Publié le Jeudi 28 avril 2011 à 11h37.

Fonction publique : travailler plus, gagner moins

Une nouvelle fois, le salaire des fonctionnaires va être gelé.Le gouvernement annonce, pour la deuxième année consécutive, le gel de la valeur du point qui détermine le salaire de base des personnels. Depuis 1983, sa hausse est inférieure à celle des prix et à celle du Smic. Les fonctionnaires de catégorie C, soit près de 80 % des agents des collectivités territoriales, sont maintenant embauchés à un salaire de base au niveau du Smic. Il faut attendre entre cinq et huit ans, selon le niveau de recrutement, pour bénéficier d’une augmentation de 15 euros ! Les personnels de catégorie B, recrutés en théorie au niveau du bac, mais le plus souvent à bac+3 au moins, bénéficient, si on peut dire, d’une grille qui démarre 5 % au-dessus du Smic. Même les cadres et les enseignants (qui contrairement aux premiers ne perçoivent pratiquement pas de primes) débutent avec un salaire de base de moins de 20 % au-dessus du Smic.

Beaucoup d’agents recrutés depuis la fin des années 1970 ont le sentiment que leur pouvoir d’achat n’a pas bougé depuis 30 ans. Ils ont en grande partie raison ! Contrairement aux générations précédentes, ils ont rarement bénéficié de promotions et leur pouvoir d’achat est resté stable par rapport au niveau du Smic. Depuis 2006, de nouvelles grilles indiciaires sont négociées, catégorie par catégorie, bénéficiant à quelques agents en place, en particulier en fin de carrière. Mais les nouveaux entrants sont perdants. Par ailleurs, les carrières sont rallongées, en prétextant de la réforme des retraites, alors qu’on rentre de plus en plus tard dans la fonction publique. Ces nouvelles grilles ne tiennent pas compte de l’évolution des qualifications, en particulier des personnels soignants et sociaux, secteurs majoritairement féminins, clairement discriminés en matière de salaire et de conditions de travail. Les gestions individualisées des carrières prennent de moins en moins en considération l’ancienneté, les primes au mérite se multiplient sans la moindre transparence, y compris dans les municipalités de gauche. Elles laissent de côté la majorité des agents et en particulier des centaines de milliers de non-titulaires privés le plus souvent de primes et de carrière. Contrairement à une idée reçue, à qualification égale, les salaires des agents de la fonction publique ne dépassent pas ceux du privé.

La diminution des effectifs de l’État, les recrutements insuffisants dans les hôpitaux et les collectivités territoriales dégradent les conditions de travail. Ces facteurs expliquent la profondeur et la répétition des mouvements de lutte dans la petite enfance, mais aussi la revendication par les travailleurs sociaux, éducatifs et de santé, les personnels de la culture, de carrières équivalentes à celle de personnels techniques et administratifs.

Les organisations syndicales, unanimes, estiment la baisse du pouvoir d’achat de près de 10 % depuis 2000. Travailler plus pour gagner moins, c’est le bilan que les agents de la fonction publique, qui n’ont pas toujours été indifférents aux promesses de Sarkozy, tirent quasi unanimement aujourd’hui. Cette belle unanimité pourrait faciliter la préparation d’un mouvement d’ampleur pour faire reculer le gouvernement. Certes, cela ne se décrète pas et, pour l’heure, la majorité des personnels ne semble pas y être prête, mais les organisations syndicales n’ont manifestement pas l’ombre d’un plan de bataille pour les y préparer.

Correspondant