Publié le Vendredi 5 octobre 2012 à 12h36.

Ford Blanquefort : Jour de colère

Montés de Bordeaux en train à plus de 360 personnes, les salariés de Ford et leurs soutiens locaux ont bien fait parler d’eux. En envahissant pour la troisième fois le stand de la marque le jour d’ouverture du Mondial de l’automobile, ils ont posé de façon militante le problème de la nécessaire convergence des mobilisations. Rencontre avec trois d’entre eux, dont l’un bien connu.La journée du samedi 29 septembre a commencé tôt, comme une de ces journées ordinaires à la boîte. Même pas encore 6 heures et demie et tout le monde est déjà dans le train au départ de Bordeaux.À l’arrivée à la gare Montparnasse, un comité d’accueil composés de cheminots militants est bien présent. « On a eu le premier frisson » dit Carlos Abrantes.C’est bon pour le moral Devant l’entrée du salon de l’automobile, il y a certes un premier rendez-vous manqué. « Le regret, c’est Peugeot. On a vu la cinquantaine de salariés de PSA partir en bus après leur intervention, alors que l’on était en train d’arriver » regrette Carlos. Mais d’autres délégations de travailleurs sont là, à commencer par ceux de Fralib de Gémenos, engagés eux aussi dans une lutte de longue haleine. « ça aide à se sentir moins seul, moralement c’est important » dit Philippe Poutou.Et les prises de paroles des soutiens politiques commencent. Olivier Besancenot dénonce un gouvernement qui a choisi son camp et propose l’organisation d’une marche de soutien à la lutte pour l’emploi, pour se faire vraiment entendre de Montebourg. Aussi présent à ce rassemblement, Jean-Luc Mélenchon a notamment dénoncé les entreprises uniquement là pour faire du fric, sans répondre à la proposition d’Olivier. « Une tête d’affiche qui aide aussi à faire venir les caméras. De ce point de vue-là, c’était réussi ! » dit Vincent Alauze.On existeC’est l’heure de rentrer dans le Mondial de l’automobile où les plus grandes marques exposent leurs derniers joujous. Les salariés de Ford et leurs soutiens refont de façon très spontanée la décoration du stand devant de nombreux appareils photos et caméras de télévision : autocollants collés sur les voitures, confettis partout, on fait beaucoup de bruit face une organisation complétement déconfite. « On dit souvent que les patrons cherchent à nous résigner. Là c’était l’inverse, ils n’avaient pas d’autres choix possible que de nous laisser faire notre action » dit Carlos. Philippe approuve : « En faisant cela, on exprime de la fierté et de la dignité. On rappelle à tout le monde que l’on est chez nous, que les voitures sont produites par des salariés surexploités. On occupe la place, comme les Indignés... ». Vincent conclut : « On veut montrer sur la place publique la réalité de la politique de Ford en attaquant leur image de marque. Du coup, beaucoup de bonheur à foutre le bordel sur le stand ».Des convergences qui restent à construireAprès cette apparition réussie au Mondial de l’auto, une délégation des Ford rejoint l’après-midi le meeting intersyndical autour de PSA qui se déroule dans le quartier de la Rose des vents à Aulnay, dans la fameuse cité des 3 000. Beaucoup de délégations d’entreprises du 93 y participent, que ce soit d’Air France ou de Sanofi par exemple. Mais si les soutiens ne manquent pas, au niveau syndical comme au niveau de la gauche radicale, les travailleurs de PSA sont assez peu présents.« Une grosse déception, c’était pas vraiment le tous ensemble ! » dit Vincent, « si peu de travailleurs de la boîte, un vrai soucis » pour Carlos. Philippe lui est plutôt « partagé. On était content d’y être car en cinq années de lutte, on s’est toujours tourné vers les autres. Mais il y a encore plein de barrières à faire tomber, y compris au sein du syndicalisme ». Pour preuve, l’absence de prise de parole à ce meeting des salariés de Ford ou de Fralib venus eux aussi à Aulnay.Qu’importe, on parle déjà de la suite. « Le 9 octobre, on manifestera à Bordeaux mais une délégation sera à nouveau au Mondial de l’auto. L’occasion de rencontrer vraiment les salariés de PSA », assure Vincent. « Ce jour-là, on essayera de faire à Paris une réunion avec ceux des boîtes qui en ont envie, on fait avec les moyens qu’on a… », conclut Philippe. Pour un vrai tous ensemble cette fois ?Manu Bichindaritz