Départements et gouvernement sont en conflit sur le financement du RSA (revenu de solidarité active) aujourd’hui à la charge des départements. Alors que ceux-ci, comme l’ensemble des collectivités territoriales, subissent la baisse continue des dotations de l’État (amplifiée par le Pacte de responsabilité), ils doivent faire face à une augmentation des besoins sociaux du fait de l’aggravation de la crise.
La gestion du RSA a été confiée aux départements en 2004 dans le cadre de « l’acte 2 de la décentralisation ». Une décentralisation débutée en 1982 et qui n’en finit pas de transférer des compétences de l’État vers les collectivités... sans que les moyens soient transférés !
Les effets pour la population sont multiples : hausses d’impôts locaux pour faire face aux dépenses nouvelles non financées, coupes budgétaires lourdes de conséquences, sans compter les disparités qui s’accentuent entre départements. C’est ce que dénonçait il y a quelque temps le président de Seine-Saint-Denis (PS) : « la part prélevée par le département dans la taxe foncière est de 14,88 % en Seine-Saint-Denis, contre seulement 7 % dans les Hauts-de-Seine. Et pour trouver l’argent nécessaire au financement du RSA, nous sommes obligés de réaliser des économies… : nous baissons les budgets sur l’entretien des routes, sur la création d’équipements sportifs, sur la rénovation de structures culturelles, sur les subventions aux associations… La vérité, c’est que depuis la décentralisation du RSA en 2004, l’État fait payer par les pauvres la solidarité envers les plus pauvres »…
Après des mois de négociations... reste l’urgence sociale !
Le nombre d’ayants droit du RSA ne cesse d’augmenter (même si plus de 30 % d’entre eux n’en font pas la demande !) : en juin 2016, 2,23 millions de foyers le recevaient, soit 7 % de plus qu’il y a un an... et plus de 70 % de plus qu’en 2009, année où le RSA a remplacé le RMI. Et alors qu’en 2009, le gouvernement reversait aux départements 90,4 % des indemnités versées, en 2015, cela ne représentait plus que de 61,3 %. La part restant à la charge des départements est ainsi passée de 600 millions à 3,6 milliards d’euros.
Après des mois de négociations avec l’Assemblée des départements de France (ADF), Valls a annoncé en février une « prise en charge par l’État du financement du RSA, à condition que les départements s’engagent à renforcer l’accompagnement de ses bénéficiaires vers l’insertion et l’emploi »… Mais l’ADF vient de refuser, estimant la contrepartie trop élevée, sans compter que nombre de présidents de départements souhaitent conserver la prérogative de cette gestion… Des départements dont certains n’hésitent pas à stigmatiser les pauvres et à faire leur propre loi, tel le Haut-Rhin qui avait décidé de conditionner le versement du RSA à sept heures hebdomadaires de « bénévolat obligatoire », avant d’être contraint à reculer par le tribunal administratif.
Pour l’heure, le gouvernement a annoncé un fonds d’aide d’urgence pour que les départements les plus en difficultés n’interrompent pas les versements. Mais, pour le RSA comme pour l’ensemble des droits sociaux, l’intervention de la population, des salariéEs et des pauvres eux-mêmes, est plus que jamais nécessaire !
Isabelle Ufferte