Film documentaire, 2023, sorti le 22 février 2023, durée 74 min, visible sur publicsenat.fr.
Nous sommes en 2020, et le confinement décidé par le gouvernement pour faire face à la pandémie a mis un coup d’arrêt à toutes les luttes. Toutes ? Non. Car un village du Royans peuplé d’irréductibles VertacomicorienEs1 a réussi à faire plier Benoît Gauthier, un riche entrepreneur qui voulait faire du Mont Vanille une carrière de pierres.
Empêcher par tous les moyens un projet extractiviste
Des cailloux dans la chaussure, un documentaire réalisé par Mickaël Damperon et produit à l’aide d’un financement participatif, raconte la lutte des habitantEs de Saint-Nazaire-en-Royans pour défendre leur environnement contre ce projet extractiviste imposé par le précédent maire. De mèche avec le carrier, celui-ci avait signé un accord dans le dos de la population et du conseil municipal. Or, le projet s’avère dangereux et absolument destructeur pour les réserves en eau, le paysage et la biodiversité.
Le film nous fait suivre la mobilisation des habitantEs, qui utilisent tous les moyens pour empêcher la réalisation de ce projet. En remportant les élections municipales avec une liste citoyenne, en contestant avec les moyens légaux, en s’appropriant les chemins de randonnée ou en menaçant de créer une ZAD, ils et elles parviennent à faire plier le préfet grâce à une lutte déterminée mais aussi profondément conviviale et créative. Il apparaît clairement dans le film que la population est tout à fait capable de s’emparer des enjeux qui concernent son lieu de vie, y compris les documents rédigés par des technocrates … profondément incompétents ! On rigole à de nombreuses reprises de la bêtise abyssale de ces « experts » et autres « commissaires enquêteurs » si peu concernés par les enjeux écologiques, par l’avis et la vie des habitantEs. Avec l’aide d’associations écologistes et des compétences de chacunE, les mensonges, les fraudes et les coups de bluff contenues dans les dossiers remis à la préfecture par le carrier et l’enquête publique vont être dévoilés un à un, faisant passer ces derniers de l’entêtement arrogant à la panique.
Nécessité de la désobéissance civile
On retrouve, à une échelle plus locale, le même mépris pour les gens que celui qui caractérise notre gouvernement actuel, la même tendance à les considérer comme des idiotEs et à tenter de forcer leur consentement à des projets qui n’ont d’autre objectif que de dégager des profits faramineux pour quelques-uns. Les mêmes causes produisant les mêmes effets, on voit aussi la transformation que vivent beaucoup de ces primo-militantEs, de l’obéissance à la loi à l’affirmation de la nécessité de la désobéissance civile. Plusieurs scènes du documentaire sont à ce titre assez marquantes, comme celle de la consultation publique où le public n’a littéralement… pas le droit à la parole !
Si le récit de la lutte en lui-même est déjà particulièrement intéressant, on retient aussi du film les images magnifiques prises du Mont Vanille, du village et de son aqueduc. Parce que le Mont Vanille, situé dans les superbes paysages du parc régional du Vercors, abrite une biodiversité folle (dont un couple de hiboux grands-ducs) on comprend l’attachement des habitantEs à sa préservation. Elles et ils vont découvrir la richesse de ce lieu, parfois à quelques pas de leur habitation, mais qu’il fallait apprendre à regarder.
On ressort du film griséEs par la victoire, émerveilléEs par les paysages et plus alertes quant aux manipulations des pouvoirs publics et leurs tentatives de simuler le consentement des populations à travers leurs enquêtes d’utilité publiques. C’est un film idéal à projeter publiquement pour ouvrir les discussions.
- 1. Nom du peule gaulois ayant donné son nom au plateau du Vercors