Publié le Samedi 12 novembre 2022 à 18h00.

Contributions des plateformes pour le 5e congrès du NPA

Plateforme A : Ni marasme ni scission, un congrès pour la refondation !

Depuis notre dernier congrès, la situation de crise globale de la rentabilité du capital s’est accentuée, entraînant une aggravation des différentes crises économiques, politiques, sanitaires et climatiques. L’inflation, l’accélération des contre-réformes, le développement de la conscience féministe, antiraciste ou écologique suscitent des résistances et des luttes éparpillées.

Mais la crise du mouvement ouvrier organisé crée aussi une faiblesse structurelle que l’on peine à dépasser et empêche d’unifier les mobilisations. La nécessité de faire le lien entre le mouvement ouvrier non-organisé et organisé, la centralité de la grève, l’auto-organisation, sont autant d’éléments qui nécessitent d’être développés dans un contexte où la stratégie des directions syndicales contribue souvent au découragement.

Pour y faire face, nous devons bien sûr construire le front unique, l’unité de la base au sommet des organisations du mouvement social autour de revendications unifiantes, et ce qui doit nous guider, c’est le fond politique des appels qu’on signe, ainsi que la politique qu’on y déploie. Nous ne devons pas hésiter, si nécessaire, à interpeller les directions bureaucratiques réformistes et à critiquer publiquement leur passivité, leur absence de plan de bataille ou leur politique de défaites. Car, si le front unique permet d’unifier la classe, il sert aussi à démontrer les limites du réformisme à une large échelle. Dans la même logique, il y a également une urgence à reconstruire des cadres unitaires antifascistes pour répondre à la montée de l’extrême droite, sécuriser les initiatives et les locaux militants.

Mais si nous devons prendre notre part à la reconstruction du mouvement ouvrier, notre apport central est stratégique et programmatique, car ce n’est pas notre seule implication volontariste de « bons constructeurs de l’unité » qui fera la différence. Pour être capables de construire le front unique, nous devons construire notre courant sans nous excuser d’être révolutionnaires. Ainsi, nous disputerons la direction des mouvements aux réformistes en proposant et en défendant notre orientation largement. C’est ce que nous appelons la refondation révolutionnaire du NPA.

Pour cela, il faut d’abord acter que le NPA n’est plus un parti large, occupant l’espace à gauche du social-libéralisme, mais un parti révolutionnaire. Cela va de pair avec la construction de notre implantation sur les lieux de travail — et en particulier dans des secteurs féminisés et racisés comme le nettoyage, le soin, la santé —, sur les lieux d’études, mais aussi dans les quartiers populaires. S’implanter, c’est enfin prendre notre part dans la (re)construction ou le développement des collectifs écologistes, féministes, antiracistes, LGBTI.

La refondation révolutionnaire du NPA, c’est aussi reprendre le travail d’élaboration programmatique. Ne nous contentons plus d’un simple programme d’urgence comme aujourd’hui, mais popularisons un véritable programme de transition communiste, crédible et désirable, qui articule notre stratégie à des mesures concrètes de rupture avec le capitalisme. C’est le seul moyen de faire progresser nos idées et de montrer ainsi notre utilité face aux illusions réformistes et parlementaristes. Nous proposons par exemple des pistes sur le moyen de passer d’une économie capitaliste à une économie planifiée, en parlant d’extension du champ de la sécurité sociale. Nous défendons aussi la rupture anticapitaliste avec l’UE du capital ; une écologie anti-productiviste qui assume que décroissent certains secteurs de l’économie ; une vision du capitalisme comme un système intrinsèquement de classe, de genre et de race en faisant des propositions stratégiques autour du travail reproductif, comme la grève du travail reproductif ou sa socialisation.

Nous proposons donc que le congrès décide la réécriture de nos textes fondateurs et de nos statuts, et la rédaction d’un manifeste programmatique coordonné par une commission élue par le premier CPN après le congrès, comprenant des membres de la direction et des différentes commissions.

Enfin, parce que les questions de fonctionnement et de méthodes sont des questions politiques, nous défendons un parti au fonctionnement renouvelé où il fait bon militer. Nous ne voulons ni d’un front de tendances sans aucun centralisme démocratique, ni faire perdurer les restes d’un parti large dans une routine d’appareil, et encore moins dans un parti sans droit de tendance.

