Pendant que nos dirigeants politiques nous imposent des plans d’austérité à la chaîne, eux-mêmes se vautrent dans un luxe indécent.L’affaire serait entendue : c’est un système, économique et politique, que nous combattons. Et non des individus. La lutte politique est affaire de débats d’idées, non de polémiques visant des personnes. Sans doute est-ce pourquoi, bien souvent, nos dénonciations du capitalisme restent relativement abstraites et désincarnées, entre énumération de données statistiques et explication de concepts.
Pourtant, la bourgeoisie – la « classe dominante » – n’est pas (seulement) un concept, mais d’abord une réalité bien vivante. Les crapules qui nous pourrissent la vie ont des visages et des noms : ceux des dirigeants du CAC 40. Et, aussi, de leurs mercenaires et complices de la classe politique. L’actualité des dernières semaines fournit d’ailleurs une assez écœurante galerie de portraits de personnages publics pris la main dans le sac… et s’étonnant de l’indignation que suscitent leurs comportements. Christine Boutin ne voyait rien d’anormal à cumuler retraite parlementaire (6 000 euros), indemnités de conseillère générale (2 000) et rémunération d’une « mission » sur la mondialisation (9 500). Soit 17 500 euros mensuels quand même. Alain Joyandet, secrétaire d’État à la Coopération, s’indigne qu’on lui reproche de fausses déclarations afin d’obtenir un permis de construire illégal pour sa villa sur la Côte. Lui qui s’était déjà offert, aux frais du contribuable, un vol en Martinique à bord d’un jet privé pour la somme exorbitante de 116 500 euros ! Exorbitante… mais quand même inférieure au coût d’un des voyages de son collègue, Christian Estrosi : 138 000 euros ! Lequel Estrosi a aussi été récemment épinglé à propos de son logement de fonction. Une « soupente » selon le ministre ; en réalité, un « trois pièces » mansardé dans un hôtel particulier… qui ferait rêver des millions de mal-logés ! Ajoutons Rama Yade, dénonçant le luxe dans lequel était hébergée l’équipe de France en Afrique du Sud, avant que l’on apprenne qu’elle-même avait réservé une « chambre » à 667 euros la nuit, ainsi que cinq autres à 340 euros pour ses collaborateurs. Ou encore Roselyne Bachelot qui a employé son propre fils successivement comme assistant parlementaire (lorsqu’elle était députée) puis comme conseiller lorsqu’elle était ministre de l’Écologie, et qui, ministre de la Santé, vient de lui trouver un job (à 50 000 euros par an) dans un organisme dépendant… du ministère de la Santé ! N’oublions pas non plus les 12 000 euros annuels de cigares du secrétaire d’État au Grand Paris, Christian Blanc… La cupidité, bien sûr. Mais, surtout, cette arrogante certitude que tout leur est dû. Et l’on en arrive à l’affaire « Woerth – Bettencourt ». Un ministre du Budget qui est aussi trésorier de l’UMP. À moins que ça ne soit l’inverse ! Dont l’épouse prodigue ses conseils d’investissements à l’une des premières fortunes de France. Laquelle première fortune tente de frauder le fisc… mais participe généreusement au financement des campagnes politiques de divers candidats et candidates UMP. Un vrai cas d’école ! Tellement emblématique des liens inextricables et personnels tissés entre les puissances d’argent et la classe politique. Mais ministres et sous-ministres sont parfaitement au diapason de leur boss, Nicolas Sarkozy, l’habitué du Fouquet’s, l’ami intime des plus gros patrons français. Et le zélé serviteur de leurs intérêts. La cerise sur le gâteau ? Tous ces politiciens qui se goinfrent d’argent public (et parfois privé) ne sont pas les derniers à accuser le bon peuple de « vivre au-dessus de ses moyens » et à lui prêcher les vertus des sacrifices et de l’austérité ! Un gouvernement ? Non, une authentique association de malfaisants ! François Coustal