La Loi de financement de la Sécurité sociale (LFSS) examinée au Parlement depuis le 23 octobre, sera définitivement adoptée le 4 décembre. Elle contient des dispositifs qui permettront de saper les fondements de la Sécurité sociale.
En 1996, une nouvelle disposition a été ajoutée à la Constitution de 1958, elle a institué « les lois de financement de la Sécurité sociale [qui] déterminent les conditions générales de son équilibre financier et, compte tenu de leurs prévisions de recettes, fixent ses objectifs de dépenses ». Dès 1997, le budget de la Sécu est enserré dans une enveloppe étroite, rompant ainsi avec le principe proclamé en 1945 à la création de la Sécu, selon lequel « chacun cotise selon ses moyens et reçoit selon ses besoins ». Dès lors c’est l’inverse qui s’impose : les besoins doivent s’adapter aux moyens accordés par le Parlement, et toujours plus d’austérité est imposée aux malades, aux retraitéEs, aux familles. Macron amplifie les mesures antisociales de ses prédécesseurs, et veut en plus imposer de nouvelles dispositions qui subrepticement faciliteront la mise en œuvre de contre-réformes. La LFSS devient un instrument de casse de la Sécu.
La diète pour la famille, les retraitéEs et la santé
En raison notamment du vieillissement de la population et d’une meilleure prise en charge des maladie chroniques, la progression naturelle des dépenses de santé en 2019 est évaluée à 4,5 %, mais l’augmentation réelle sera limitée à 2,5 %. Les hôpitaux, les maternités, les EHPAD, déjà lourdement sinistrés, devront réaliser 3,8 milliards d’économies supplémentaires. L’augmentation des allocations familiales et des pensions de retraite sera limitée à 0,3 %, alors que l’inflation de 2019 est estimée entre 1,7 % et 2 %.
Le gouvernement annonce le « 100 % santé ». Cela concerne uniquement les remboursements par la Sécu et les complémentaires santé des frais d’optique, de soins dentaires et d’audioprothèses contenus dans un panier de soins. Un exemple : le tarif des montures de lunettes remboursées sans reste à charge sera de 30 euros. Les équipements de meilleure qualité resteront à tarif libre et seront remboursés par les complémentaires santé dans les conditions définies par les contrats. La plus grosse fédération de mutuelles (la FNMF) a déjà annoncé une augmentation de ses tarifs de 4 à 5 %. Le modèle du Medef, un filet de sécurité de bas de gamme pour les pauvres et des assurances privées pour ceux qui peuvent payer, commence à être instauré.
Vers un assèchement des caisses ?
Le budget de 2018 de la Sécu est officiellement excédentaire, c’est le fruit des déremboursements, des coupes budgétaires dans les hôpitaux, de l’absence de revalorisation des retraites et des allocations familiales... Le gouvernement a décidé de mettre fin à l’autonomie du budget de la Sécu en puisant dans sa caisse pour renflouer le budget de l’État. Les nouvelles exonérations de cotisations (sur les heures supplémentaires notamment) ne seront pas compensées. Et la loi de finances de l’État pour 2019 prévoit même de piquer dans les caisses de la Sécu pour financer les exonérations de cotisations accordées par le passé (1,5 milliard en 2020, 3,5 milliards en 2021 et de 5 milliards en 2022), peu importe la situation financière des caisses ces prochaines années. Les caisses de Sécu pourraient ainsi être asséchées.
Le débat de révision de la Constitution, suspendu grâce à Alexandre Benalla, va reprendre. Il n’y aura plus de loi de financement de la Sécu mais de la « protection sociale », intégrant ainsi des institutions étatiques, départementales, privées… La Sécu sera diluée dans une vaste entité et l’État pourra éventuellement éponger son déficit en plongeant dans les caisses de l’aide sociale, des -complémentaires santé et retraite…
L’achèvement de la Sécu se profile : vigilance et mobilisation !
S. Bernard