Nous voulons donc un NPA révolutionnaire, inclusif et démocratique, qui refuse aussi bien les coups de pression virilistes que les manœuvres et les procès d’intention, avec des droits et des devoirs pour l’ensemble des courants. Si nous ne souhaitons pas fermer les sites des courants, nous souhaitons qu’ils priorisent la presse et le site « officiels », en proposant d’abord leurs articles à ces organes. En contrepartie, ils doivent pouvoir disposer de tribunes régulières dans ceux-ci, et de leurs propres onglets sur le site, qu’ils seraient libres d’alimenter comme ils l’entendent. Ces conditions remplies, les courants devraient revoir leur politique éditoriale pour mieux l’articuler à celle du parti, en s’intégrant aux comités de rédaction chargés de l’hebdo, de la revue et du site. De la même manière, l’ensemble des structures du parti (groupe de travail, commissions…) doivent être réellement ouvertes aux camarades de chaque sensibilité qui doivent en retour y participer activement selon leurs forces.

Enfin, le parti dont nous avons besoin doit appliquer la rotation des mandats, et remettre les comités au centre du jeu, notamment par l’organisation annuelle des réunions nationales des comités, au lieu de les concevoir comme de simples exécutants. Ce sont eux qui ont porté la campagne #Poutou2022 et qui déclinent au quotidien la ligne nationale sur le terrain. Ils doivent avoir leur mot à dire.

 

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Plateforme B : Unitaire et révolutionnaire, un NPA utile face aux ravages du capitalisme

Une période d’instabilité, de difficultés et de résistances

Le congrès du NPA se déroule dans une période d’instabilité généralisée : aggravation des crises écologiques, guerre impérialiste en Ukraine, montée du racisme, de l’extrême droite et du danger fasciste sont la mesure des dangers qui menacent l’humanité. Nous sommes plus que jamais devant le choix « éco­socialisme ou barbarie ».

Face à cela, des points d’appui émergent, malgré leurs contradictions : explosions de colère systémiques régulières dans le monde, mouvements de masse contre les oppressions, notamment la vague féministe mondiale, mobilisations massives pour le climat, luttes sociales d’ampleur, éléments de reconstruction d’une gauche antilibérale marginalisant les gauches libérales qui ont géré loyalement le capitalisme.

Les enjeux de ce congrès sont de positionner le NPA pour qu’il puisse intervenir dans la nouvelle situation, contribuer à la mobilisation du prolétariat dans sa diversité, à son unité dans la lutte pour une autre société, tout en travaillant à construire une force pour le renversement du capitalisme et la transformation révolutionnaire de la société.

La révolution est nécessaire, mais pas de raccourci

Seule la rupture avec le capitalisme est réaliste : avec ses modes de production et de consommation productivistes, avec ses institutions étatiques, avec la propriété privée des moyens de production. Détruire l’État bourgeois, construire une société de transition basée sur l’auto-organisation, vers une société sans classes et sans État, va de pair avec la socialisation de toutes les sphères de l’économie, et la bataille contre toutes les oppressions.

En ce sens, la révolution est objectivement à l’ordre du jour. Mais aujourd’hui, les classes travailleuses sont disloquées, le prolétariat en pleine reconfiguration sur le plan social, sous les coups des crises comme des offensives pour maintenir les taux de profit. Le développement de l’extrême droite et de ses idées, l’aggravation des politiques discriminatoires et autoritaires sont un obstacle majeur à l’organisation des classes populaires et à la défense de leurs intérêts.

La nécessité de faire le pont entre l’actualité objective de la révolution et la situation subjective dicte les conditions de notre activité politique. Elle impose de combiner la bataille pour l’unité, pour des fronts unis, politiques et sociaux, avec une démarche transitoire, un programme comportant un ensemble de propositions qui tracent une réponse anticapitaliste globale.

La plateforme B dans le prolongement de la campagne Poutou

Ces orientations ont été au cœur de la campagne Poutou, articulées à la perspective de la reconstruction des outils d’organisation et de défense de notre classe, y compris sur le plan politique. La campagne a également permis de défendre à une large échelle la nécessité de la rupture avec le capitalisme, pour construire une autre société débarrassée des oppressions et de l’exploitation. Nous avons ainsi eu l’oreille de millions de personnes, notamment dans la jeunesse, organisé des meetings parfois massifs et recruté à notre organisation.

