La grève, réussie, du 18 mai est peut-être l’annonce d’une nouvelle situation chez le plus gros employeur après l’État.
Au sujet de la grève du 18 mai, la direction a d’ailleurs, encore plus qu’à son habitude, honteusement pipeauté sur les chiffres. Elle annonce 7 % de grévistes, bien en-deçà des remontées du terrain. Exemple de ce qui est certainement une « opération Pinocchio » à large échelle : dans le Val-de-Marne, au niveau du Réseau (les agents des bureaux de poste), le nombre total de postierEs (sur la base duquel est évidemment calculé le pourcentage), est plus élevé en 2021 qu’en 2017. Il y aurait 151 personnes en plus, alors que, dans le 94 comme partout ailleurs, les suppressions de postes s’enchaînent depuis des années !
Mais au-delà de ces tripatouillages patronaux, il faut reconnaître que les chiffres sont inégaux selon les départements, et même selon les établissements. Là où un véritable travail militant a été réalisé, c’est-à-dire où les intersyndicales départementales se sont traduites par des tournées de bureaux (notamment unitaires), les chiffres sont bons voire très bons. Preuve qu’il y a une vraie disponibilité à la lutte dans le cadre d’appels nationaux.
Nouvelle séquence de mobilisation
C’est en réalité assez nouveau. Historiquement, les mobilisations nationales à La Poste (1974, 1995…) se sont largement appuyées sur les centres de tri. Or, à partir du plan d’industrialisation du courrier mis en place en 2004, la majeure partie d’entre eux ont été fermés. De 130 centres de tri cette année-là, nous sommes passés à 26 plateformes industrielles courrier fin 2020. Outre la baisse drastique du nombre de postierEs dans ce secteur, cela s’est traduit par un démantèlement des équipes syndicales combatives.
Parallèlement, l’accélération des réorganisations à la distribution (les factrices et facteurs) à partir des années 2010 a eu pour conséquence la multiplication de grèves locales, mais dont le caractère de fait fragmentaire n’a pu être, sauf exceptions, dépassé.
Les salaires au cœur de la contestation
On peut aujourd’hui, sans doute pour la première fois depuis longtemps, raisonnablement formuler l’hypothèse que les possibilités de construction d’un véritable mouvement général à La Poste sont réelles. Y compris du point de vue revendicatif. Les réorganisations continuent à générer de la colère (la question de l’emploi reste d’ailleurs très importante), mais les revendications qui sont aujourd’hui les leviers principaux pour mobiliser ont trait à la question de la rémunération (salaires et primes). Le fait qu’elles aient un aspect à la fois offensif et unifiant pèse, c’est certain, positivement dans la situation.