Malgré les menaces qui pèsent sur leurs emplois, les salariés de Visteon ont bloqué la production pendant quatre jours pour leurs salaires.Le lundi 22 mars, les travailleurs de l’équipementier automobile Visteon (tableaux de bord et équipements intérieurs d’automobiles) des sites de Gondecourt (Nord), de Carvin et Harnes (Pas-de-Calais), se sont mis en grève reconductible à l’appel de l’intersyndicale pour l’augmentation de leurs bas salaires. Feu de palettes, inscription sur la chaussée « Salaires de misère, 5 % d’augmentation ou rien », ils ont débrayé massivement, déterminés à arracher 5 % d’augmentation et 700 euros de prime de vacances. Alors que le groupe multinational a réalisé, en pleine crise, 128 millions de dollars de bénéfices en 2009, la direction ne voulait lâcher que des miettes : 1,8 % d’augmentation générale pour les ouvriers et 1,6 % d’augmentation individuelle pour les cadres. Solidaires, tous les salariés, cadres et non cadres, des trois sites ont donc serré les coudes pour défendre leur dû malgré le chantage à l’emploi du groupe. Le site de Flins-sur-Seine (Yvelines) a en effet fermé, le site de Carvin est menacé et la direction vient d’annoncer son intention de réduire les effectifs de moitié d’ici à 2013. Des licenciements supplémentaires pour doper les profits d’un groupe responsable de huit plans sociaux depuis 2001. Le blocage de la production pendant quatre jours a entraîné une rupture de stock et l’arrêt les chaînes de montage de l’usine automobile Sevelnord (Nord). La direction a été forcée de lâcher 2,9 % d’augmentation générale. C’est encore loin des 5 % pour tous mais cela représente, avec les primes (700 euros de prime de vacances et une prime d’intéressement uniforme pour tous), une revalorisation de 4,9 %. Même si la victoire est partielle, elle a eu le mérite de rappeler que la lutte peut payer, même chez les sous-traitants de l’automobile frappés par un gigantesque plan de restructuration, notamment quand elle paralyse la production des constructeurs comme Renault qui dépendent de l’approvisionnement continu et quotidien des pièces de la sous-traitance. Un peu plus tôt dans le mois, les 147 salariés de Faurecia à Auchel (Pas-de-Calais) avaient bloqué leur usine pendant neuf jours pour le maintien de tous les emplois jusqu’à 2015 au moins. Faute de tableaux de bord, l’usine Volvo de Gand (Belgique) était sur le point de s’arrêter. La direction a dû céder, là aussi. Si les salariés de Visteon ont aujourd’hui rangé les palettes et repris le travail, leur grève sonne comme un avertissement. Comme dit l’un d’eux, « au moindre truc, ce ne sera pas dur de se mobiliser ».Alors que les sous-traitants de l’automobile annoncent 40 000 à 50 000 suppressions d’emplois dans les deux prochaines années, leur lutte vient rappeler qu’il n’y a pas de fatalité, qu’il est possible de changer, par la grève, le rapport de forces. Raymond Adams