La jeunesse s’est mobilisée spontanément au moment des attaques répétées de l’armée israélienne à Rafah. Lors de la séquence électorale des européennes, les jeunes étudiantEs et travailleuErs ont également participé aux manifestations et à faire pression pour l’unité. Nous faisons le point avec Grégoire, Héloïse, Lucas et Adèle des Jeunesses anticapitalistes.
Après la réforme des retraites et le 49.3 qui avaient mobilisé la jeunesse, c’est cette fois la guerre génocidaire à Gaza qui a mis en mouvement la jeunesse ? Est-ce le signe d’une politisation de la jeunesse ?
Le génocide en Palestine a créé un élan de mobilisation de la jeunesse partout dans le monde. Des comités de soutien au peuple palestinien ont été créés dans les universités, ce qui a permis aux étudiantEs de mener des actions pour la Palestine comme des blocages, des campements, des formations ou encore des projections. Une partie de la jeunesse (principalement la jeunesse racisée) se politise sur la question palestinienne ainsi que sur les questions décoloniales en général. Les mobilisations exigent un cessez-le-feu mais également la fin de partenariats des universités françaises avec les universités israéliennes ainsi qu’avec les entreprises soutenant la colonisation et l’apartheid. Ce mouvement de solidarité a été fortement réprimé en France comme aux États-Unis, avec l’intervention de la police dans les universités et des gardes à vue pour les étudiantEs. La jeunesse a su répondre à cette répression et ne s’est pas laissé faire en continuant les blocages et actions en soutien avec la Palestine et à leurs camarades répriméEs. Les actions largement visibles sur les campus ont permis de sensibiliser de nouvelles personnes sur l’anticolonialisme et l’anti-impérialisme.
Quel regard portez-vous sur la politique de Macron, la montée du RN aux élections européennes ?
Les politiques de Macron pour la jeunesse ont été destructrices comme sur tous les autres sujets : la création de Parcoursup, du SNU et l’interdiction de l’abaya montrent la volonté de plus en plus claire de mettre au pas la jeunesse dès qu’elle ose s’opposer à sa politique. On a pu le voir dès le début de son premier mandat avec la brutalité dont les policiers ont fait preuve pour mater le mouvement des lycéenNEs contre la réforme du bac, ou lorsque la jeunesse est sortie dans la rue pendant le mouvement Blacks Lives Matter et la loi séparatisme.
Même si toute la jeunesse sera touchée par l’arrivée de l’extrême droite au pouvoir et sa volonté de la discipliner, c’est surtout la jeunesse racisée qui en paiera le prix fort. Il ne faut pas oublier que c’est le racisme et l’islamophobie qui structurent aujourd’hui la société française.
Nous sommes conscientEs que les résultats électoraux de l’extrême droite s’appuient sur la dépolitisation d’une partie de la jeunesse. Les réseaux d’extrême droite masculinistes trouvent un écho chez les jeunes hommes, et les groupuscules d’extrême droite recrutent beaucoup dans ce milieu-là. La responsabilité des médias dans la large diffusion des idées d’extrême droite et la visibilité qu’offrent les réseaux sociaux à cette parole participent à la montée du RN.
Que ce soit pour les étudiantEs ou les jeunes travailleurEs, il est impératif d’informer largement sur l’arnaque sociale que représente l’extrême droite, et son danger concret pour les jeunes notamment raciséEs et LGBTQI+. La politisation de la jeunesse, notamment lors des mobilisations pour la Palestine, la Kanaky ou les luttes antiracistes, va dans le sens de l’antifascisme. De plus, les marches des fiertés organisées dans de nombreuses villes au mois de juin ont également été l’occasion de cortèges et mots d’ordre contre l’extrême droite. La jeunesse, lorsqu’elle se politise, emmerde le Rassemblement national !
Avez-vous participé à la courte campagne des législatives ?
Nous avons participé à la campagne du Nouveau Front populaire bien qu’elle ait été très courte, en tractant et en faisant des collages mais aussi en participant aux manifestations contre l’extrême droite et contre Macron. Notre rôle au sein du NFP est à la fois de rajouter de la radicalité mais surtout de rappeler que la lutte contre l’extrême droite et pour l’émancipation de la jeunesse ne se joue pas uniquement dans les urnes mais également dans la rue.
Comment les jeunes s’organisent-ils ?
Malgré la fin de l’année universitaire, les jeunes ont été largement présents lors des manifestations spontanées après les résultats des élections européennes, la dissolution du gouvernement et contre les idées d’extrême droite. Ensuite, les organisations de jeunesse et notamment les comités des Jeunesses anticapitalistes locaux ont été sollicités par de nombreuses personnes pour participer à la campagne des législatives, contre Macron et l’extrême droite. Durant cette campagne, des actions de collage et des diffusions de tracts ont pu être planifiées rapidement entre les organisations de jeunesse du Nouveau Front populaire à Strasbourg et dans certaines autres villes.
L’année universitaire et scolaire se termine, et les logiques d’auto-construction de certaines organisations de jeunesse limitent grandement l’émergence d’un front antifasciste large dans la jeunesse au niveau local, à Rennes ou à Lille par exemple, et national. Contrairement à ce que nous prônons, on observe une unité par le haut plutôt que par la base.
Et quels sont les projets des Jeunesses anticapitalistes ?
L’urgence est de préparer la riposte face à l’extrême droite et à l’ultralibéralisme de Macron. Même si le Nouveau Front populaire arrivait à gagner une majorité à l’Assemblée, il faudra construire une mobilisation sociale dans la rue et dans les universités pour essayer d’appliquer ne serait-ce qu’une partie du programme du NFP. Il faudra à la fois rappeler à certainEs députéEs pourquoi ils ont été éluEs et répondre à la riposte patronale qui ne va pas facilement nous laisser revenir à la retraite à 60 ans, par exemple.
L’objectif est de réussir à mobiliser la jeunesse, que ce soit en créant et renforçant les comités JA locaux, en prenant part et participant à la construction des mobilisations dans les universités et les lycées et renforcer les cadres inter-orgas. Il faut se mobiliser dans les universités et les lycées pour se battre contre leur destruction et également politiser les jeunes étudiantEs.
Les JA organisent les RIJ (Rencontres internationales de jeunes), camp international de rencontre entre jeunes révolutionnaires (et unitaires) du 20 au 27 juillet à Vieure dans l’Allier. Il est également prévu dès la rentrée d’organiser des actions afin d’être visible dans les facs pour sensibiliser les étudiantEs sur différents mouvements tels que la Palestine ou la riposte antitrans.
Propos recueillis par Fabienne Dolet