Contrairement à celle de la PFC, qui est la promesse d’un rétrécissement de notre surface et de notre audience au nom d’une auto-affirmation « révolutionnaire », la politique que nous proposons s’inscrit dans l’exact prolongement de celle qui a fait le succès de la campagne présidentielle. On notera d’ailleurs que les camarades de la PFC étaient en désaccord avec cette campagne, concernant tant le choix du candidat que les orientations, même s’ils font mine aujourd’hui de s’en revendiquer. Jusqu’à défendre cette idée absurde selon laquelle celles et ceux qui ont rendu possible et largement animé la campagne #Poutou2022 — y compris le candidat lui-même ! — auraient pour objectif de liquider les acquis de ladite campagne.

Un parti indépendant et ouvert

Nous défendons un NPA indépendant, révolutionnaire et ouvert, qui ne se contente pas de formules sur la nécessité de « regrouper les révolutionnaires », mais qui est attentif aux mobilisations et aux débats dans la société. Un NPA capable d’être moteur dans la construction des mouvements de lutte, sur les lieux de travail, écologistes, antiracistes, féministes, internationalistes, LGBTI, contre l’extrême droite, contre les violences policières, etc., en respectant leur démocratie interne et leur dynamique propre. Il s’agit également de convaincre, dans ces mobilisations, du bien-fondé de nos mots d’ordre, de nos stratégies, et de pousser à l’articulation de ces mouvements en vue d’un mouvement d’ensemble de notre classe.

Notre parti doit en outre être capable de « faire de la politique », autrement dit d’intervenir sur le champ politique, dans les débats qui agitent et traversent notre camp social, et de poser la perspective, au-delà du développement des mobilisations, de la construction d’un outil politique pour la rupture avec le capitalisme et la transformation révolutionnaire de la société.

Un parti, pas un front de fractions

Un parti utile à ses militantEs et à la classe des exploitéEs doit être un intellectuel collectif capable de développer des analyses et de construire des interventions en phase avec les dynamiques réelles de la lutte de classe. Nous avons besoin d’un outil politique capable d’élaborer, de réfléchir librement. Nous avons besoin de souplesse tactique, d’expérimentation, mais aussi de mise en commun de nos expériences pour en tirer collectivement les enseignements. Ce qui n’est pas le cas dans le NPA aujourd’hui.

Nous devons en effet prendre acte que l’existence de fractions permanentes est en réalité la juxtaposition d’organisations distinctes porteuses de projets politiques différents, voire contradictoires, et constitue un obstacle à la construction d’un véritable parti. Les fractions ont jusqu’à présent opposé un refus à toute discussion sur le rétablissement d’un fonctionnement collectif et donc sur la sortie du régime de la « concurrence libre et non faussée » au sein du NPA. Dont acte. Nous n’avons pour notre part pas renoncé à construire un NPA indépendant, révolutionnaire et ouvert, dans lequel chacunE construit le parti et ses outils sans donner la priorité à la construction de sa fraction, et invitons toutes celles et tous ceux qui partagent ce projet politique et organisationnel à voter pour la PFB lors du congrès.

 

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Plateforme C : « Actualité et urgence de la révolution » : pour refuser l’éclatement du NPA

Le capitalisme est responsable de toutes les crises qui menacent l’humanité et la planète. Celles-ci se combinent dans une fuite en avant destructrice pour les êtres humains et les écosystèmes. Surexploitation, précarisation, appauvrissement accéléré, guerres sans fin, durcissements autoritaires, voilà la réalité subie par l’immense majorité de la population, alors que le potentiel pour libérer l’ensemble de l’humanité de la faim et du besoin existe. La guerre menée par l’impérialisme russe en Ukraine illustre une nouvelle fois que le capitalisme porte en lui la guerre comme la nuée porte l’orage. Nous dénonçons la responsabilité de Poutine, exigeons le départ des troupes russes d’Ukraine, affirmons le droit du peuple ukrainien à disposer de son sort et notre soutien à ceux qui se battent contre cette guerre en Russie même. Sans oublier de dénoncer la politique de notre propre gouvernement et de ceux de toutes les puissances occidentales qui en profitent pour avancer leurs pions, notamment avec l’extension du déploiement des troupes de l’OTAN. Les intérêts impérialistes rivaux risquent de faire basculer le monde dans un conflit plus général. Il faut en finir avec le capitalisme pour en finir avec la guerre !

