En même temps qu’émerge une nouvelle génération féministe, nous lui découvrons ses nouveaux détracteurs...
De la droite extrême à des franges dites plus modérées, ceux-ci cherchent à ridiculiser, combattre, voire anéantir, toutes les avancées conquises par les femmes, et vécues par eux comme un camouflet et une atteinte à la supériorité masculine.
Une pensée d’extrême droite réactualisée
De ce côté-ci de l’échiquier politique, rien de surprenant. Du sexisme ordinaire aux envolées les plus virulentes, on a tout vu, tout entendu pour la défense de la famille et de la femme française, le tout teinté d’un pétainisme toujours sous-jacent.
Le lobbying de La Manif pour tous a gagné les Républicains, désormais obligés de tenir compte de cette partie de son électorat dans la rédaction du programme présidentiel (retour sur le mariage homo, refus de l’adoption, etc.). On apprécie chez LR la répartition genrée des taches, et on l’assume : rappelez-vous du grandiose lancement de campagne de Valérie Pécresse aux régionales, « Rien de tel qu’une femme pour faire le ménage ! ». Le pire est que cela puisse influencer y compris le PS, avec la récente création d’un ministère de la Famille, de l’Enfance et des Droits des femmes, ce qui en dit long sur la vision rétrograde de la place des femmes.
Au-delà des discours, les mesures du Front national seraient un grave recul si elles étaient mises en place : l’arrêt des subventions au Planning familial prôné par Marine Le Pen aux régionales, par exemple, ou le retrait des femmes du marché du travail sous couvert de mise en place du salaire maternel. Les récents événements de Cologne ont montré comment ces partis étaient prêts sous couvert d’un féminisme qu’ils n’ont jamais porté à justifier leur discours raciste et anti-immigrés.
Haro sur les féministes !
Être antiféministe, pour le retour à la « complémentarité » des sexes, c’est un peu en ce moment le summum de la branchitude... En témoignent quelques affaires récentes.
Le chanteur Orelsan d’abord, poursuivi pour 9 de ses chansons dont le célèbre « Ferme ta gueule ou tu vas te faire marie-trintigner » ou « Renseigne-toi sur les pansements et les poussettes, j’peux t’faire un enfant et t’casser le nez sur un coup de tête ». Il a finalement été relaxé en appel pour diffamation, injures et provocation à la haine ou à la violence en raison du sexe, la cour d’appel ayant jugé qu’« il serait attentatoire à la liberté de création que de vouloir interdire ces formes d’expressions », qu’elles reflétaient le « malaise d’une génération sans repère, notamment dans les relations hommes-femmes »... S’assumer sexiste et violent, ce serait donc être le reflet d’une époque...
En plus trash, on a Daryush Valizadeh (alias Roosh V) qui anime le blog « le Retour des rois » (tout un programme en soi !) où il développe toute un rhétorique néomasculiniste. Il a tenté d’organiser un peu partout dans le monde des rassemblements le 6 février dernier pour défendre sa philosophie, qui cherche notamment à renvoyer les femmes à leurs caractères « naturels » que sont la beauté, la fertilité, ainsi qu’à leur espace, la sphère privée. Dans l’un de ses billets, il expliquait en février 2015 que, pour stopper le viol, il suffisait de le légaliser dans la sphère privée. Bah oui, c’est aussi simple que ça, et ainsi « une jeune fille protégera son corps de la même manière qu’elle protège son sac et son smartphone » (sic !)
Dans la même veine, le youtubeur Julien Blanc en Australie ou Rémi Gaillard en France ont fait parlé d’eux en réalisant des vidéos supposées drôles où ils miment des agressions sexuelles sur des femmes dans la rue ou à la plage. Et bien sûr dans les deux cas, ce sont les féministes qui voient le mal partout et manquent d’humour...
Il ne s’agit pas seulement d’anecdotes ou de simples individus un peu fêlés, mais d’un phénomène plus profond, d’un soubresaut d’une partie de la société, dont ses franges les plus conservatrices ont du mal à accepter la nouvelle place occupée par les femmes dans la société et cherchent par tous les moyens à nous renvoyer à nos marmots et à nos casseroles.
Hélène Pierre