C’est au pas de charge que Macron et sa ministre Buzyn entendent faire adopter, sans que les enjeux en soient perçus , leur contre-réforme de la santé.
Présentée en Conseil des ministres le 13 février dernier, la loi santé est débattue depuis lundi à l’Assemblée nationale. Elle doit être votée en début de semaine prochaine. Puis, après débat au Sénat, elle doit être adoptée définitivement avant l’été.
L’arnaque des « hôpitaux de proximité »
Alors que le « Grand débat » se termine à peine, et que ses conclusions ne seront rendues que dans plusieurs semaines, voire plusieurs mois, Macron et Buzyn, eux, n’attendent pas. Au contraire ils accélèrent le rythme de leurs contre-réformes. C’est un bras d’honneur qu’ils font aux exigences sociales qui se sont exprimées depuis le mois de novembre.
L’une des revendications les plus fortes issues du mouvement des Gilets jaunes est le maintien et le financement des hôpitaux de proximité, avec leurs services indispensables à la population des petites et moyennes agglomérations. Mais le projet de loi santé s’oppose frontalement à ces exigences : il donne en effet au gouvernement la possibilité de modifier par ordonnances (c’est-à-dire sans aucun débat public) la « carte sanitaire ». La ministre annonce son intention de « labelliser » 500 à 600 « hôpitaux de proximité », mais pour elle un « hôpital de proximité » est une maison de retraite médicalisée avec une consultation de médecine et éventuellement quelques lits, sans aucun des services fondamentaux d’un hôpital : urgences, maternité, chirurgie.
C’est la suppression programmée de ces services, là où ils subsistent, qui est ainsi organisée, comme le montrent les exemples récents des maternités du Blanc et de Bernay.
Alors que, dans les campagnes et les banlieues, les cabinets médicaux ferment, entraînant l’extension des « déserts médicaux », la loi Buzyn, en accélérant les fermetures et les restructurations hospitalières, constitue une régression dramatique pour l’accès aux soins d’une partie de la population.
C’est au nom de la « sécurité » des patientEs que ces fermetures sont organisées, mais de quelle « sécurité » parle-t-on quand les équipes du Samu devront faire des kilomètres supplémentaires pour intervenir, alors que chaque minute compte, ou que les femmes devront faire de longs parcours sur des routes souvent difficiles pour atteindre les maternités ?
Une mobilisation à construire d’urgence
Face à la détermination du pouvoir à passer en force, un premier rendez-vous vient d’être manqué. Même si les délais étaient courts, le débat parlementaire sur la loi santé aurait pu être l’occasion d’une convergence des luttes entre les personnels hospitaliers avec leurs syndicats, les Gilets jaunes, et les comités de défense des hôpitaux et maternités défendant l’accès aux soins et l’hôpital public, avec un objectif commun : le retrait du projet. Il n’en a rien été. Le minimum d’information sur le contenu et les dangers de la loi santé n’a même pas été fait par les fédérations syndicales. Et aucune tentative n’a été envisagée pour construire la nécessaire mobilisation.
Une occasion a été manquée, et il est urgent de se ressaisir, avant que le texte ne soit adopté ! L’objectif doit être de construire une mobilisation capable de faire reculer ce pouvoir, qui n’est fort que des faiblesses de ceux qui le combattent.
Jean-Claude Delavigne