L’œuvre cubiste « Guernica » de Picasso fit sensation à l’exposition universelle de Paris. Le jeune et engagé Léonard y voit le symbole de la répression fasciste, scandaleuse, là où sa mère s’indigne du style cubiste, vraiment « grossier ». Jean-Léonard est en totale rupture avec l’éducation bourgeoise de ses parents. Il milite au sein d’un groupe d’amis communistes qui éditent un journal de propagande, il se nourrit des écrits du révolutionnaire libertaire d’origine russe Victor Serge. Une rencontre avec ce dernier va le décider à passer les Pyrénées pour rejoindre ce qui reste de la révolution espagnole.
En novembre 1937, à Bujaraloz, la colonne Durruti est déjà passée sous commandement militaire stalinien et le jeune français ne va rencontrer que désillusions et trahisons. Batailles perdues, amis tués sous ses yeux, blessure, Léonard ne résiste que pour les beaux yeux de Milena. Le 23 septembre 38, tous les combattants étrangers doivent quitter l’Espagne. Pour Milena, Léonard refuse, mais le sort des armes ne lui donnera pas d’autre issue que la fuite vers la France en compagnie de Milena.Le départ de Léonard pour l'Espagne ayant précipité la rupture de ses parents, c’est son père qui l’attend seul à la frontière. Ensemble, ils refuseront la capitulation de Pétain et Léonard partira vers l’Angleterre. Une suite possible pour ce grand roman graphique ?
S’appuyant sur un scénario souvent visuel, la mise en scène et le trait d’Eddy Vaccaro, un crayonné brut juste un peu sur-contrasté rehaussé de couleurs subtiles, renforce le drame conté ici.Les citations de Victor Serge « cadre » le tout politiquement, même si l'humanisme efface souvent les contradictions politiques. Une réussite.
Sylvain Chardon
Bande dessinée : Espana la vidaVaccaro – Le Roy – JouvrayCasterman, 120 pages, 23 Euros