La stratégie du choc a un nouvel adepte en la personne du directeur général de l’Assistance publique - hôpitaux de Paris (AP-HP), Martin Hirsch, qui a pour mandat « d’améliorer la trajectoire financière » de notre institution publique. Pour faire 25 millions « d’économies », il n’hésite pas à nous menacer.
Pour « sauver » 4 000 emplois, nous devrions accepter de renoncer à nos RTT, notre temps d’habillage, notre pause repas, et tous les jours de repos acquis par nos luttes passées. Ce violent plan « social » applique la politique du gouvernement contre la protection sociale, et met en œuvre le Pacte de responsabilité avec ses 3 milliards de restrictions budgétaires pour la santé d’ici 2017. Les lois de financement de la Sécurité sociale adoptées depuis 2012 avaient déjà aggravé la situation, en privant en 2013 et 2014 l’hôpital public de plus d’un milliard d’euros.
Travailler plus, sans gagner plus, pour sauver l’entrepriseC’est le même chantage que dans le privé, lorsque les patrons certifient qu’en acceptant de travailler plus pour le même salaire, il n’y aura pas de licenciements. Un ou deux ans après, l’entreprise licencie et parfois ferme. Nos salaires sont gelés depuis 2010, mais Hirsch veut nous faire croire qu’il y a péril en la demeure, alors que le déficit est de 49 millions... ce qui ne représente que 0,7 % d’un budget de 7 milliards d’euros. Avec sa capacité d’autofinancement de 400 millions et son fonds de roulement de 500 millions, l’AP-HP est loin d’être en danger.Depuis des décennies, nos luttes nous ont permis de travailler (un peu !) moins sans diminution de salaire. Le coup d’arrêt porté à la réduction du temps de travail est la cause principale du chômage, pas les délocalisations comme le martèlent les médias dominants. Aujourd’hui, des infirmières et des sages-femmes pointent à Pôle emploi... alors qu’un million de jours de repos sont dus aux salariés de l’AP-HP.La réduction du temps de travail à 32 heures, sans réduction de salaire et avec embauche à la hauteur des besoins, est indispensable. Tous les bilans sociaux constatent en effet l’augmentation significative de « l’absentéisme d’usure » et de la rotation du personnel. Mais Hirsch prétend « améliorer la qualité et les conditions de travail » en supprimant des jours de repos ! Mauvaise foi de celui qui nie l’intensification du travail des hospitaliers depuis les années 2000, avec la création de postes en nombre insuffisant au moment du passage aux 35 heures. L’avènement de la tarification à l’acte, déterminant en grande partie les recettes des hôpitaux, a accentué la dégradation de nos conditions de travail et la qualité des soins par la course effrénée à « la production d’actes de soins ». Il est évident que nous soignons mieux quand nous sommes fatigués et usés et qu’il faut être épuisé pour faire face à la maladie, la souffrance et la mort ! Et le Sénat qui n’est jamais en reste, vient de rétablir dans les trois fonctions publiques les trois jours de carence1 lors d’un arrêt maladie.
La résistance s’organiseDepuis la loi Bachelot de 2008, les directeurs n’ont plus besoin de l’accord des syndicats pour décider de notre temps de travail et de nos repos. Hirsch peut donc passer en force. Les syndicats et les personnels seront-ils à même de se donner les moyens de le renvoyer dans ses cordes ? Dans les hôpitaux, les assemblées générales sont massives et unitaires, rassemblant des centaines de personnes inquiètes et en colère. Et combatives, quand elles s’opposent à toute atteinte à la réduction du temps de travail ou retiennent l’idée de la grève reconductible jusqu’au retrait du plan Hirsch.Toutes les organisations syndicales sont vent debout contre ce plan, mais n’avancent pas dans l’unité et tergiversent quant à la mobilisation à engager. Malgré tout, l’intersyndicale SUD-CGT-FO appelle les hospitaliers à une journée de grève le jeudi 21 mai, une date reprise par les syndicats CFDT, CFE-CGC, CFTC, SMPS et UNSA.La réussite de la mobilisation à l’AP-HP, avec ses 38 hôpitaux et 75 000 salariéEs hors médecins, est un enjeu important qui va au-delà des établissements de la région parisienne. Les 35 heures et les RTT sont en effet dénoncées dans tous les établissements de santé les uns après les autres, et partout nos conditions de travail se dégradent. C’est bien le « tous ensemble » qui doit être à l’ordre du jour !
CorrespondantEs
- 1. Journées non rémunérées.