Dix jours de congés et RTT en moins, blocage des salaires, attaque de l’ancienneté produisant une baisse de salaire de plus de 10 % sur les années à venir, annualisation du temps de travail avec des semaines de 43 heures, changement d’horaires prévus trois jours à l’avance, mutations forcées, restructurations, fermetures de hangars avion, sous-traitance d’activités… voilà la situation d’Air France. 5 000 suppressions d’emplois s’ajoutent aux 4 000 qui ont eu lieu ces dernières années, sur un effectif de 60 000 salariés au départ… mais pas de « licenciements contraints », ce qui permet au gouvernement d’applaudir ce plan patronal d’envergure.Une industrie en crise ? C’est ce que raconte la direction d’Air France. Mais les faits sont têtus, 1 milliard d’euros d’investissements l’an passé, 600 millions prévus pour refaire les cabines d’avion, alors qu’elles ont été refaites il y a quatre ans et que les avions sont pleins à craquer de passagers, avec les billets les plus chers du secteur…Et pourtant, le trafic aérien augmente (6 % par an). Mais Air France ne dégage pas assez de profits avec cette expansion colossale, il faut encore plus de capitaux pour financer l’absorption des concurrents, acheter les avions, étendre le réseau au niveau mondial. Objectif : être numéro un du secteur, au prix de nouvelles alliances capitalistiques, la dernière étant la création d’une co-entreprise avec Etihad, la compagnie des Émirats arabes unis, qui permettra d’obtenir dollars et pétrole moins cher (le nerf de la guerre). Il faut donc faire travailler plus, payer moins et supprimer des emplois.Ce plan a été annoncé le 21 juin et le volet personnel au sol a été approuvé par trois syndicats le 6 juillet : CGC, CFDT et FO. Au bout de trois mois de négociations secrètes, desquelles était écarté SUD Aérien (qui a obtenu 10,5 % des voix au sol, mais seulement 8,5 % avec les navigants, et n’est donc pas « représentatif ». Les navigants ont d’autres textes qui seront soumis courant juillet.Le texte final n’est d’ailleurs toujours pas connu des salariés : seules 98 pages d’attaques ont été communiquées par SUD aux salariés sur la base de documents provisoires obtenus par des voies non officielles.Seul SUD Aérien a appelé deux fois à la grève contre ces accords, le 21 juin et le 5 juillet. Dans le secteur industriel, la mobilisation a été enclenchée sur fond de stupeur et d’incrédulité des salariés. La CGT a expliqué de son côté que les travailleurs n’étaient pas prêts à annuler les congés et à partir dans une grève de trois semaines en brûlant les palettes à l’entrée de l’entreprise, et qu’il convenait donc de… ne rien faire !Une CGT qui a gardé le secret elle aussi sur le calendrier des négociations, et a finalement appelé à l’action le vendredi 6 juillet à 14 heures, alors que les syndicats avaient déjà signé et que les salariés partaient en vacances !L’Unsa de son côté voulait signer, mais la pression de la base et la menace d’une démission collective des délégués et mécanos adhérents l’a fait reculer.Après la stupeur, la pression a commencé à monter, pour l’instant essentiellement dans le secteur de la maintenance avion (9 000 salariés) où SUD est bien implanté (25 % des voix). Des assemblées ont commencé à se réunir régulièrement, regroupant plusieurs centaines de mécanos en colère. Jusqu’à cette scène hallucinante jeudi 5 juillet où les mécanos de Roissy, à l’appel de SUD et de la CGT locale, sont partis à 200 en manifestation vers les locaux où sont situés les bureaux centraux des syndicats, pour leur demander de ne pas signer ce texte, d’attendre au moins la rentrée pour que les salariés soient bien informés et consultés avec, par exemple, un référendum (le principal syndicat des pilotes en organise un). En effet, ce sont tous les salariés qui doivent trancher et non des syndicats qui ne regroupent qu’une minorité, plus ou moins informée ou manipulée.Arrivés sur place, ils ont découvert l’immeuble gardé par les CRS, qui protégaient l’entrée des locaux. Avec les officiers des RG qui ont fait office de diplomates, pour demander aux syndicalistes de venir discuter avec les salariés ! Trahison massive, les cartes ont commencé à voler, plusieurs collectifs de salariés en désaccord se sont créés, avec le soutien de SUD.Nous n’en sommes qu’au début de l’application du plan, d’autres attaques se préparent, sur les horaires, la mobilité… Les secteurs de maintenance et d’assistance piste vont subir de plein fouet ces attaques, et des mobilisations vont donc se poursuivre, cet été et à la rentrée de septembre, sur l’emploi, le temps de travail, et sur les salaires, car les fins de mois sont toujours aussi difficiles et vont l’être de plus en plus. Affrontements où les salariés d’Air France devront trouver des alliés, salariés soumis aux mêmes attaques.