Les attaques dévastatrices de Macron contre les droits sociaux et la protection sociale se bousculent et se précipitent. Mais l’indispensable riposte est loin d’être à la hauteur.
Lundi 20 novembre, les députés votaient la suppression du jour de carence pour les fonctionnaires, et mercredi 22 était présenté en Conseil des ministres un projet de sélection des lycéenEs qui vise à exclure celles et ceux qui sont issus des quartiers et milieux populaires. La loi travail n’est pas encore bouclée – les décrets ne sont pas tous publiés – que s’amassent les nuages noirs de la réforme de l’Unedic qui précède elle-même la tempête sur les retraites...
Augmenter la pauvreté et stigmatiser les plus pauvres
L’un des prochains coups vise en effet les chômeurEs, avec le changement de la gestion de l’Unedic. L’État qui, aujourd’hui, agrée, ou pas, les conventions signées par le Medef et les organisations syndicales, serait désormais intégré directement à la gestion. C’est la face cachée – ou plutôt « obscure » – de la suppression des cotisations chômage et maladie pour les salariéEs du privé en « compensation » de la hausse de la CSG (qui concerne aussi touTEs les retraitéEs, les chômeurEs et les fonctionnaires). L’assurance chômage basée sur les cotisations laisserait place à un régime financé par la CSG, donc par l’impôt. Macron présente ce nouveau régime chômage comme un « droit universel, pour plus d’équité et de fluidité sur le marché du travail ». Sous l’apparente générosité de l’élargissement aux démissionnaires (une fois tous les cinq ans après cinq ans d’ancienneté dans une entreprise) et aux indépendantEs (artisanEs, commerçantEs, professions libérales, agriculteurEs...), son modèle est le forfait minimal pour le plus grand nombre, et les assurances privées pour celles et ceux qui peuvent. Concrètement ce seront des allocations plus faibles pour une durée plus courte, et plus de flicage pour combattre non pas le chômage mais les chômeurEs elles et eux-mêmes.
Une société de la précarité généralisée
Dans la multiplication des contre-réformes, il y a une constante : la précarisation, la fragilisation, l’insécurité sociale, la mise en danger de la grande majorité de la population, que l’on soit salariéE du public ou du privé, précaire en intérim, contrat à durée déterminée ou contrat aidé, chômeurE, jeune en formation, retraitéE... Cette mise en danger concerne tous les aspects de nos vies : l’emploi et le salaire évidemment, mais aussi le logement, la santé, l’éducation... sans oublier notre environnement, nos libertés et nos droits démocratiques.
État d’urgence social
Si la mobilisation était à la mesure de la régression, un tel tsunami néolibéral devrait provoquer une insurrection populaire. Mais nous n’en sommes pas là, loin s’en faut. Si des résistances existent bel et bien, nous avons échoué à faire barrage aux ordonnances sur la loi travail XXL. Nos manifestations n’ont pas été suffisamment puissantes, nos grèves ont été trop rares et trop faibles pour ébranler un pouvoir qui n’a pourtant que peu de légitimité. Plus que les bilans, ce sont les enseignements que nous devons tirer si nous voulons briser le cercle infernal des défaites...
À l’évidence, nous avons manqué d’un plan de mobilisation en lieu et place d’une succession de journées sans réelle cohérence, nous avons aussi manqué d’unité, d’unité syndicale, d’unité entre les forces syndicales, politiques... de l’unité de toutes celles et ceux qui ont des raisons de s’opposer à la politique de Macron et du Medef. Mais rien n’est venu bousculer la frilosité et la routine.
La reconstruction est nécessaire
Pire, nous n’avons pas réussi à convaincre de l’utilité de se mobiliser, de la possibilité de gagner. Nous avons besoin de succès. Nous avons besoin de démonstrations de force réussies. Une manifestation nationale contre Macron et sa politique peut être une bonne idée, si elle est préparée partout, unitairement, avec détermination, comme un point de départ d’une reconstruction plus profonde et durable des outils collectifs de lutte, d’organisation et de solidarité eux aussi malmenés par la précarisation généralisée.
Nous avons aussi besoin d’opposer au projet Macron, de « pur capitalisme », un projet de société de « bien vivre », qui assure un salaire tout au long de la vie, que l’on soit jeune en formation, retraitéE, travailleurE avec ou sans emploi, la gratuité pour la satisfaction des besoins sociaux fondamentaux, une réduction du temps de travail et un contrôle sur son contenu, son organisation et sa finalité, mais aussi une démocratie réelle et une égalité de toutes et tous.
Christine Poupin