Quelque part entre la finance, la politique et la révolution, revenons très rapidement sur la fameuse affaire des « emprunts russes ». Un exemple d’annulation de la dette qui montre la nécessité d’un rapport de forces… et d’un parti utile à sa construction.
Durant tout le 19e siècle et jusqu’à la veille de la Révolution d’Octobre, l’empire tsariste a émis de nombreux emprunts sur différentes places européennes. Mais avant les années 1880, la capacité de remboursement de l’État russe est plus que douteuse, tout comme l’utilisation des fonds essentiellement destinés aux conquêtes. Résultat, sa dette est la plus élevée d’Europe en 1886, et son budget le seul à ne pas être voté par un parlement élu.
Dette russe, profits massifs des banques et perte
Une nouvelle phase s’ouvre ensuite avec des emprunts de plus en plus massifs mais mieux orientés vers la modernisation de l’économie du pays. Dans ce cadre, la France mène une politique volontariste pendant plusieurs décennies dans le cadre d’un projet d’alliance stratégique et se retrouve le pays le plus exposé. Des sommes faramineuses sont investies et les banques font des profits massifs sur les emprunts russes.
Quand soudain... patatras ! Le 29 décembre 1917, le pouvoir révolutionnaire publie un décret répudiant toutes les dettes du défunt empire russe. Une saine décision frappée au coin du bon sens. Depuis quand notre camp social devrait-il être redevable des dettes contractées par des filous au profit d’autres filous et pour nous exploiter ? Les fameuses dettes « souveraines » ne sont telles que si le souverain en a décidé ainsi. Et ici, le souverain, c’est la classe des travailleurEs, pas le créancier capitaliste.
Une bataille d’un siècle
Cependant, les cours de ces emprunts ne chutent pas tout de suite car les créanciers espèrent un retour à la normale à court ou moyen terme. Après tout, la victoire des Rouges n’est pas garantie et d’autres pays pourraient être saignés à sa place dans le grand chambardement suivant la Première Guerre mondiale. Pourtant, une fois le pouvoir soviétique installé, cette affaire très symbolique de créances détenues par les vieilles puissances capitalistes sur la « patrie du socialisme » ne trouvera une résolution en trompe-l’œil qu’en 1997. L’accord franco-russe alors signé ne sera jamais vraiment mis en œuvre et celui-ci devait d’ailleurs plus profiter à l’État français qu’aux porteurs eux-mêmes. Ces derniers, dont on estime le nombre à environ 300 000, continueront de se battre sans succès en se rassemblant en associations. Finalement, les emprunts russes ont officiellement disparu de la bourse parisienne en 2007, et la Cour de cassation a considéré la justice française incompétente en 2019.
Qui est le souverain ?
La répudiation populaire d’une dette souveraine nécessite un rapport de forces social d’une extrême puissance. Il s’agit là d’un des leviers fondamentaux du pouvoir de classe au niveau national et international. Notre camp social devra pour cela prendre le pouvoir. La crise en Grèce en 2015 l’a bien montré, jusque dans l’échec. Redisons-le, contre toute la superstition dont peuvent se nourrir « la finance » et l’État : une dette n’est pas « souveraine » au sens où l’État émetteur ou ses créanciers seraient tout-puissants. Elle est souveraine parce qu’il est toujours possible de prendre la décision politique de l’annuler !
Investir dans le NPA
Pour sa part, et à sa modeste échelle, le NPA fait partie des investissements sûrs. Les dons que vous lui versez participent à l’organisation et au soutien des luttes de notre camp social. Ils vont à l’élaboration et à la mise en pratique collective d’un programme le plus juste possible pour notre classe.