures qui remettent en cause des acquis issus du rapport de forces de 1945 lors de la création de la Sécu.
Les gouvernements ont instrumentalisé les fluctuations budgétaires. Le « déficit abyssal » et « l’énorme dette » (créées principalement par les exonérations de cotisations patronales) ont servi de prétexte aux mesures d’austérité. Cette année les caisses seraient en excédent. Le déficit était contestable, la dette l’est aussi car la Caisse d’amortissement de la dette sociale (CADES) doit, jusqu’en 2024, amortir encore 121 milliards d’euros de déficit cumulé des organismes de Sécurité sociale. En raison de cet excédent, « l’obligation de compensation intégrale de toute mesure de réduction ou d’exonération de cotisations de sécurité sociale par le budget de l’État » (article 137-7 du code de la Sécu), appliquée à 90 %, sera totalement supprimée. Le gouvernement pourra ainsi puiser dans le budget de la Sécu, différent de celui de l’État depuis 1945. Un rapport commandé par le gouvernement préconise la « solidarité » entre l’État et la Sécu. Au nom de cette « solidarité », il est déjà annoncé que, dès 2019, les exonérations de cotisations et le CICE ne seront plus que partiellement compensés.
L’État pille la Sécu et veut imposer toujours plus d’austérité
Les excédents sont oubliés dans les projets du gouvernement : les retraites à points, la modulation des allocations familiales ont pour objet la réalisation d’économies. Les malades devront aussi se serrer la ceinture : une mission de réflexion sur les arrêts de travail est créée, des députés macroniens envisagent 4 jours de de délai de carence dans le public et le privé. Le PLFSS de 2019 va probablement annoncer le « remboursement avec zéro reste à charge » de l’optique, des prothèses auditives et du dentaire dans le cadre d’un « panier de soins maîtrisé ». C’est une tromperie. Pour en disposer, il faudra être bénéficiaire d’une mutuelle, d’une assurance, ou de la CMU complémentaire. Les assuréEs devront payer l’augmentation des tarifs de toutes ces complémentaires, ainsi que les dépassements d’honoraires, les forfaits et les franchises sur les soins et les prestations qui ne seront pas incluses dans le panier de soins.
Le gouvernement envisage aussi de supprimer l’URSSAF, l’organisme de Sécu qui recouvre les cotisations. Le ministre de l’Action et des Comptes publics, G. Darmanin, a en effet annoncé dans un discours à Bercy, le 11 juillet, que « dans ce mandat nous devons opérer le rapprochement, entre le recouvrement réalisé au sein des sphères de l’État et la sphère sociale par la constitution d’une agence unique du recouvrement ». La Sécu sera un organisme d’État réduit à la « solidarité », un filet de sécurité envers les plus démunis, tandis que les groupes de protection sociale de plus en plus dominés par les assurances privées continueront à se développer avec l’objectif de se substituer à la Sécu. Le danger se rapproche…
S. Bernard