Comment gagner contre le rouleau compresseur des politiques libérales ? Que faut-il pour faire face à la montée de plus en plus irrépressible de l’extrême droite ? Ce mercredi 19 juin, le NPA organisait à la Bellevilloise (Paris 20e) une réunion « Ce n’est qu’un début, continuons le débat… ». Une soirée au caractère un peu inédit...
Après une trentaine d’Actes du mouvement des Gilets jaunes, après les mobilisations de la jeunesse face à l’urgence climatique, face au renforcement de l’arsenal répressif du gouvernement – qui accroît sa politique de casse sociale –, après les succès électoraux de l’extrême droite, la soirée avait pour objectif d’ouvrir largement la discussion, en abordant notamment l’articulation entre colère sociale et projet politique…Pour le NPA, l’exercice était inédit dans ce format : deux tables rondes de plus d’une heure chacune autour de cinq militantEs, syndicalistes, associatifs, politiques ou intellectuels. Pour la première fois depuis longtemps, étaient réunis à une même table des militantEs que nous côtoyons dans différentes luttes et avec lesquels nous souhaitons ouvrir une discussion sur les perspectives pour notre camp social.
De l’irruption de la colère sociale...Ainsi, devant près de 250 personnes, la première table ronde a réuni Stathis Kouvélakis, philosophe et militant de la gauche radicale grecque, Benoît Martin de l’UD CGT 75, Eric Bezou, syndicaliste cheminot et gilet jaune de Mantes-la-Jolie, Blandine, militante syndicale et politique à l’AP-HP, ainsi que notre camarade Olivier Besancenot pour le NPA.Ce premier temps d’échange a été l’occasion d’analyser l’irruption du mouvement des Gilets jaunes ces derniers mois, sa radicalité qui a tout bousculé, mais aussi la poussée répressive du pouvoir, les rendez-vous manqués avec le mouvement ouvrier et la faiblesse des organisations syndicales. Nous sommes aussi revenus sur la bataille du rail du printemps dernier, la grève actuelle des urgences…Les contradictions de la situation sont nombreuses et posent la question : quelle perspective politique pour prolonger l’explosivité sociale, pour rendre ces luttes fécondes ? D’où il est ressorti qu’à la « discordance des temps » entre social et politique, selon Olivier Besancenot citant Daniel Bensaïd, des victoires sociales fondatrices étaient à construire. Une question au cœur de la suite du débat.
… à la construction de perspectives d’émancipationAprès avoir donné la parole à notre camarade Gaël Quirante, placé en garde à vue trois jours plus tôt dans le cadre de la longue grève des postierEs des Hauts-de-Seine, la discussion s’est donc prolongée en présence de nouveaux invitéEs. Toujours au côté d’Olivier pour le NPA étaient présentEs Aurélie Trouvé, porte-parole d’Attac, Eric Beynel, porte-parole de l’union syndicale Solidaires, Elsa Faucillon, députée du PCF, et Geoffroy de Lagasnerie, philosophe et sociologue, soutien actif du comité Vérité et justice pour Adama. Les entrées dans la discussion ont été multiples, les regards croisés : analyse d’une situation qualifiée par un des intervenants de « bordélique » (des députés LR à la Bourse du travail de Saint-Denis contre la privatisation d’AdP ?!) ; apport des expériences nouvelles, comme celle du comité Vérité et justice pour Adama, partie d’un ancrage local (la mort tragique d’Adam Traoré dans une gendarmerie) mais qui a su dérouler toute une série de questions politiques autour de la critique de l’État, de la nature des solidarités et des convergences à construire tout en conservant son identité ; articulation des différentes revendications, en particulier sociales et écologiques, en revenant sur ces derniers mois de mobilisation où Gilets jaunes, militantEs issus du mouvement ouvrier, jeunes pour la justice climatique, ont pu se côtoyer, construire des ponts… Reste à tracer des perspectives dans une situation qui reste marquée par l’instabilité et par des revendications locales, sectorielles, mais qui posent immédiatement des questions politiques. Bourses du travail, maison du peuple, « espaces passerelle », « lieu commun permanent » : la nécessité d’espaces de coordination pour construire une pratique commune, discuter de nos stratégies se pose, en arrêtant de discuter des élections pour faire à partir des actions concrètes, des résistances...Au bout de près de trois heures de réunion, le débat n’était pas épuisé. Mieux, il ne fait que commencer. Il ne peut plus continuer comme avant. Les réponses aux urgences sociales, démocratiques et écologiques engendrées par les contradictions du capitalisme exigent que le débat continue et se renouvelle. Impossible de continuer comme avant face à la menace autoritaire. Ce n’est qu’un début…Manu Bichindaritz et Fabienne Dolet