La condamnation et l’emprisonnement de Lula, le 7 avril 2018, au mépris des règles de droit, ont été déterminants dans l’arrivée de Jair Bolsonaro au Palais présidentiel. La décision d’annuler les condamnations pour corruption, qui doit être confirmée en séance plénière du Tribunal suprême fédéral, a produit un bouleversement sur l’échiquier politique, car elle remet Lula sur le devant de la scène.
En 2018, malgré l’offensive réactionnaire, Lula était en tête dans les sondages pour la course à la présidence. Son emprisonnement, précédé et accompagné d’une campagne médiatique brutale et frénétique visant à criminaliser le Parti des travailleurs (PT) et la gauche dans son ensemble, a ouvert la porte à la montée en puissance de la candidature de Jair Bolsonaro. Au second tour des élections, l’ambiance créée par le Lava Jato [opération contre la corruption menée par la police fédérale et lancée en mars 2014, qui a mené à la condamnation de Lula] et la position de la bourgeoisie brésilienne permettent au capitaine fasciste d’être élu. Le juge qui avait condamné Lula lors d’un procès truqué est devenu le ministre de la Justice de Bolsonaro : il s’agit de Sergio Moro.
Soutien critique
Notre position contre les condamnations de Lula et pour la restitution de ses droits politiques découle d’un jugement étayé – confirmé par les preuves matérielles révélées par les échanges criminels entre Moro et les procureurs sur l’application Telegram – que le Lava Jato a toujours servi l’offensive réactionnaire de la classe dominante et de l’impérialisme étatsunien contre les masses laborieuses et la gauche brésilienne.
Cet avis n’efface pas les critiques de gauche qui doivent être faites à l’égard de Lula et du PT. L’option de former des gouvernements en alliance avec des secteurs de la bourgeoisie a fait des ravages, préservant un régime politique corrompu, contrôlé par la droite et excluant la capacité des mobilisations populaires de s’exprimer sur le plan politique. Le programme social-libéral appliqué par les gouvernements du PT, qui consistait à garantir des profits élevés aux grands capitalistes avec quelques concessions aux travailleurEs, sans réformes fondamentales, a maintenu la structure sociale et économique capitaliste, profondément inégalitaire. Le choix d’appliquer un plan d’ajustement libéral contre les travailleurs avec Joaquim Levy [ministre des Finances sous Dilma Rousseff], peu après la victoire de Dilma Rousseff sur Aécio Neves au second tour de l’élection présidentielle de 2014, a démoralisé la base sociale qui soutenait le gouvernement Dilma, laissant le PT incapable de faire face au coup d’État parlementaire qui se dessinait déjà.
Quelle stratégie pour Lula et le PT ?
Si la décision du juge Edson Fachin est confirmée par l’ensemble du tribunal, Lula et le PT reviendront en force au centre du débat politique national. Ce retour s’accompagnera d’une énorme responsabilité. Quelle sera la stratégie de Lula et du PT à partir de maintenant ? Parier sur la mobilisation et l’organisation des travailleurEs pour vaincre le gouvernement criminel de Bolsonaro ? Construire le projet d’un gouvernement de gauche, sans alliances avec la droite et la bourgeoisie, procéder à des changements structurels prenant appui sur le potentiel de la mobilisation populaire, la seule capable de neutraliser la réaction conservatrice ? Ou bien Lula et le PT vont-ils essayer de répéter les alliances avec des secteurs de la droite, pour plaire aux marchés financiers et être, une fois de plus, les otages de la bourgeoisie brésilienne profondément réactionnaire ?
Nous pensons que le PSOL, force émergente de la gauche brésilienne, a tout à fait raison lorsqu’il affirme qu’il est nécessaire de lutter pour un gouvernement des travailleurs et travailleuses et des oppriméEs, sans alliances avec la droite et soutenu par la mobilisation du peuple, afin d’apporter des changements profonds au profit de la grande majorité de notre peuple.
Traduction À l’Encontre.