Dès 7 heures le samedi 17 novembre 2018 des centaines de personnes vêtues de la — désormais — célèbre chasuble jaune bloquaient différents ronds-points menant à des centres commerciaux, à plusieurs endroits de Besançon. Dont les deux principaux : Valentin et Chalezeule.
«Il y a de tout ici, des vieux, des jeunes, de toutes les couches sociales. Nous sommes apolitiques et pacifistes » déclarait un jeune homme au mégaphone. Comme partout dans le pays, c’est par les réseaux sociaux que les manifestantEs s’étaient donné rendez-vous. La consigne était de bloquer dans le calme et de laisser passer les ambulances, les infirmières. « On n’empêche personne d’aller travailler, simplement on leur explique la situation. Aujourd’hui on a un mouvement pour dénoncer toutes les taxes, tout ce qu’on subit tous les jours. Au final, on ne peut plus rien s’acheter derrière ». Les revendications s’étendent à la « dénonciation de la privatisation des services publics, la fraude fiscale, l’empoisonnement et la pollution de nos sols et de nos aliments ou encore une démocratie annihilée par un pouvoir autoritaire et moqueur ». Tout était dit dès le premier jour !
Pas une seule manifestation déclarée
Dès ce moment les occupations des principaux ronds-points de la ville se sont généralisées. Les manifestations également ; c’est un ainsi que chaque samedi durant près de deux ans des milliers de personnes en gilets jaunes ont défilé sans jamais déclarer une seule manifestation, sans jamais faire connaître le parcours à l’avance. Ces manifestantEs dont bon nombre portaient des drapeaux français n’avaient pour la plupart jamais manifesté de leur vie. Les slogans devenus fameux fusaient : « On est là..., Emmanuel Macron, oh tête de c... on vient te chercher chez toi... ». Les prises de parole avant chaque manifestation étaient systématiques.
La répression n’a pas tardé dans cette ville moyenne si tranquille d’ordinaire avec ses traditionnelles manifestations syndicales.
De samedi en samedi, on a vu les CRS et autres gendarmes revêtir leur casque et leur costume de robocops et taper sur tout ce qui bougeait en fin de manif sans aucune sommation. Devant la préfecture, lors de la seconde manifestation, les gazages massifs et indiscriminés ont commencé et n’ont jamais cessé pendant deux ans. On a vu des personnes âgées faire des malaises, des manifestantEs clamant « la police avec nous » se faire défoncer le crâne quelques minutes plus tard.
Répression et solidarité
Lors d’une des nombreuses manifestations du samedi, Charles Piaget, qui vient de nous quitter, fut gazé comme les autres et exfiltré précipitamment !
Les street médics ont fait leur apparition avec ce qu’il fallait de sérum physiologique et de Maalox, et surtout de réconfort.
Les gardes à vue, les peines de prisons fermes ou avec sursis, les amendes ont commencé à tomber pour un caillou ou un pétard lancé en direction des forces de répression... Voire sans aucune raison ! Les blesséEs sont apparuEs dont certainEs gravement. En particulier lorsqu’ils et elles allaient manifester à Paris. AccueilliEs, au CHU de Besançon, par le personnel paramédical revêtu de sacs poubelles jaunes en signe de solidarité.
C’est à Besançon qu’un Gilet jaune, syndicaliste par ailleurs, a été pris en charge par Amnesty International, tellement l’État s’est acharné sur lui et sa famille : il a cumulé 150 heures de garde à vue en deux ans, une perquisition avec la saisie de ses ordinateurs, caméra, téléphone, le tout non-récupérés à ce jour. Ce militant cumule également des dizaines d’amendes sous tous les prétextes pour une somme totale de 5 233 euros (rappelons qu’il est ouvrier). Toutes sont contestées et certaines ont été annulées. Il a eu de nombreux procès, la plupart l’innocentant, là aussi sous tous les prétextes.
Loin de se décourager, il occupe toujours depuis cinq ans un rond-point de Besançon chaque samedi matin durant deux heures avec jusqu’à trente autres Gilets jaunes. La colère couve toujours !