Publié le Mercredi 7 décembre 2011 à 13h12.

Le chômage au cœur de la crise

Après la publication des chiffres officiels du chômage qui marquent une envolée inédite depuis dix ans, Sarkozy s’est cru obligé d’intervenir sur le sujet. Mais ses mesures ne peuvent qu’aggraver la situation. «Contre le chômage, on n’a pas tout essayé ! » Une fois de plus, Sarkozy prend l’initiative sur le terrain social, et cette fois-ci sur un sujet central : la question de l’emploi. Il faut dire que les chiffres sont sans appel : après une augmentation du chômage de 1,2 % en octobre, le nombre de demandeurs d’emploi s’est accru de 5 % en un an. La situation est encore plus dramatique pour les travailleurEs les plus âgéEs avec une progression de 2,4 % en octobre. Depuis le début du mandat de Sarkozy, en mai 2007, le chômage des plus de 50 ans s’est envolé : +55 % ! Par l’annonce d’un sommet sur l’emploi en janvier avec les « partenaires sociaux », Sarkozy déclare vouloir regarder les propositions, tout en disant aussitôt qu’il faudra « avoir le courage » de « lever les tabous sur les freins à la compétitivité française ». Mais dans le même discours, il fustige l’idée des 35 heures et déclare vouloir rallonger le temps de travail tout comme l’âge de départ à la retraite. L’hypocrisie est au maximum quand il évoque la lutte contre le chômage, alors que toutes les mesures du gouvernement tendent au moins à le laisser croître, voire à l’accélérer, C’est le cas de la décision de non-remplacement des fonctionnaires, qui laisse à la rue des milliers de jeunes chaque année.

Pourtant, les annonces de suppressions d’emplois se succèdent, sans que le gouvernement n’intervienne. Tout au plus s’est-il adressé au PDG de PSA pour lui demander de reporter les licenciements… L’entreprise automobile continue sans souci ses plans de fermetures de site, tout en prétendant qu’elles se feraient sans licenciements. En oubliant les intérimaires déjà licenciés. Et les annonces des leaders de l’automobile, dont PSA, ne sont que les parties émergées de l’iceberg : les petites entreprises sont confrontées à des difficultés, les grands groupes reportent sur ces entreprises leur volonté de rentabilité et « sous-traitent » alors licenciements et réductions de salaires.

C’est évidemment l’automobile dont on parle le plus : un des plus gros secteurs industriels de France, mais aussi porteurs de milliers d’emplois. Les équipementiers, dans la sous-traitance automobile, sont pris dans les mêmes logiques de restructuration, alors que leur organisation du travail est depuis longtemps sous le contrôle complet de ces groupes automobiles. Ils se trouvent contraints par les grands groupes automobiles à accompagner les délocalisations. Mais ils sont eux-mêmes des groupes multinationaux, appliquant les mêmes principes de redéploiement international. Luttes contre les licenciements : sur la défensive Face aux licenciements, le mouvement ouvrier est sur la défensive. Entreprise par entreprise, on essaie de s’organiser. La manifestation de Valenciennes, le 19 novembre, autour du site PSA de Sevelnord, le comité contre les licenciements dans l’Eure, les mobilisations autour des Fonderies du Poitou, autant d’exemples qui montrent que les salariéEs ne se laissent pas faire. Quelques batailles emblématiques montrent que la lutte paie, permettant de gagner, pour quelques mois ou quelques années, le maintien de l’emploi, sans pour autant que ce soit une victoire définitive. Mais on voit bien que c’est d’une centralisation politique que le mouvement ouvrier a besoin, une centralisation qui ne peut se trouver que dans une réponse commune des partis et syndicats, liant luttes et propositions politiques. Le travail, un « bien commun »La manifestation du 3 décembre organisée par la CGT chômeurs vient rappeler que la lutte contre les licenciements ne suffit pas. Il faut aussi répondre à la nécessité de créer les millions d’emplois dont ont besoin ces millions de personnes au chômage.

La CGT Chômeurs, par son enquête sur le « budget de vie » des bénéficiaires des minima sociaux, rappelle aussi que la situation est de plus en plus difficile pour une partie de la population. Cette enquête, menée dans de nombreuses villes de France, vise à mettre en évidence les besoins non satisfaits. Elle se conclut par cette question fondamentale : « Chaque mois, il me manque pour vivre décemment : … ». 

La phase actuelle de la crise et les mesures d’austérité prises en son nom s’appliquent à une population qui subit déjà la crise depuis des années. On ne peut rester seulement sur la défensive, les situations d’urgence vécues par de nombreuses personnes obligent à mettre au contraire en avant des propositions nouvelles, qui permettent d’avancer ensemble.

Le mouvement ouvrier répond par une exigence simple : le partage du travail par une réduction du temps de travail et les embauches correspondantes. Nous refusons le contre-exemple que représente le temps partiel, appliqué principalement aux femmes et accompagné d’une baisse des salaires. Un véritable partage du temps de travail, donnant du travail à toutes et tous, ne peut s’appuyer que sur un partage des richesses.

Louis-Marie Barnier