La réouverture « progressive » des écoles du 11 mai au 22 juin a permis toutes les audaces. Celles d’une école « à la carte » qui rompt avec le principe d’une école obligatoire et donc commune à toutes et tous. Cela ouvre aussi une porte dangereuse, en permettant à l’institution de choisir les élèves qu’elle scolarise.
« Principe de réalité » ?
Dans l’académie de Créteil, le recteur Auverlot a donné des directives aux principaux de collèges pour que soient accueillis, en priorité, « les garçons décrocheurs ». Les syndicats se sont scandalisés ; le recteur a assumé. Au nom, a-t-il dit, du principe de réalité : les garçons sont plus nombreux que les filles à être sanctionnés à l’école, ils sont en souffrance, il faut les aider davantage.
Un raisonnement curieux qui n’est pas sans rappeler la petite musique du « sexisme inversé ». Et qui, comme lui, est une pure invention. Car ce que soulignent les enquêtes sociologiques, c’est bien un écart d’attention, d’individualisation, accordé par l’institution scolaire aux garçons. Ce qui, à terme, leur bénéficie. Si le recteur avait un peu plus lu les sciences sociales, il aurait donc su que loin d’avantager les filles, le système scolaire contribue, comme le reste de la société, à reproduire les systèmes d’oppression comme le sexisme.
Cette fâcheuse inversion des priorités montre donc à la fois que l’institution scolaire est loin d’en avoir fini avec l’idéologie conservatrice, mais aussi qu’elle attache plus d’importance à son rôle de « canalisateur » des jeunes garçons les plus visiblement turbulents, qu’à la lutte pour l’émancipation de toutes et tous. Encore un sujet où on ne pourra donc compter que sur nous-mêmes !