Le grand mouvement de lutte dans l’agroalimentaire en Bretagne, les fameux Bonnets rouges, est encore dans toutes les mémoires...
Aujourd’hui, la majorité des licenciéEs est encore au chômage et des menaces fortes pèsent sur nombre d’entreprises, dont Tilly-Sebco à Guerlesquin (29)et Gad à Josselin (56). Quelque mille employéEs de l’abattoir Gad sont menacés par la liquidation de l’entreprise, cela après les 889 de l’abattoir de Lampaul-Guimiliau, jetés à la rue malgré une mobilisation qui les a conduits à être parmi les moteurs du mouvement des Bonnets rouges et à participer à la manifestation du pôle ouvrier durant cet automne de luttes.
Scénario catastrophe à JosselinSi les Gad de Josselin ont manifesté le mois dernier lors du Festival interceltique de Lorient avec leur syndicat CFDT, ils n’étaient malheureusement pas dans le mouvement de l’automne dernier, se croyant prémunis contre la crise de l’agroalimentaire. Pire, non seulement ils refusèrent toute convergence avec leurs collègues du Finistère, mais à l’instigation de leur patron et des cadres, ils se sont même affrontés physiquement à une délégation de ces ouvriers venus chercher leur solidarité et tentant de bloquer les camions sortant de l’abattoir de Josselin. « Des ouvriers tapent sur des ouvriers »... Manipulés par leur direction, ils pensaient pouvoir s’en sortir seuls. Aujourd’hui, pour ne pas avoir lutté quand il était encore temps, ils se retrouvent au bord du précipice… la dignité en moins !
Ceux qui ne luttent pas se mettent à tableEn janvier dernier, le Pacte gouvernemental d’avenir pour la Bretagne, adoubé par le conseil régional PS/PCF et les syndicats CFDT et CGT, devait rétablir la situation grâce au « dialogue social ». Malgré les 2 milliards d’euros du plan et les diverses subventions, la situation ne cesse d’empirer. Ce sont évidemment les ouvrierEs de l’agro mais aussi les petits artisanEs, commerçantEs et paysanEs qui paient la facture par la dégradation des conditions de travail, les licenciements, les fermetures et la baisse de leurs maigres revenus.
Crise capitaliste, crise du productivismeLe Foll,ministre de l’Agriculture, a reçu la CFDT de Josselin et a promis une reprise de l’abattoir par Intermarché… Mais quid des conditions de reprise, des emplois à préserver, de toutes les subventions que la Cecab – maison mère de Gad et n°1 français des légumes en conserve – a reçu et des 2,4 millions d’euros qu’elle va recevoir par anticipation du CICE « pour que l’activité se maintienne » ? La crise économique, sociale et environnementale du productivisme dans l’agriculture et l’agroalimentaire qui s’annonçait a explosé et se poursuit. Les entreprises, qui se sont gavées de subventions publiques et européennes pendant des années, crient aujourd’hui à la faillite et font payer aux travailleurEs, qu’elles ont honteusement exploités, le prix de leur gabegie et leur refus de rompre avec un modèle économique qui conduit les ouvriers et les paysans dans le mur.
Une politique pour tous ceux d’en bas : ouvriers et paysansPour sortir de cette crise, la seule solution est une politique à l’opposé de tout ce qui est fait depuis des années : suspension immédiate de tous les licenciements et une loi cadre les interdisant ; réelle transparence des comptes ; contrôle par les travailleurs. Nous nous opposons aux méfaits du capitalisme agro-industriel qui détruit la paysannerie, l’environnement et mène la vie très dure aux salariés des usines. L’agriculture doit cesser cette course au gigantisme, baisser drastiquement sa consommation d’énergie et de produits chimiques. Elle doit s’orienter vers des fermes de taille raisonnable, développer les circuits courts en produisant une nourriture de qualité et en diversifiant et relocalisant les ateliers de transformation. De tout cela, le capitalisme en est bien incapable.
Une perspective anticapitaliste pour un mouvement de révolteLe NPA a toujours fait le choix de lutter et de résister unitairement au côté des ouvrierEs en lutte et avec la petite paysannerie. Les pressions médiatiques, politiques ou syndicales, le mépris ou les insultes n’ont jamais fait plier notre action. La quasi-désertion des syndicats et d’une grande partie de la gauche politique durant le mouvement fut lourde de conséquences, laissant la colère légitime d’une bonne partie de la population sans perspective, fragilisant tous ceux qui étaient prêts à lutter. Le mouvement finira bien par reprendre car rien n’est réglé et le niveau de vie continue de diminuer dramatiquement. Un mouvement à préparer et à construire, avec, comme l’année dernière, un pôle ouvrier de résistance si nécessaire.
Matthieu Guillemot, Gérard Mas et Philippe Poutou