Publié le Lundi 5 avril 2010 à 18h18.

Eric Zemmour, ou l'écume d'une (in)conscience coloniale française

 

Il règne depuis deux ans un climat assez délétère en France. Celui-ci est officialisé depuis le fameux ministère d’une identité assez vague. La parole d’élu-e-s de la République s’est libérée, souvent considérée comme de «simples dérapages», alors qu’en réalité elle n’est que la triste révélation de leurs pensées les plus profondes. Comme le dirait un vieux borgne «Je dis tout haut, ce que tout le monde pense tout bas». Tout le monde? Pas si sur. Et pourtant ….Un triste sire, sévit depuis quelques temps sur les de plateaux de radio-télévision, publique et privée, pour calomnier et stigmatiser Noir-e-s et Arabes et faire du racisme son principal fond de commerce. Et oui, par les temps qui courent, mieux vaut ne pas parler des vrais sujets de société, comme la crise sociale. Comme le dit si bien Ibra Kadhy Ndiaye (1), au-delà de ses outrances et ses erreurs, Zemmour, n’est que le reflet de l’inconscient colonial français. Il nous diverti, mais au fond c’est pire. Au nom de la liberté d’expression il participe au développement une pensée mensongère, celle que l’ennemi est aussi de l’intérieur. Et Monsieur, aujourd’hui se dit victime d’un Maccarthysme moderne. Problème: n’est pas Henry Miller qui veut.

Dans une mentalité impérialiste, la position d’un tel individu s’explique. La domination, culturelle, persiste. Ce n’est pas tant le personnage qui importe, mais le système ambiant qui permet l’hyper-médiatisation d’un médiocre qui cherche son heure de gloire. Et ce médiocre-là, fait très mal. D’un mal sous-jacent, dont on ne percevra pas de suite les conséquences dramatiques. Et on ne peut que donner raison à certains écrivain-e-s. La France de Sarkozy est vraiment monstrueuse. Aujourd’hui, en Sarkoland, être noir-e ou d’origine maghrébine, c’est porter éternellement la carte de séjour sur son visage, c’est un crime. C’est être la cible politico-médiatique idéale d’individus au service de la pensée capitaliste. On est toujours redevable ou coupable de quelque chose, surtout dans l’inconscient collectif.

Selon Pascal Bruckner, le philosophe néo-conservateur, il serait grand temps que l’homme blanc cesse de verser des sanglots sur la colonisation en général et en particulier l’Afrique. Certes, peut-être a-t-il raison, mais force est de constater que les crocodiles sont bien présents parmi les dirigeants français. Les mêmes, patrons de presse et dirigeant-e-s de multinationales coloniales, mais dont Zemmour se garde de dénoncer les méfaits et pour cause …En cette année de célébration du cinquantenaire des «indépendances» africaines, il me vient une pensée. Après le discours de Dakar de Sarkozy, Zemmour nous offre celui de «Château-Rouge» version à peine remaniée du premier. On ne nait pas raciste. Mais quand on le devient, c’est pour la vie.

Avec Albert Camus, essayons d’élever notre pays en élevant son langage. Zemmour, lui s’est arrêté à Flaubert et n’a jamais entendu parler des trois Dumas.

Mariam Seri-Sidibe.

(1) Ibra Kadhy Ndiaye, «N’allez pas le répéter, mais le nègre vous emmerde!», Mediapart, 24 mars 2010