Éditions Rue de l’échiquier, 2022, 96 pages, 11 euros
Sylvain Lhuissier réussit le tour de force de concentrer, en moins de 100 pages, un argumentaire complet pour comprendre ce qui ne va pas dans le système carcéral en France et pour proposer des solutions concrètes pour résoudre le problème !
Déconstruction...
Le petit ouvrage, d’une lecture aisée et dynamique, procède avec méthode à la déconstruction des idées reçues, des poncifs, au fil d’un repas de famille imaginaire mais ô combien crédible : « La prison c’est le Club Med », « La prison, c’est fait pour les criminels », « Il faut bien qu’ils paient pour ce qu’ils ont fait ».
Après avoir pointé l’ignorance – notre lot quotidien – qui préside à ces élucubrations, l’auteur démonte systématiquement les affirmations fantaisistes et nous livre une description précise des conditions d’incarcération des détenuEs dans ce pays, des conditions de vie et de travail des personnes qui doivent purger leur peine.
Il interroge également l’efficacité du système, l’objectif affirmé étant a priori la réinsertion des détenuEs. Plus, il montre en quoi et comment la détention produit le résultat exactement inverse à la perspective affichée par les discours officiels. En effet, le déclassement social et la récidive sont le lot de la plus grande part des libéréEs.
Décarcérer !
« Que proposez-vous de mieux ?» La question qui tue, au moment du fromage, ne laisse pas notre auteur sans voix. Il fait l’inventaire des solutions à la surpopulation carcérale, qui sont connues et très simples à mettre en œuvre (la preuve, en deux mois, la population carcérale a baissé de plus de 8 000 personnes... à l’occasion de la crise sanitaire et du confinement COVID).
Au-delà, il énonce un certain nombre de propositions pour changer la place de la prison dans l’univers judiciaire français, et même dans l’imaginaire de la population, pour faire en sorte que l’incarcération cesse d’être la peine référence du système.
La volonté de Sylvain Lhuissier d’élargir le débat est salutaire, au sens où il affirme que décarcérer passera par la définition d’un autre projet de société. Dommage qu’il contienne son ambition à la réforme de la politique carcérale, et qu’il n’aille ni jusqu’à remettre en cause l’existence de la prison, ni vraiment jusqu’à la contestation de l’ordre social qui est responsable de la misère matérielle et morale de la population.