Blanquer a beau répéter sur tous les plateaux TV que tout est sous contrôle, la réalité le rattrape. Aucune mesure n’a été prise en amont pour affronter une rentrée scolaire sous Covid !
Pour beaucoup d’enseignantEs sur le terrain, c’est tout simplement la pire rentrée qu’ils et elles ont connue, entre les craintes liées au Covid, le poids de l’application du protocole et l’effet de politiques scolaires de plus en plus destructrices. Le déficit historique d’étudiantEs dans les Inspé (les nouveaux instituts de formation des profs) n’est qu’un indicateur parmi d’autres du malaise profond de l’institution, qui a encore augmenté d’un cran en cette rentrée 2020.
Au primaire, inquiétude et impréparation
Dans les écoles primaires, la rentrée « buisness as usual » c’est d’abord les classes surchargées du fait de l’austérité budgétaire qui règne. Jusqu’à 29 ou 30 élèves par classe, y compris en maternelle ! Déjà, en temps normal, ces chiffres sont une aberration, mais lorsqu’on sait que l’épidémie circule activement, que les enfants ne porteront pas de masque et que la distanciation physique est impossible, tout le monde comprend que les écoles vont devenir des foyers de contamination. Toujours pour faire des économies, le protocole sanitaire se résume à faire laver les mains aux enfants, souvent bien évidemment sans sanitaires en nombre suffisant, sans savon ou essuie-mains. La désinfection des locaux plusieurs fois par jour : trop coûteux ; le gel hydroalcoolique dans toutes les classes : trop coûteux aussi !
À peine trois jours après la rentrée scolaire, de premières écoles ont commencé à refermer suite à des cas d’enfants ou de personnels contaminés. La politique de la hiérarchie de l’éducation nationale est d’essayer de minimiser les phénomènes de contamination. Les inspecteurs de circonscription font tout pour éviter les fermetures d’écoles, à l’encontre de toute notion de responsabilité, en demandant aux enseignantEs « cas contacts » de se rendre quand même dans les écoles en l’absence de symptômes ! L’objectif est clair, permettre aux parents de pouvoir aller bosser, quoi qu’il en coûte en termes de santé publique.
Au collège et au lycée, des masques nécessaires mais pas suffisants
Mêmes problèmes d’effectifs en augmentation dans le secondaire, notamment à cause d’un retour du privé vers le public, crise économique oblige. Mais la particularité de cette rentrée dans le secondaire, c’est bien le port du masque généralisé, non seulement pour les adultes, mais aussi pour les élèves.
On a beaucoup dénoncé, à juste titre, le fait que l’État ne fournisse pas gratuitement les masques aux élèves. Cela se traduira sur le terrain par des masques de moindre qualité, réutilisés au-delà du raisonnable, et donc une protection collective d’autant plus affaiblie face au virus.
Le masque risque de polariser les discussions sur la rentrée, et même de créer des fractures au sein des équipes éducatives, déjà fragilisées par la période du confinement. Et cela au détriment du reste, car le masque au collège et au lycée sert aussi à cacher l’absence de réel protocole. Comment justifier, par exemple, le maintien en l’état de la réforme du lycée, qui par le jeu des spécialités augmente considérablement le brassage des élèves ?
Le paradoxe invivable de cette rentrée, c’est donc une augmentation considérable des contraintes liées à l’application d’un protocole mal pensé, et le sentiment que cela ne suffira pourtant pas à nous garantir une protection efficace contre une circulation active du virus.
Regrouper nos colères
Les seuls qui prennent leurs responsabilités, ce sont les enseignantEs qui se sont mis en grève en cette rentrée, pour exiger des ouvertures de classes à l’image de l’école Anatole-France à Gennevilliers qui, après deux jours de grève, a obtenu l’ouverture de deux classes supplémentaires permettant d’alléger les effectifs. Citons également le Lycée autogéré de Paris, mobilisé cette semaine pour garder ses enseignantEs et sa spécificité pédagogique, et qui a obtenu de premières garanties.
Ces mobilisations, si elles restent isolées les unes des autres, ne permettront pas d’inverser la logique de fond, celle de l’austérité budgétaire dans les services publics. Lorsque l’hypothèse a été évoquée de budgétiser 3 000 postes d’enseignantEs supplémentaires dans le budget 2021, la réponse de Castex a été éloquente : « C’est le genre de créations qui ne servent pas à redresser le pays » !
Il y a urgence à regrouper les mobilisations, les colères qui montent dans le secteur de l’éducation. La grève du 17 septembre doit servir de première étape pour donner une visibilité à ces revendications.
Blanquer, ministre à la ramasse
Plus personne ne croit aux mensonges de Blanquer ni aux promesses de revalorisation des salaires des enseignantEs, primes informatiques, masques transparents… Comme dans la santé, il lance un Grenelle qui n’accouchera que d’une souris.
Car, avant même la rentrée, il aurait fallu profiter de l’été pour recruter des profs, afin de diminuer les effectifs par classe, mais aussi des personnels médicaux et sociaux, des agentEs d’entretien... Il aurait fallu installer des points d’eau dans tous les établissements qui en manquent. Il aurait fallu prendre le temps de repenser les programmes et la réforme du lycée pour les adapter aux nouvelles urgences. Rien de tout cela n’a été fait car Blanquer a préféré passer son été à se faire photographier en train de faire du kayak et de l’escalade…
Réponses antipédagogiques à l’urgence pédagogique
Malgré le confinement, l’interruption de l’école pendant plusieurs mois, le ministère maintient coûte que coûte les évaluations des élèves de CP, de CE1 et de 6e, contre tous les avis pédagogiques. Le gouvernement compte utiliser la crise sanitaire comme prétexte pour renforcer sa vision réactionnaire de l’école. Au lieu de donner du temps et des moyens aux équipes pédagogiques pour limiter les conséquences du confinement sur les élèves, il enjoint les enseignantEs de concentrer les apprentissages uniquement sur les maths et le français, comme si l’école se résumait au « lire, écrire, compter ».