Le prolétariat n’est pas sans réagir, avec des vagues inédites de contestation sociales de grande échelle depuis une décennie : printemps arabe en 2011, révoltes urbaines en 2019 dans de nombreux pays d’Afrique, d’Asie et d’Amérique latine, mouvements de masse contre le racisme et les violences policières, mobilisations féministes, pour l’urgence climatique, révolte agraire en Inde, soulèvements révolutionnaires cet été au Sri Lanka, aujourd’hui en Iran… Ce n’est pas l’énergie contestatrice ni révolutionnaire des masses qui fait défaut. Par contre, il manque des partis révolutionnaires capables de disputer la direction politique de ces mouvements d’émancipation aux partis bourgeois et/ou aux bureaucraties syndicales et de pousser à la constitution d’organes de double pouvoir. Il serait vital que les groupes révolutionnaires qui ont un minimum d’implantation puissent se saisir des opportunités offertes par les situations d’embrasement social et travaillent à l’émergence d’un pôle des révolutionnaires en renforçant leurs liens à l’échelle internationale.

En France, le patronat continue à taper dur et le gouvernement Macron annonce une nouvelle attaque majeure contre le système de retraites. La colère sociale se manifeste aujourd’hui contre les ravages de l’inflation, mais plus fondamentalement contre les classes dominantes incapables de faire tourner correctement la société. La situation politique et sociale est instable, elle peut devenir explosive, mais il ne faut pas oublier que l’extrême droite est en embuscade, prête à gouverner comme dans d’autres pays dans l’intérêt des classes dominantes. Une course de vitesse est engagée : en finir avec l’extrême droite nécessitera de renverser ce système. Mais cela ne nous exonère pas de lutter pied à pied contre son influence idéologique, notamment au sein de notre camp social et de nous préparer à des situations d’affrontement avec elle. Nous participons à tous les cadres unitaires qui concourent à cet objectif mais sans illusions sur la capacité des partis de la gauche institutionnelle à « faire rempart » : au contraire, les politiques contre les classes populaires qu’ils ont menées dans des gouvernements de ces dernières décennies ont écœuré des travailleurs et les ont poussés à se tourner vers les démagogues d’extrême droite. Les révolutionnaires doivent donc garder toute leur indépendance politique vis-à-vis de la gauche.

D’une manière générale, la nécessité de développer nos perspectives révolutionnaires, qui sont à l’opposé des impasses institutionnelles représentées aujourd’hui par la NUPES et la FI implique que nous sachions « frapper ensemble » sur toutes les questions qui permettent à notre camp de se mettre en mouvement mais toujours « marcher séparément ». C’est pour cela qu’il était indispensable que le NPA présente un candidat indépendant à la présidentielle et que l’appel au vote pour la NUPES aux législatives quelques semaines plus tard a été une grave erreur de la part d’une majorité de sa direction. Cela a contribué à brouiller de nouveau les lignes qui nous séparent des organisations qui ne sont pas révolutionnaires. Vouloir construire en même temps « un outil révolutionnaire » et une « gauche de combat », comme le proposent les camarades du regroupement des « 3 et 4 octobre » à l’initiative de la plateforme B, participe du même brouillage.

Il faut à l’inverse renforcer le camp des révolutionnaires et avancer vers la construction d’un parti doté d’une stratégie tournée vers le renversement du capitalisme, avec une implantation dans la jeunesse et le monde du travail. Nous ne sommes pas isolés d’un milieu jeune qui se politise et cherche du côté des révolutionnaires. Cela veut dire bien évidemment d’abord préserver le NPA, un acquis pour notre camp. Le chantage entre « dissolution des courants, des tendances et des fractions » et « séparation à l’amiable » est inacceptable. Il faut persévérer dans le militantisme au sein de ce même parti, qui a su rassembler des révolutionnaires de traditions différentes et recruter une nouvelle génération militante. L’amélioration de son fonctionnement sera l’affaire de l’ensemble de ses membres avec la perspective d’en faire un véritable outil pour notre classe dans sa quête d’émancipation. Aucune mesure administrative ne pourra remplacer le débat démocratique, qui devrait au contraire s’appuyer sur la confrontation de nos pratiques et de nos points de vue mais surtout sur la centralisation de nos implantations et de nos interventions.

Armelle, Aurélien, Gaël, Marie-Hélène, Zara