Malgré des catastrophes environnementales récurrentes et les dangers pour la population, le gouvernement zambien continue sa politique extractiviste.
La Zambie, pays de l’Afrique australe, a été à nouveau frappée par une importante pollution. 50 millions de tonnes de boue acide se sont déversées dans le cours d’eau longeant l’entreprise chinoise Sino Metals de Chambishi qui traite les minerais de cuivre.
Fléau écologique
L’accident s’est produit le 18 février. Un mur d’une aire de stockage contenant cette boue a cédé laissant s’écouler les déchets toxiques dans la rivière Mwambashi qui rejoint le cours d’eau de Kafu. Celui-ci serpente à travers cinq provinces du pays pour rejoindre le fleuve Zambèze.
Les autorités zambiennes ont bien tenté de répondre à la catastrophe en déversant 250 tonnes de chaux afin de diminuer l’acidité ; d’autres interventions aériennes ont eu lieu avec des lâchers de calcaire. Mais tout cela n’a pas empêché que la faune et la flore soient détruites.
À la suite de cet accident, le gouvernement a intensifié ses inspections et a fermé l’usine de la société Ranging Mineral Processing Limited à Kalulishi pour des fuites d’acide sulfurique dans la rivière Kafue.
Ce n’est pas la première fois que l’entreprise Sino Metals est impliquée dans ce type d’accident. En 2011, puis en 2015, deux problèmes similaires se sont produits sur ses aires de stockages.
Extraire quel qu’en soit le prix
Les lois environnementales en Zambie sont plutôt d’un niveau élevé. Le seul problème est qu’elles ne sont pas appliquées. De plus, le pays est fortement endetté, autour de 28 milliards de dollars. La Chine détient 5 milliards de cette dette et joue un rôle important dans les négociations pour rendre ce fardeau financier moins contraignant d’où la grande mansuétude pour les entreprises minières du géant asiatique.
Mais il n’y a pas que les entreprises chinoises qui sont en cause. Ainsi à 245 kilomètres de Chambishi se trouve une autre cité minière, Kabwe, considérée comme une des villes la plus polluée au monde.
En effet depuis des décennies on y exploite des mines de plomb et de zinc sans aucune protection. Cette production a eu des effets néfastes sur la santé des populations, notamment des enfants. Si la mine a fermé, elle a laissé à l’air libre des terrils. Le gouvernement a autorisé plusieurs entreprises à travailler ces haldes 1 afin d’en extraire des restes de plomb mais aussi de zinc. Avec l’idée que «les mines sont l’ancrage de notre économie, c’est la solution qui amènera le plus de valeur, le plus de revenus », comme l’indique Jito Kayumba, le conseiller économique de Hakainde Hichilema, président élu en 2021.
La santé des enfants sacrifiée
C’est ainsi que des flots de camions ont transporté ces déchets à l’intérieur même de la ville, il y a ainsi près de neuf monticules éparpillés à travers les quartiers. Cette exploitation a des conséquences extrêmement graves au plan sanitaire. Les experts considèrent que près de la moitié des enfants devrait bénéficier d’un traitement d’urgence au vu du taux de plomb dans le sang. La plupart des entreprises appartiennent aux dirigeants du parti au pouvoir leur assurant une totale impunité.
De plus, des mineurs clandestins tentent aussi leur chance en extrayant, sans aucune protection, des terrils les restes de minerais qu’ils vendront à des grandes entreprises spécialisées dans leur transformation.
En faisant de l’exploitation minière l’alpha et l’oméga de sa politique économique, le gouvernement de Hakainde Hichilema contribue à détériorer l’environnement et la santé de bon nombre de ZambienNEs sans pour autant régler les problèmes sociaux. Le taux de pauvreté ne cesse d’augmenter atteignant 62 %, un tiers de la population est victime de malnutrition et dans le même temps le secteur de l’agriculture qui occupe 60 % de la population est délaissé.
Si l’extraction des ressources naturelles est peu créatrice d’emplois, elle permet par contre un fort enrichissement des élites. Preuve en est, la Zambie est l’un des pays avec un taux d’inégalité parmi les plus élevés.
Paul Martial
- 1. Site de stockage et de dépôt des déchets de l’activité minière