Le 1er avril, Capgemini s’auto-félicitait pour son excellente gestion de la crise du covid-19. Difficile de ne pas y voir un poisson d’avril de très mauvais goût.Le 25 février, lors de la réunion d’un CSE, la délégation CGT avait demandé l’ajout à l’ordre du jour d’un point sur le Plan de Continuité d’Activité pour tous les sites de Capgemini afin de se préparer à la propagation de l’épidémie. Refus de la direction, qui a reconnu à demi-mot qu’elle n’avait pas de tels documents à jour. Le lendemain, pour sa première communication sur le covid-19 aux 24000 salariéEs de l’entreprise, la direction s’est contentée de rappeler les consignes gouvernementales.
La sécurité des salariéEs, ce n'est pas la priorité
Le 3 mars, la direction a pris, à reculons, quelques timides mesures : l’obligation de tenir en visioconférence les réunions de plus de 15 participants et l’annulation des déplacements en train ou en avion « sauf pour des besoins business critiques ». Comme si le « business » immunisait contre le covid-19 ! De toute façon, la grande majorité des salariéEs n’était pas concerné, notamment ceux qui se déplacent tous les jours en transport en commun de leur domicile à leur lieu de travail, que ce soit vers un site Capgemini ou un site client.
A l’annonce des mesures de confinement de la population par le gouvernement, la direction affiche son intention d’augmenter le télétravail. Pour une entreprise informatique, ça peut sembler une évidence ! Il existe depuis 2011 un accord d’entreprise qui autorise jusqu’à 3 jours de télétravail par semaine. Sauf que c’est comme avant. Pour les salariéEs qui travaillent sur les sites Capgemini, il faut l’autorisation de leur manager, et pour les salariéEs chez les clients, il faut l’accord du client : or les managers locaux de Capgemini ou des clients préfèrent souvent avoir « leurs » salariéEs » à disposition dans les locaux de l’entreprise plutôt que chez eux.
Le 16 mars, la CGT a déclenché des procédures de DGI (Danger Grave et Imminent) selon l’article L2312-60 du code du travail. La direction de Capgemini a fait preuve d’obstruction quasi systématique à ce qui doit légalement être des enquêtes conjointes. Elle a pu compter sur l’aide des autres syndicats, notamment la CFDT (le premier syndicat de la boite) : pour les éluEs de ces syndicats, même dans une situation aussi grave, le CSE n’est pas là pour demander des comptes à la direction sur sa gestion du covid-19, il est uniquement là pour s’occuper des activités sociales et culturelles.
Les lanceurs d’alerte de la CGT ont signalé à la direction un certain nombre de problèmes que leur ont fait remonter les salariéEs : le manque d’équipement de protection individuelle en terme de masques, ou même de gel hydro-alcoolique, des refus de télétravail qui ne se justifiaient pas techniquement, etc. Beaucoup plus grave, il y a des cas suspects de covid-19 pour lesquels la direction n’a pas informé les salariéEs e et n’a pris immédiatement les mesures de sécurité adéquates.
Faire valoir ses droits, ça paie
La CGT a évidemment mis dans la boucle les inspections du travail des départements concernés. Et les DGI ont en partie porté leurs fruits, contraignant l’entreprise à se préoccuper un peu plus de la santé et de la sécurité de ses salariéEs et un peu moins de ses profits. Ainsi début avril, la direction a communiqué qu’il y avait moins de 3% des salariéEs présents sur site Capgemini ou en clientèle. C’est difficile à vérifier puisque la direction a délivré au compte-goutte des justificatifs de déplacement professionnel pour les éluEs CGT.
La direction a annoncé le recours au chômage partiel. Après avoir touché 57 millions d’euros de CICE (crédit d'impôt pour la compétitivité et l'emploi) et de CIR (crédit innovation recherche) en 2018, sans compter les exonérations de cotisations sociales, Capgemini veut encore plus de subventions publiques. Pourtant, Capgemini roule sur l’or, ayant réalisé en 2019 un chiffre d’affaires de plus de 14 milliards d’euros (en hausse de 7 %) et un résultat net de 850 millions d’euros (en hausse de 17 %). Mais bon, il faut bien payer le rachat de l’entreprise concurrente Altran (5 milliards d’euros !) tout en continuant à gâter les actionnaires : hausse de 12 % prévue du dividende et rachat d’actions pour plus de 200 millions d’euros !