Publié le Mardi 29 septembre 2009 à 19h55.

Grève du lait : le bluff de Sarkozy et des ministres européens

Après 15 jours de grève du lait où des actions complémentaires, telles que les blocages de camions de livraisons, se sont multipliées, l'EMB (confédération européenne des producteurs laitiers) a annoncé suspendre la grève des livraisons jusqu'au 5 octobre, date d'une réunion extraordinaire à Bruxelles des ministres européens de l'agriculture consacrée à la crise du secteur. Les 260 à 280 € la tonne de lait payé actuellement (contre 350 à 400 € revendiqué), fait passer la rémunération de l'écrasante majorité des producteurs en dessous du seuil de pauvreté.

Si certains, comme la Coordination Rurale, voient des « avancées très positives » du côté de l'Union européenne et sont satisfaits des propos de Sarkozy, qui a souligné depuis New York, la nécessité de « se battre pour une nouvelle régulation agricole » et de rebâtir « toute la politique agricole commune sur de nouvelles bases », d'autres restent plus prudents, comme la Confédération Paysanne qui prend « acte de l’appel à la suspension de la grève du lait », mais « appelle à la poursuite des actions car rien n’est gagné  !».

En effet, Mariann Fischer Boel, commissaire européenne à l'agriculture, reste fermement opposée aux quotas, dont la disparition est programmée pour 2015. Bruno Le Maire, ministre de l'agriculture, assure d'un côté aux producteurs qu'un projet de nouvelle régulation européenne du marché, pour garantir un revenu stable aux producteurs, est désormais soutenu par 20 des 27 pays européens, et déclare de l'autre que si une régulation s'imposait, ce ne pourrait « en aucun cas être un retour aux quotas » mais plutôt une évolution vers un « système de contractualisation entre producteurs et industriels » dont on perçoit un peu plus la main mise de l'industrie laitière. Avant d'ajouter que suite aux efforts de « modernisation » qui avaient été consentis par la transformation, c'était aux agriculteurs de faire leur part du chemin pour améliorer la compétitivité française sur le marché mondial...

Entendez : il reste 70 000 producteurs de trop en France parmi les 100 000 actuels ! C'est ce que prévoit l'Institut de l'Elevage en cas de suppression des quotas d'ici à 2050. Le résultat : Une course exacerbée à l'agrandissement, à la concentration et à l'intensification avec une illusoire compression des coûts de production pour une minorité, un grossissement des rangs des chômeurs pour la majorité et une aggravation des problèmes de pollution de l'eau, d'atteintes à la biodiversité et d'émissions de gaz à effet de serre.

Face à cette partie de poker menteur jouée par les dirigeants nationaux et européens, c'est une urgente revalorisation des prix et une véritable politique publique européenne de maîtrise de la production qu'il faut réclamer, couplée à une répartition équitable des droits à produire entre pays et paysans, et à une gestion démocratique de la production par les producteurs et la population.

La mobilisation reste donc d'actualité pour dénoncer les tentatives d'intoxication des tenants de ce système capitaliste et productiviste destructeur qui nous emmène droit dans le mur.

 Matthieu Cassez