Même d’après le journal les Échos (du 13 novembre 2013), « la création d’un service minimum de complémentaire santé est de fait une machine de guerre contre la Sécurité sociale puisqu’elle officialise le fait que le système de solidarité nationale n’a pas vocation à prendre en charge la totalité des dépenses de santé »...
Trois à quatre millions de salariés devront résilier leur contrat individuel avant le 1er janvier pour adhérer au contrat collectif, un vaste « marché » très convoité.
Les assureurs à l’affût
Le Conseil constitutionnel a entendu les assureurs et a censuré les clauses de désignation des organismes complémentaires d’entreprise. Les réunions paritaires des branches professionnelles désignaient les institutions de prévoyance déjà très implantées. Le choix réalisé au niveau des entreprises favorise maintenant les assurances. Les banques, dont sont dépendantes beaucoup de petites entreprises, proposent des prix d’appel très bas pour s’accaparer une part « du marché » et proposer aux salariés des sur-complémentaires beaucoup plus onéreuses et totalement à leur charge.
Toujours des exclus
Les fonctionnaires, les travailleurs indépendants, les chômeurs sans allocation ou après un an d’indemnisation, les personnes hors marché du travail, les jeunes et étudiantEs, ont été « oubliés » dans la loi. Les précaires qui ne connaissent pas leurs droits ou ne peuvent les faire valoir, et beaucoup de personnes qui ont des bas revenus mais dépassent les plafonds ouvrant les droit à la CMU ou à l’AMC, n’auront toujours pas accès à tout ou partie des soins.
Des inégalités maintenues
Dans 10 % d’entreprises, la plupart employant moins de 10 salariéEs, il n’y a pas de protection sociale complémentaire collective. Il devrait être mis fin à cette situation au 1er janvier, mais la loi ne comporte pas de dispositif contraignant. Au mieux, les prestations seront limitées au panier de soins prévu dans la loi, avec des garanties faibles concernant les frais d’optique, de prothèses auditives et dentaires. Pour une couverture complémentaire convenable, il faut donc pouvoir s’offrir une sur-complémentaires.
Des dépassements d’honoraires plus ou moins remboursés
Dans le cadre des contrats d’entreprise dits responsables (95 % d’entre eux), le ticket modérateur est intégralement remboursé et le forfait hospitalier pris en charge sans limitation de durée. Mais le remboursement des dépassements d’honoraires (au total 2,46 milliards en 2014) est réduit si le médecin consulté ne s’est pas engagé à limiter les dépassements tarifaires en signant « un contrat d’accès aux soins », cela en échange d’exonération de ses cotisation sociales (en moyenne 5 500 euros par praticien). Des patients auront alors la mauvaise surprise de constater le faible montant du remboursement.
Les salariés taxés, les employeurs exonérés
La part patronale de la cotisation à la complémentaire collective n’est désormais plus considérée comme un avantage en nature pour les salariéEs, mais comme un avantage en argent s’ajoutant à la rémunération imposable. La part salariale reste déductible du revenu imposable mais avec un plafond de déduction diminué. L’augmentation de l’impôt sur le revenu est évaluée à un montant de 90 à 150 euros. Une part du pouvoir d’achat gagné par le salariéE avec la prise en charge par l’employeur de 50 % de la cotisation sera absorbé par ce supplément d’impôt. Par contre, la part de l’employeur est déductible de son bénéfice imposable, et il obtient une nouvelle exonération des cotisations sociales à hauteur de 6 % du plafond annuel de la Sécurité sociale...