Publié le Lundi 8 mars 2010 à 22h40.

Congrès de Nantes : la nécessité d’une CGTsolidaire des luttes

 

La CGT a tenu son 49e congrès du 7 au 11 décembre à Nantes. Bien que la résolution d’orientation générale ait été adoptée à une très large majorité, la contestation était bien présente. Parmi les interventions, celle d’Alexis Antoine, délégué de Molex qui mettait en avant la nécessité de se battre contre les attaques des patrons voyous et de l’État et le besoin d’une CGT solidaire de toutes les luttes a été particulièrement appréciée des congressistes. Nous la reproduisons ici en quasi-totalité.

L e système capitaliste traverse une crise d’une ampleur sans précèdent. Une crise avant tout économique et sociale plutôt que strictement financière. Une crise qui jette plusieurs centaines de milliers de travailleurs à la rue.

Les entreprises privées sont attaquées par la finance sous couvert de la crise du CAC 40 pendant que les services publics sont eux démantelés par un gouvernement ultra-libéral.

Et quand ce gouvernement se fait l’avocat de la finance pour liquider le privé, je suis bien placé en tant que salarié de Molex pour constater le résultat…

Effectivement, le cas Molex est un cas d’école comme nous l’a rappelé plusieurs fois notre secrétaire général Bernard Thibault.

Mais ce cas d’école, c’est malheureusement et effectivement ce à quoi est aujourd’hui confronté un bon nombre de travailleurs et de syndiqués CGT. Des méthodes de patrons voyous, le non-respect des décisions de justice, une répression antisyndicale systématique comme celle que subissent nos collègues de chez EDF et ERDF en France et à Toulouse, ou comme chez les Freescale de Toulouse où les patrons se sont octroyé en plus les services et la complaisance de la préfecture ainsi que des forces de l’ordre pour expulser à plusieurs reprises les grévistes et les salariés en lutte !

Mais quand le patronat bafoue quatre décisions de justice comme ce fut le cas chez nous à Villemur-sur-Tarn, quand des patrons voyous décident de séquestrer les salariés en les empêchant de travailler et de rentrer dans leur usine malgré une ordonnance du juge, pas de trace des forces de l’ordre pour expulser la milice privée des dirigeants de Molex, pas de trace du moindre respect de la loi !

Face à toutes ces attaques intolérables et à toutes ces luttes pour le maintien de nos emplois qui sont menées partout en France, les syndiqués, les militants et les sympathisants CGT sont très souvent en première ligne et sont systématiquement pris pour cibles par le patronat.

Et quand ce n’est pas le patronat, c’est l’État qui prend le relais pour essayer de museler ceux qui luttent, comme nos six camarades de Continental à Clairoix qui sont traînés arbitrairement devant les tribunaux, un jugement qui remet en cause des lois abrogées et liberticides.

Et en parlant des mes collègues cégétistes de Continental, je tiens a dire aujourd’hui au 49e congrès de la CGT, que le jugement dont les six salariés de Continental sont victimes est totalement inacceptable et intolérable.

Le gouvernement veut faire payer cher et prendre pour exemple ceux qui se sont battus comme ils ont pu, face à une violence patronale sans précédent !

Et à ce titre, j’invite tous mes camarades ici présents à se rendre à Amiens le 13 janvier pour les soutenir lors du procès en appel d’un jugement que même le Syndicat de la magistrature et la Ligue des droits de l’homme dénoncent soutenus par tous les partis politiques de gauche. Aujourd’hui, seules les confédérations syndicales ne se sont pas exprimées pour dénoncer un jugement liberticide qui porterait un coup de plus à la lutte des salariés. Au-delà des jugements de valeur que certains se complaisent à rétorquer sur des actes que la violence des effets de la crise capitaliste engendre !

(...)

Tous ces hommes, tous ces travailleurs, tous ceux qui luttent et se battent, et tout ceux qui vont se battre – car le massacre est loin d’être terminé –, nous avons tous besoin aujourd’hui de l’aide et du soutien inconditionnel de toute la CGT, et je le répète, au delà des jugements de valeur.

