Publié le Mercredi 3 janvier 2018 à 14h21.

2017 : le NPA en action

Retour sur une année marquée par une campagne électorale riche en émotions, mais aussi et surtout par un investissement au côté de celles et ceux qui refusent de se résigner face à un système de plus en plus injuste et barbare. 

Une année de luttes

La défaite face aux ordonnances Macron à la rentrée ne doit pas faire oublier que 2017 a été une année riche en mobilisations de tous ordres, pour la défense des emplois et des salaires, contre le démantèlement des services publics, contre la répression dans les quartiers populaires et contre le mouvement social, contre la chasse aux migrantEs, etc. Malgré sa taille modeste, le NPA a tenté d’être partie prenante de tous ces combats, en y apportant un soutien matériel et politique, en les relayant dans sa presse et lors des interventions médiatiques de ses porte-parole. Notre candidat Philippe Poutou a ainsi rendu visite à nombre de salariéEs en lutte, qu’il s’agisse de ceux de Goodyear et de PSA victimes de la répression, ou de ceux de Tati, de General Electric, d’Onet, d’Holiday Inn, de GM&S, de Médialys… mobilisés pour l’emploi et les conditions de travail. Des rencontres chaleureuses, des rassemblements parfois modestes mais déterminés, des invitations à intervenir dans nos meetings et réunions publiques : des liens ont été tissés et, si force est de constater que ces luttes sont très loin d’avoir été toujours victorieuses, elles ont participé du maintien d’un climat de contestation et d’un refus de la résignation qui sont des acquis précieux pour l’avenir, a fortiori si les leçons sont tirées de ces échecs comme des succès de certaines luttes exemplaires comme celle des salariéEs du nettoyage des gares du nord de l’Île-de-France en décembre. Exemplaires aussi furent certains combats, contre les violences policières ou les grands projets inutiles, en soutien aux migrantEs ou aux mal-logéEs, en solidarité avec les peuples palestinien et syrien, pour la liberté des prisonniers basques ou contre la répression en Catalogne, contre les violences faites aux femmes et en soutien aux droits des LGBTI, auxquels nous avons tenté, là encore d’apporter notre part.

Le NPA a en outre proposé, face aux contre-réformes ultra-libérales et répressives de Macron, une politique alliant refus des compromissions et unité la plus large. Dans ce domaine, le moins que l’on puisse dire est que les difficultés ont été immenses, la défaite de 2016 face à la loi travail version El Khomri continuant de peser dans les consciences et les organisations du mouvement ouvrier faisant preuve d’une réticence toute particulière à mobiliser dans des cadres unitaires. Entre un Jean-Luc Mélenchon et une France insoumise prétendant représenter à eux seuls l’opposition au gouvernement et un front syndical désuni et sautant à pieds joints dans le piège du « dialogue social », nos propositions n’ont eu que peu d’écho, et si des initiatives comme celles prises par le Front social ont connu des succès relatifs, elles n’ont pas permis de bousculer les rapports de forces. Là encore, des bilans doivent être tirés et, si nous ne prétendons pas avoir l’ensemble des réponses politiques et stratégiques face à au macronisme et à l’offensive tous azimuts du gouvernement, il est urgent que la gauche sociale et politique s’interroge sur ses échecs et reconnaisse que l’heure n’est ni à la division, ni à la stratégie perdante des journées d’action éloignées dans le temps et sectorielles, mais bien à jeter les bases de la construction d’un mouvement d’ensemble qui se fixe comme objectif de bloquer le pays, seul langage que peut comprendre la bourgeoisie, ainsi que l’a démontré la population de Guyane en mars-avril. 

Philippe Poutou candidat

2017 a bien évidemment été marquée par la campagne présidentielle, durant laquelle le NPA a tenté, là aussi, de jouer un rôle utile et de faire entendre un autre son de cloche que celui des formations de la gauche institutionnelle. La course aux 500 signatures, véritable verrou antidémocratique, a largement occupé les premiers mois de l’année et nous avons eu, jusqu’au dernier moment, des doutes : Philippe Poutou allait-il en être ? Les nouvelles règles de collecte des parrainages, avec publication « au fil de l’eau », par le Conseil constitutionnel, des listes des parrainEs et envoi direct par ces derniers des formulaires, ont compliqué une tâche qui s’était déjà avérée colossale pour une petite organisation comme la nôtre lors des précédents scrutins. Mais les efforts considérables, sur le terrain, des militantEs du NPA, et les initiatives médiatiques, notamment un appel signé, entre autres, par Annie Ernaux, François Ruffin, Daniel Mermet, Audrey Vernon, Patrick Chamoiseau et Christine Delphy, nous ont finalement permis d’atteindre l’objectif des 500. 

Une fois ce verrou levé, notre campagne politique a pu réellement prendre son envol, avec des dizaines de réunions publiques et de meetings, dont l’affluence n’a cessé de grandir au cours des mois de février, mars et avril, et des passages remarqués de Philippe Poutou dans les médias, malgré là encore une réforme de la répartition du temps de parole défavorable aux « petits » candidats. L’un de ces passages médias a constitué, avant même le dépôt des signatures, un petit tournant en raison du « buzz » qu’il a engendré : l’émission « On n’est pas couché » du 25 février, au cours de laquelle un désormais célèbre fou rire de la journaliste Vanessa Burgraff a exprimé, devant des millions de téléspectateurEs, le mépris social et l’arrogance d’une petite caste déniant la légitimité d’une candidature ouvrière. 

