Le décret publié le 30 décembre 2018 annonce la couleur de la politique gouvernementale envers les privéEs d'emploi. Il n'a qu'une seule tonalité : le durcissement impitoyable des sanctions contre les chômeurEs et l'absence totale de moyens supplémentaires pour le conseil et l’accompagnement.
Sous le prétexte d'une « gradation des sanctions plus juste et plus équilibrée », c'est en fait un durcissement puisqu’alors qu’auparavant les allocations étaient « seulement » suspendues le temps de la sanction, elles sont désormais supprimées ! Et Pôle emploi devient juge et partie en prononçant la suppression des allocations, contribuant ainsi à opposer encore plus les chômeurEs et agentEs.
La durée de radiation pour absence à convocation passe de 15 jours à 1 mois. Et en cas de 2e absence, c'est 2 mois de radiation et une suppression de 2 mois d’allocations (alors que dans le 1er cas le mois perdu était récupéré), puis 4 mois de sanction en cas d'absence à une 3e convocation !
En cas de recherche jugée insuffisante refus d'offres d'emplois, de formation, de prestation...), c'est un, deux ou quatre mois de sanction (radiation + suppression de revenu) selon la répétition du « manquement ».
Aucun lien avec le salaire antérieur
Pire. L'offre d'emploi prise en compte pour apprécier le refus se basait jusqu'à maintenant sur le salaire antérieurement perçu (en l'occurence 95% de cet ancien salaire). Le décret supprime cette notion et unE chômeurE pourra se voir proposer une offre sans lien avec ce salaire antérieur et donc sanctionné, selon les modalités décrites ci-dessus, s'il se permet de refuser…
Le gouvernement tire ainsi le bilan de l'ORE (« offre raisonnable d’emploi ») mise en place par Sarkozy, qui n'était de fait pas appliquée car répondant à des critères trop « stricts » et faisant l’objet, par ailleurs, d'une résistance passive de la part des conseillerEs Pôle emploi.
Le ministère entend en finir avec ces obstacles en individualisant la définition de l’ORE, entre chaque chômeurE et son conseiller, et en mettant les moyens avec le renforcement des équipes de contrôle (passage de 200 à 600 contrôleurs dans un 1er temps, puis à 1000 …). C'est de conseil et d'accompagnement qu'auraient besoin les chômeurEs, mais le gouvernement choisit de supprimer 800 postes de conseillerEs en 2019…
Le prétexte de la fraude
Pourtant, les chiffres même du ministère du Travail montrent que la fraude est marginale : sur les 625 000 radiations prononcées en 2016, 4% étaient dues à une « insuffisance de recherche d'emploi », 0,4% le fait d'une fraude caractérisée (par ailleurs essentiellement le fait de réseaux criminels organisés) et 0,02% liée à un second refus d'ORE...
Le problème n'est donc pas là… Alors quoi ? L'argument officiel est que le contrôle permet de « redynamiser » la recherche d'emploi. Sauf que dans les pays où ces sanctions existent, ont abouti à une pression à la baisse sur les salaires (ce que confirment les études menées en Angleterre et en Suisse).
Dans un contexte ou, selon Muriel Penicaud, les créations d'emplois repartent, le patronat a besoin de contraindre les chômeurEs à occuper ces postes, en exerçant par la même occasion une pression sur l'ensemble des salariéEs.
Si on ajoute les « négociations » en cours sur la nouvelle convention d’assurance-chômage, qui prévoit 4 milliards d'euros d’économies (contre 800 millions pour la convention actuelle), c'est un message clair envoyé par le gouvernement …
Mobilisation nécessaire
Ce décret à été présenté le 4 décembre aux confédérations siégeant au CNEFOP (Conseil national de l'emploi, de la formation et de l'orientation professionnelle). Celles-ci n'ont visiblement pas jugé utile d'appeler à la mobilisation à ce moment-là…
La mobilisation contre ce texte doit donc s'engager sans délai, le Mouvement national des chômeurs et précaires (MNCP) demande le retrait immédiat ce décret, mais pour l'instant aucune initiative n'est prévue. Contrairement aux manifestations séparées du 1er décembre, une mobilisation unitaire est indispensable !
Correspondant