Il faut rompre avec les critiques faciles sur le comportement ou les actes de ceux qui se battent au quotidien et qui gèrent comme ils le peuvent des luttes face à un patronat aux pouvoirs presque sans limites.

J’ai pu entendre lors du discours d’ouverture de Bernard Thibault des termes tels que : « un syndicalisme solidaire ».

Alors oui, la CGT se doit aujourd’hui de soutenir tous les salariés en lutte, et surtout sans conditions ou critiques faciles. Les réalités du terrain sont violentes !

Nous avons besoin d’une CGT forte et efficace qui se bat aux côtés de ses militants.

Mais j’ai l’impression parfois de faire partie d’une énorme machine dont la bureaucratie gangrène le fonctionnement et l’efficacité sur le terrain, là où les batailles se mènent !

Les textes d’orientation parlent de construire un « rapport de forces permettant de gagner de nouveaux droits pour intervenir dans la gestion des entreprises, créer de nouveau lieux de dialogues social et de négociations pour que vivent démocratie et progrès social ».

Mais l’exemple de Molex, là aussi, nous aura démontré que les droits existants ne sont de toutes manières pas respectés par le patronat. Ne pourrait-on pas commencer à se battre pour faire respecter les droits existants ?

Alors oui, il faut remettre en question le pouvoir patronal, leur pouvoir de licencier, leur pouvoir d’exploiter les salariés. Leur pouvoir de détruire la vie des gens, tout simplement parce qu’il n’y a que la croissance perpétuelle et exponentielle de leurs profits qui compte !

Bernard Thibault a fait savoir à Sarkozy que l’on ne roule pas la CGT dans la farine. C’est très bien mais dans le conflit Molex, je me demande si ça n’a pas été le cas…

Pourquoi avons-nous perdu une bataille chez Molex malgré toute l’énergie des militants CGT, des salariés, malgré une lutte que tout le monde a qualifiée d’exemplaire ?

(...)

Pour ma part, je pense que l’échec de la lutte des salariés de Molex nous montre les limites d’efficacité de nos batailles isolées sur le terrain.

Tout cela nous démontre qu’il est grand temps d’agir au plus vite.

C’est pour cela que la CGT doit tout mettre en œuvre pour créer le rapport de forces nécessaire et efficace contre les méthodes de patrons voyous et du gouvernement afin de sauvegarder nos emplois et de ceux des générations futures.

Globalement, le texte d’orientation n’aborde pas le sujet sur les possibilités et les moyens d’obtenir satisfaction.

(...) La convergence de tous les combats qui sont menés par les syndiqués CGT dans le public et le privé serait une force sans précédent pour combattre les méfaits induits de notre économie capitaliste. Et je suis convaincu que la CGT est capable de construire ce rapport de forces. Tout est une question de volonté.

(…)

Dans la période actuelle, les travailleurs ont plus que jamais besoin d’une CGT puissante, engagée avec détermination dans la lutte pour la défense de leurs salaires, de leurs droits et de leurs conditions de travail.

Oui, il faut une transformation économique et sociale profonde !

Cela signifie donc s’en prendre directement à l’organisation économique et à ceux qui la dirigent.

Oui, la CGT doit se battre contre le capitalisme et non pas l’accompagner !

(...)

Le capitalisme détruit notre tissu industriel, le libéralisme sans limite du gouvernement s’en donne à cœur joie dans le service public.

Subissant le principe de la double peine, la classe ouvrière, déjà exploitée, va payer le prix fort de cette logique.

La CGT doit maintenant prendre ses responsabilités et agir en profondeur et rapidement pour en finir avec toute cette violence que tous les travailleurs subissent de plein fouet.

Il nous faut un syndicalisme à l’écoute et qui réponde rapidement aux attentes des bases qui ont un besoin urgent d’efficacité dans la construction d’un rapport de forces.

Les travailleurs attendent maintenant des réponses à la crise, des solutions, un syndicalisme « efficace » et « actif » de rupture avec les logiques capitalistes.

Alexis Antoine