Publié le Mercredi 11 janvier 2012 à 21h36.

TVA antisociale : faire échouer le pari de Sarkozy

La TVA prétendue sociale devrait être une des mesures « pour l’emploi » proposées par le gouvernementle 18 janvier prochain.

En décidant de faire voter son projet de « TVA sociale », Sarkozy fait un pari risqué : imposer, quelques semaines avant les élections, un 3e plan d’austérité et une contre-réforme qui porterait un coup décisif à la Sécurité sociale.
Le projet du gouvernement reprend celui du Medef. Il consisterait à réduire très fortement les 5,4 % de cotisations versées par les patrons à la « branche famille » de la Sécu (les allocations familiales), soit un cadeau d’environ 30 milliards d’euros.

Cette baisse des cotisations patronales serait compensée par une hausse d’environ six points de la TVA qui passerait donc à 13 % pour les produits de première nécessité et à 25,6 % pour les autres !
Il faut appeler les choses par leur nom. Derrière les formules « faire baisser le coût du travail », « accroître la compétitivité de nos entreprises », c’est tout simplement de la baisse massive des salaires qu’il est question.
Réduire les cotisations sociales de 30 milliards, c’est pour les patrons faire 30 milliards d’économie sur les salaires (salaires et cotisations sociale) et donc augmenter d’autant la part des profits. À terme, l’enjeu, c’est l’ensemble des 400 milliards de cotisations sociales qui sont aussi une part de notre salaire, mis en commun pour financer nos retraites, notre santé, nos allocations chômage ou l’éducation de nos enfants.
Compenser le cadeau ainsi fait aux patrons par la TVA, c’est un nouveau hold-up sur les revenus de l’ensemble des classes populaires sous forme d’impôt sur leur consommation quotidienne.
La TVA est de plus l’impôt le plus injuste de tous, puisqu’il pèse en proportion davantage sur les plus petits revenus : l’incidence de la TVA est de 11,5 % pour les 10 % de ménages les moins aisés et de 5,9 % sur les 10 % de ménages les plus aisés !
Depuis 30 ans, les gouvernements de droite comme de gauche ont prétendu favoriser l’emploi en « baissant le coût du travail », avec le résultat que l’on connaît.
Accepter la baisse des salaires directs (le salaire net) ou indirects (les cotisations sociales) est un marché de dupes où les salariéEs sont toujours perdantEs.
Pour faire avaler la pilule, la présidente du Medef propose en même temps la baisse des cotisations dites « patronales » et celle des cotisations dites « salariales ». Ainsi, selon elle le salaire net serait augmenté et chacun serait gagnant ! C’est un leurre car Laurence Parisot propose de remplacer ces cotisations « salariales » par la CSG (contribution sociale généralisée)… elle aussi payée à 85 % par les salariéEs.
Tout au plus y aurait-il une modification de la répartition de l’effort… au sein des classes populaires !
Mais, au-delà des conséquences immédiates, le remplacement des cotisations sociales par la TVA exonérerait définitivement le patronat du financement de la protection sociale.
À terme, on se retrouverait avec une Sécu minimum financée par l’impôt (soins coûteux, assistance aux plus pauvres). Pour la grande majorité de la population, il faudrait avoir recours à des assurances complémentaires. C’est là le deuxième but de l’opération. En un mot, ce serait la fin de la Sécurité sociale.
Ajoutons qu’un impôt ne peut être pré-affecté à une dépense précise. Rien ne garantit que la hausse de la TVA aille réellement à la protection sociale. L’exemple de la vignette automobile, censée bénéficier aux personnes âgées et utilisée à tout autre chose est resté célèbre !
Chacun doit mesurer l’enjeu des semaines à venir. Si Sarkozy parvient à mettre en place la machine de guerre de sa contre-réforme, il suffira par la suite de la faire tourner au nom de la « crise », de la « dette » ou de la « défense de l’emploi » pour en finir définitivement avec la Sécurité sociale.
Il ne s’agit donc pas d’attendre les élections.
L’ensemble du mouvement syndical et de la gauche politique s’est prononcé contre la TVA antisociale qui est l’objet d’un rejet massif et spontané.
Une mobilisation unitaire peut et doit se construire, sans aucun préalable, pour le retrait immédiat du projet gouvernemental, avec comme première échéance la mascarade du « sommet social » du 18 janvier.
Comme l’a proposé Philippe Poutou, candidat du NPA à l’élection présidentielle, dès le 4 janvier : « Toutes les forces de la gauche sociale et politique devraient se rencontrer au plus tôt pour définir ensemble les modalités immédiates d’une riposte afin d’empêcher ce mauvais coup supplémentaire du quinquennat Sarkozy. »
Il n’y a, en effet, pas une minute à perdre.
Jean-Claude Delavigne