Mais c’est bien évidemment le « grand débat » du 4 avril, diffusé sur BFM-TV et C-News, qui a donné un écho inédit à la campagne du NPA et à son candidat Philippe Poutou. Au-delà des « punchlines » de Philippe, c’est bien la justesse de ses propos, son impertinence face aux puissants et son refus de respecter les conventions feutrées des débats entre politiciens professionnels qui permettent de comprendre le succès de ses interventions. Des vidéos visionnées des millions de fois, des milliers de messages de soutien et d’encouragement, une popularité qui pouvait se vérifier à chacun de ses déplacements : le « candidat ouvrier » a parlé à des millions de personnes qui, si elles n’ont pas toutes, loin de là, voté pour lui, se sont reconnues dans une posture et des propos qui, comme nous l’ont dit des centaines d’entre elles, ont redonné une dignité à la parole des classes populaires. 

Tel est l’un des principaux bilans que nous tirons de cette campagne : si les près de 400 000 voix finalement obtenues ont pu susciter une certaine déception parmi celles et ceux qui s’étaient enthousiasmés pour la candidature de Philippe, ce score modeste est essentiellement dû à la pression du « vote utile » pour Jean-Luc Mélenchon et n’invalide pas les choix qui ont été les nôtres, qu’il s’agisse du choix du candidat ou du choix des thèmes d’une campagne centrée sur un programme d’urgence sociale, avec en outre certains thèmes à contre-courant dans la gauche, comme la lutte contre les violences policières, l’opposition aux expéditions militaires françaises ou la défense de la liberté de circulation et d’installation. 

Un outil politique

Conscients de nos limites et de nos faiblesses, nous savons que le NPA est loin d’avoir rempli les objectifs qu’il s’était fixés lors de sa fondation. Nous avons connu des crises internes, une importante baisse des effectifs militants, et nous ne pesons pas, loin de là, autant que nous le voudrions. Mais l’écho de la campagne présidentielle, l’affluence dans les meetings de fin de campagne, ainsi que la sympathie que rencontrent le NPA et ses militantEs auprès des secteurs en lutte, tendent à démontrer que nous continuons d’être considérés comme utiles, en étant parfois même la seule force politique nationale à apporter notre soutien plein et entier à certains combats délaissés par la gauche institutionnelle, quand elle n’a pas tout simplement fait siennes les positions de la droite. On pense ici notamment aux luttes en soutien aux migrantEs ou face à l’impunité des crimes policiers, qui ne sont pourtant pas des suppléments d’âme mais partie intégrante du combat contre un système de plus en plus autoritaire et barbare. 

2018 sera pour le NPA une année de congrès, durant lequel nous tirerons collectivement les bilans de ces dernières années, et au terme duquel nous adopterons une orientation et élirons une direction pour la mettre en pratique. Nous demeurons en effet convaincus que rien ne saurait remplacer un parti politique, lieu de centralisation des expériences, de confrontation respectueuse des points de vue, d’élaboration démocratique d’une politique tenant compte des leçons du passé, ainsi que nous nous en sommes souvenus en 2017 à l’occasion du centenaire de la révolution russe, mais adaptée à son temps. Alors que certains annoncent la mort des partis, force est en effet de constater que les modèles alernatifs proposés, qu’ils soient « gazeux » ou non, empruntent des voies qui ne sont pas celles, c’est le moins que l’on puisse dire, de l’implication réelle du plus grand nombre, de l’élaboration collective et de la lutte contre les « dangers professionnels du pouvoir ». 

Ainsi, si nous ne faisons preuve d’aucun fétichisme organisationnel, nous n’entendons pas renoncer à regrouper, dans un cadre ouvert mais refusant toute compromission, toutes celles et tous ceux qui veulent agir pour en finir avec ce monde injuste et violent. Car rien ne pourra remplacer l’action collective et concertée de celles et ceux qui ne veulent pas céder à la résignation et qui refusent de confier leur sort à des politiciens professionnels, dont les agendas personnels finissent immanquablement par prendre le pas sur les intérêts de celles et ceux qu’ils prétendent représenter. Faire entendre une autre voix, apporter un soutien et donner un écho aux luttes, contribuer à construire un rapport de forces contre le capital et son personnel politique, nous représenter nous-mêmes : tel a été l’objectif que nous nous sommes fixés et que nous avons tenté, au cours de cette année 2017, de remplir. 

Si l’année qui s’ouvre est imprévisible, il est certain que nous continuerons de porter la perspective d’un autre monde possible, et nécessaire, et nous invitons à nous rejoindre toutes celles et tous ceux qui se reconnaissent dans un tel combat, qui ne se résume pas à une attente du grand soir mais à la construction, ici et maintenant, des luttes qui posent les jalons d’une autre société, débarrassée des oppressions et de l’exploitation. 

Philippe Poutou et Julien Salingue