Face à un pouvoir qui joue avec nos vies pour sauver les profits, l’heure est à se faire entendre.
Àl’heure où ces lignes sont écrites, il est toujours possible d’acheter du déodorant dans un supermarché, mais pas du maquillage. Mardi 3 novembre, le porte-parole du gouvernement Gabriel Attal annonçait un renforcement des dispositifs de couvre-feu, avant d’être démenti quelques heures plus tard par le chef du même gouvernement. Les personnels des hôpitaux, épuisés, tirent la sonnette d’alarme, mais le Premier ministre explique doctement que « le meilleur moyen de soulager l’hôpital, c’est de ne pas tomber malade ». La confusion est totale, l’irrationalité sanitaire des décisions gouvernementales est, plus que jamais, mise à nu, et les colères, jusqu’alors souvent contenues, explosent, entre autres dans l’éducation nationale.
Métro-boulot-dodo ?
Alors que les chiffres de la deuxième vague de l’épidémie de Covid-19 sont des plus alarmants, il apparaît en effet de plus en plus évident, et de plus en plus largement, que les décisions du gouvernement ne sont en aucun cas motivées par les impératifs de santé publique et par la protection des vies, de nos vies. Les conditions du deuxième « confinement », à l’œuvre depuis le 30 octobre, sont ainsi des plus rocambolesques : défense d’aller prendre un verre dans un bar… mais obligation d’aller enseigner dans des classes surchargées ; interdiction d’organiser un repas avec des amiEs… mais l’atelier confiné avec 25 collègues, ça continue ; le cinéma, c’est fini… mais on pourra continuer à s’entasser dans des métros et des bus bondés.
Évidemment, pour contenir l’épidémie, la réduction des interactions sociales et la promotion des gestes barrières sont nécessaires. Mais comment croire une seule seconde que le couvre-feu étendu que constitue le deuxième « confinement », sur le modèle métro-boulot-dodo, est une réponse adéquate face à la nouvelle flambée de Covid ? Les recettes de Macron et compagnie sont une fois de plus marquées du sceau du néolibéralisme autoritaire : le pouvoir joue avec le feu, et donc avec nos vies, obsédé qu’il est par la menace d’une « paralysie » de l’économie et déterminé à nier les évidences, quitte à se contredire lui-même en permanence.
Le pouvoir ment
Le gouvernement porte une immense part de responsabilité dans le re-développement de l’épidémie, et ce ne sont pas les mensonges au sujet d’une deuxième vague « largement inattendue » (Gabriel Attal, encore lui) qui occulteront cette responsabilité. Dès le mois de juin, de nombreuses voix se faisaient entendre pour prévenir du risque d’une deuxième vague. Le président du conseil scientifique lui-même, Jean-François Delfraissy, peu suspect d’hostilité au gouvernement, alertait ainsi les autorités, le 18 juin, sur le risque d’une « vraie deuxième vague à l’automne ». Quelques jours plus tard, le 22 juin, le Conseil scientifique écrivait : « Une intensification de la circulation du SARS-CoV-2 dans l’hémisphère nord à une échéance plus ou moins lointaine (quelques mois, et notamment à l’approche de l’hiver) est extrêmement probable ». Et ce ne sont que les exemples les plus institutionnels…
Qu’a fait le gouvernement ? Rien, ou presque. Aucune politique sérieuse concernant les tests : ni embauches, ni commande de machines, ni mise en place de tests rapides, ni réel traçage. Aucune politique de distribution gratuite des équipements de protection (masques notamment), ni de prévention. Aucune politique d’embauches massives à l’hôpital, de réouvertures de lits et de services, malgré les demandes continues des personnels. La liste n’est pas exhaustive. Et pendant ce temps-là, des dizaines de milliards d’euros étaient injectés dans les caisses du patronat, sans contrôle ni contreparties.
« Vous ne ferez pas taire notre colère ! »
Nombreux et nombreuses sont celles et ceux qui refusent aujourd’hui de consentir docilement au confinement/couvre-feu imposé par les mêmes qui n’ont rien fait pour freiner réellement la deuxième vague. A fortiori dans la mesure où les décisions tombent d’en haut, sans aucune concertation, sans aucun processus d’association de la population, avec pour conséquence des mesures souvent aberrantes et/ou inapplicables, et des dispositifs toujours plus liberticides pour faire respecter lesdites décisions, à coups de verbalisations, voire de matraque. Alors quand, de surcroît, le gouvernement franchit de nouveaux caps en tentant par exemple d’exploiter honteusement, lors de la rentrée scolaire, l’assassinat de Samuel Paty, la colère explose.
À l’image de ces enseignantEs et de ces lycéenEs qui se mobilisent pour faire entendre leur ras-le-bol, nous ne devons pas laisser le gouvernement confiner nos colères. Hors de question de rejouer la partition du confinement du printemps, avec la pression à l’unité nationale face à la maladie et la seule perspective de se mobiliser « après ». Nous devons le dire haut et fort : pour lutter efficacement contre le Covid, il ne suffit pas d’adopter les – nécessaires – comportements individuels et collectifs responsables, mais il faut lutter, ici et maintenant, contre un gouvernement et ses politiques qui font primer les profits sur la vie. À l’instar de ce qui se passe dans diverses entreprises et dans l’éducation nationale, où les salariéEs affirment qu’ils et elles sont les mieux placés pour savoir ce qui est essentiel et comment réorganiser le travail. À l’instar aussi des initiatives locales qui se développent, comme à Toulouse, avec une manifestation unitaire, regroupant personnels hospitaliers, associations, syndicats et partis politiques, appelée le 7 novembre pour exiger des moyens pour la santé et la fin des mesures liberticides : « Vous ne ferez pas taire notre colère ! »