Publié le Jeudi 12 mai 2022 à 13h00.

Dimanche 29 mai : journée nationale contre les violences pénitentiaires

En septembre 2020, la famille d’Idir Mederess apprend le « suicide » de ce dernier, au quartier disciplinaire de la prison de Lyon-Corbas, dans des conditions tout à fait troubles. Si son combat se poursuit devant l’autorité judiciaire pour la vérité et la justice, la mère d’Idir appelle, depuis l’an dernier, à se mobiliser chaque dernier dimanche de mai contre les violences pénitentiaires. En réponse à cet appel, le 29 mai, se tiendront, dans plusieurs villes de France, rassemblements et manifestations

Loin de représenter un simple fait divers, la mort suspecte d’Idir est un cruel exemple de l’opacité qui entoure les violences systématiques en milieu carcéral. À l’instar de la lutte contre les violences policières, celle contre les violences pénitentiaires et la question de l’anticarcéralisme concentrent des enjeux politiques centraux. Lutter contre le capitalisme implique de lutter contre la prison et son fonctionnement.

La prison : une épée de Damoclès au-dessus des classes populaires

La prison est, à la fois, une menace à l’endroit de celles et ceux qui voudraient subvertir l’ordre capitaliste et un moyen direct d’annihilation sociale de celleux qui, par leur simple existence ou pour survivre, troublent cet ordre. Pour reprendre les termes de Jean-Marie Delarue : « De manière générale, la loi n’est pas faite pour les pauvres. »1 D’un bout à l’autre en effet, de l’élaboration des lois pénales au fonctionnement des établissements pénitentiaires, la chaîne pénale exerce autorité et violence d’abord sur les personnes les plus défavorisées2. La prison apparaît alors comme clef de voûte du contrôle social – que cela soit par la criminalisation des militantEs ou par celle des comportements symptomatiques de la pauvreté et de la précarité – fondée sur la mise à l’écart et la désocialisation. 

Un huis clos amplificateur des oppressions

Par la rareté des établissements pénitentiaires pour femmes ; par l’absence de mise en accessibilité ; par la sociologie à la fois des détenuEs et des personnels de surveillance ; par la rigidité des normes disciplinaires en son sein, la prison exagère dramatiquement les violences sexistes, validistes, transphobes et racistes. Le système carcéral est ainsi incapable de répondre aux problèmes auxquels la société doit faire face, pire, il les perpétue.

Derrière les barreaux, le profit

La prison n’est pas seulement une institution qui « punit » ou « répare », elle est aussi régie par les logiques capitalistes : derrière l’augmentation du nombre de prisons et du nombre de places, ce sont des intérêts privés qui sont en jeu. De la construction à la gestion des services internes (ménage, cantine...), les géants capitalistes comme Bouygues, Vinci, Elior et bien d’autres se partagent le gâteau. Sans compter que les détenuEs représentent une main-d’œuvre plus que bon marché. Le tout récent « contrat d’emploi pénitentiaire » n’y change rien ; malgré de minces progrès, ils et elles ne sont toujours pas soumis au droit du travail en vigueur à l’extérieur : le salaire minimum demeure indécent, l’indemnisation des congés maladie non professionnelle demeure absente, les droits collectifs (syndicaux, de grève, de représentation) également... En prison comme ailleurs, le droit du travail doit s’appliquer !

A, anti, anticarcéral !

Ces problématiques doivent amener les révolutionnaires à remettre en question le système carcéral en tant que tel et à penser une alternative à même de véritablement réparer, aider et intégrer. D’autant qu’on le sait, la « réinsertion » tant promise par les promoteurs d’une prison « humaine » est un leurre : selon l’OIP, 63 % des personnes condamnées à une peine de prison ferme sont à nouveau condamnées dans les cinq ans3.

Dimanche 29 mai, rejoignons les mobilisations contre les violences pénitentiaires et soutenons partout les mobilisations et les actions des familles des victimes et du réseau d’entraide vérité et justice !

  • 1. Jean-Marie Delarue, contrôle général des lieux de privation de liberté de 2008 à 2014.
  • 2. Ainsi, selon l’OIP, 44 % des personnes détenues n’ont aucun diplôme, 10 % sont en situation d’illettrisme. En outre, plus de la moitié d’entre elles est sans emploi avant l’incarcération.
  • 3. Annie Kensey et Abdelmalik Benaouda, « Les risques de récidive des sortants de prison : une nouvelle évaluation », Cahiers d’études pénitentiaires et criminologiques, 2011.