Un texte publié sur Facebook, le 6 janvier, par nos camarades de Bordeaux en luttes.
Les quartiers dits « sensibles » viennent de montrer qu’ils existaient et qu’ils souffraient, avec notamment la mort dramatique du jeune de 16 ans aux Aubiers, avec les incidents et tensions multiples de ces derniers jours dans d’autres quartiers populaires de Bègles, Eysines ou Pessac.
Des quartiers, des populations habituellement invisibilisées, tenues à l’écart, discriminées, appauvries par une crise qui s’approfondit toujours plus.
Alors la violence dans ces quartiers s’aggrave-t-elle ? Est-ce seulement un problème de voyous, de délinquants, de guerre des bandes, de trafics ? Ce ne serait qu’un problème de sécurité qui ne devrait se régler qu’à coup d’interventions policières, de sanctions pénales ?
Des histoires de meurtriers ou de voyous ?
Derrière les violences qui frappent ces quartiers, entre les règlements de comptes, les tirs sur des jeunes, les caillassages, les bureaux de poste ou arrêts de tram brûlés et détruits, n’y a-t-il que des histoires de meurtriers ou de voyous ? N’y a-t-il pas, en toile de fond, une réalité sociale, une souffrance sociale, de vies malmenées et écrasées pour des milliers de personnes. La question de la violence ne va-t-elle pas plus loin que des problèmes de délinquance ?
Ne devrait-on pas parler plus de la violence d’une société profondément injuste qui enferme les plus pauvres dans des quartiers éloignés, qui les condamne à des logements souvent incorrects voire insalubres, concentrés dans des espaces insuffisants et dans le bruit ?
Certes il y a de la délinquance, des trafics, des violences, des meurtriers, mais la loi de la jungle capitaliste provoque forcément de telles situations. En condamnant des gens à essayer de survivre, à se débrouiller pour s’en sortir alors qu’il n’y a pas de boulot, pas de quoi se raccrocher à un espoir, tout devient très compliqué.
Il ne s’agit pas d’excuser ou de justifier quoi que ce soit. Il n’est pas question de dire que la pauvreté conduit automatiquement au trafic ou au vol, à ce qu’on appelle la délinquance (pour preuve, les très riches volent et tuent aussi pour s’enrichir encore plus).
Sortir des politiques menées depuis des décennies
Mais il y a de quoi réfléchir, de quoi traiter la question différemment. Pour nous c’est une évidence, la réponse de fond ce sont des solutions sociales, c’est un véritable plan d’urgence, des moyens mis prioritairement pour améliorer la vie dans les quartiers, améliorer les logements, défaire les concentrations d’habitations, développer des structures collectives, des lieux de vie, de culture, d’échange, il faut des moyens humains, des éducateurEs, des animateurEs, des services publics, il faut des écoles avec des classes pas surchargées (c’est loin d’être le cas aujourd’hui), il faut des petits commerces, relancer une activité sociale et économique. Il faut respecter les personnes, redonner de la dignité en créant les conditions de vie décentes.
Oui, on est loin des réponses simplistes des partisans du sécuritaire, du plus de policiers, de plus de prisons, de cet engrenage de répression et de violence. Même si de toute façon, on le reconnait, il y a bien un problème à gérer avec les réseaux mafieux et de trafiquants.
Mais encore une fois, dans l’immédiat, il s’agit bien de sortir des politiques menées depuis des décennies, celles qui mènent à la catastrophe sociale, il s’agit de tout inverser, de prioriser le besoins sociaux et collectifs. Comme les choix ne viennent pas d’en haut, ce sera aux populations de revendiquer, de se faire entendre et respecter, d’aller chercher, d’imposer que les richesses accaparées par les possédants reviennent à l’ensemble de la population. C’est pour cela que la révolte des quartiers populaires devient nécessaire, une prise de conscience collective pour sortir de l’écrasement, des engrenages d’appauvrissement et de violence.