Publié le Samedi 22 octobre 2016 à 08h10.

Budget de la Sécu : L’imposture de la ministre

Le projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS) a été présenté par le gouvernement fin septembre lors d’une conférence de presse...

Marisol Touraine a osé affirmer que « Le désendettement de la Sécurité sociale est une très grande victoire pour toutes celles et tous ceux qui croient en l’action publique et dans le réforme». Sa posture triomphaliste est indécente, alors que « le redressement des comptes » est payé au prix fort par les agents hospitaliers et le personnel de la Sécu (18 000 suppressions de postes en 10 ans) et par les assuréEs sociaux dans toutes les branches de la Sécurité sociale.

Les allocations familiales diminuent à la suite de la décision de moduler le montant des allocations familiales selon les revenus. Les conditions d’attribution des allocations logement (APL) sont durcies. L’âge légal du départ à la retraite a été repoussé à 62 ans à la suite des contre-réformes, la durée de cotisation pour bénéficier d’une retraite à taux plein a été allongée en 2014, et les travailleurs sont incités à partir à 63 ans pour éviter de percevoir une retraite complémentaire amputée à la suite d’un accord entre le Medef et des syndicats, accord avalisé par le gouvernement.

Marisol Touraine a dénoncé la politique de la droite : « Il y a cinq ans, la Sécurité sociale perdait 21 milliards d’euros et les Français ne voyaient pas le bout du tunnel. Pire, ce déficit abyssal, lié à des années d’errements, servait à justifier le démantèlement de leurs droits sociaux. Franchises, déremboursements, forfaits... C’était le temps du "faire payer plus en protégeant moins" »...

Et la même politique a été poursuivie ! Les déremboursements continuent, les forfaits et franchises sont maintenus. Une seule avancée, modeste : les bénéficiaires de l’aide à la complémentaire santé ne paient plus les franchises.

La résorption du « déficit » au dépend de notre santé

Le bilan de sa politique apparaît clairement dans l’enquête récente du Secours populaire1 : les difficultés financières poussent une partie significative de la population à retarder ou à renoncer à des soins, notamment les soins dentaires et l’optique, particulièrement chez les plus pauvres : la moitié des foyers dont le revenu mensuel net est inférieur à 1 200 euros nets ont déjà dû reporter ou renoncer à une consultation chez un dentiste (+ 22 points par rapport à 2008), et plus d’un tiers chez un ophtalmologiste (39 % :+ 9 points).

Le gouvernement a répondu en promettant un meilleur remboursement des soins dentaires qui pourraient être pris en charge uniquement par les complémentaires santé, comme le préconise la Cour des comptes. C’est la poursuite du processus de désengagement du remboursement des soins de ville par la Sécu au profit des mutuelles et assurances, une des raisons des coupes budgétaires toujours importantes dans la branche maladie : 3,5 milliards en 2016, 4 milliards en 2017.

Les hôpitaux continueront à payer au prix le plus fort le « désendettement ». Après les 690 millions en 2016, le PLFSS de 2017 veut imposer 845 millions d’euros d’économies en 2017. Le déficit de la Sécu est transféré aux hôpitaux, et certains sont même contraints de vendre une partie de leur patrimoine pour payer les salaires.

La ministre, elle, ne s’inquiète pas des difficultés des établissements à assurer leurs missions, des conditions de travail et des suicides des soignants, elle aggrave sa politique de démantèlement des hôpitaux avec les groupements hospitaliers de territoire. Il faut imposer un coup d’arrêt à la politique mortifère de ce gouvernement. Fort heureusement, les fédérations de la santé CGT, SUD, FO, la CGT des organismes sociaux, ainsi que des organisations catégorielles, appellent à la grève le mardi 8 novembre et ­discutent de la poursuite de la mobilisation.

S. Bernard

 

  • 1. Baromètre IPSOS-Secours populaire de septembre 2016