De l’activité physique certes, mais dans une économie donnée... Des chiffres qui en disent long !
L’économie du sport résiste à la crise
La « dépense sportive nationale » mesure les diverses contributions au financement des activités sportives, mais aussi les dépenses en biens et services nécessaires à la pratique du sport (vêtements, chaussures...). Elle est en France de plus de 35 milliards d’euros. Sa part dans le PIB (1,75 % aujourd’hui) augmente. Cette dépense se répartit de la façon suivante : 45 % par les ménages, 45 % par les administrations (un tiers par l’État qui rémunère notamment les enseignants en EPS, deux tiers par les collectivités locales) et 10 % par les entreprises. C’est la vigueur des dépenses d’équipement sportif des communes qui explique une bonne partie de la résistance de ce secteur à la crise.
La production de spectacles sportifs ne connaît pas la crise : le chiffre d’affaires du football professionnel a progressé de 24 % entre 2009 et 2013, s’établissant à 1,5 milliard ; celui du Tour de France a été multiplié par 10 en trente ans, ce qui a fait exploser le bénéfice de l’organisateur de l’épreuve (Amaury Sport Organisation). La forte hausse des droits de retransmission télévisés explique cet essor.
Bénéfices privés et fardeaux pour la population
Les économistes bourgeois le reconnaissent de plus en plus : les grands événements sportifs n’ont pas d’effet bénéfique sur la croissance économique... Mais il y a un effet de « redistribution ». Les contribuables paient les gros investissements, et les capitalistes se goinfrent : ceux qui produisent ces spectacles, et aussi certains secteurs comme le BTP qui bénéficient des commandes publiques. De façon systématique, les coûts sont sous-estimés. Les JO d’Athènes 2004 ont ainsi plombé les finances publiques grecques. Les populations commencent d’ailleurs à faire de la résistance face à de tels gaspillages : par référendum, la population de Munich a dit non en 2013 aux JO d’hiver 2022, de même que celle de Hambourg en 2015 pour les JO d’été 2024.
Et que dire de la Coupe du monde 2022 au Qatar ? 1,5 million d’ouvriers étrangers ont été recrutés pour construire les infrastructures. Leurs conditions de travail s’apparentent à de l’esclavage moderne, et on estime que 4 000 d’entre eux mourront sur les chantiers d’ici à 2022.
Concernant l’Euro 2016, les pouvoirs publics ont effectué de gros travaux de rénovation des stades, souvent en « partenariat public privé ». Ces dispositifs permettent aux villes de ne pas débourser trop d’argent à court terme, mais ils doivent pendant des années verser des loyers aux géants du BTP pour devenir au final propriétaires de stades surdimensionnés. Grâce à ces travaux, l’UEFA a touché le pactole : 650 millions de charges (location de stades, gestion de billets, etc.) et 1,9 milliard de gains (droits de retransmission télé, sponsoring, billetterie), soit un bénéfice net de plus d’1 milliard ! Grâce à une mesure de Sarkozy confirmée par Hollande, l’UEFA sera totalement exonérée d’impôts !
Pour ne pas faire de jaloux, le gouvernement a élargi en 2014 cette exonération d’impôts à l’ensemble des grands événements sportifs. Il a en outre supprimé la taxe sur les spectacles pour l’ensemble des manifestations sportives (remplacée par une TVA à taux réduit de 5,5 %). Et la loi Macron a permis l’accroissement des dimensions des dispositifs publicitaires au sein des enceintes sportives, cela en dérogation au Code de l’environnement...
Un secteur clé de l’économie capitaliste... dont il faudra se débarrasser !
L’économie du sport est la quintessence de l’économie capitaliste. Les « belles valeurs du sport » ne sauraient cacher que la compétition du profit est complétée par le profit de la compétition. Les compétitions prolifèrent pour accélérer la rotation du capital sportif et maximiser la production de plus-value. Le sport, vendu comme un spectacle, permet des bénéfices faramineux avec le consentement des foules que le système cherche à abrutir.
Le sport capitaliste n’a pas grand-chose à voir avec l’activité physique récréative. Outre les profits colossaux qu’il génère, il contribue à modeler la force de travail pour la rendre « performante » pour les capitalistes. Le sport transforme le corps des athlètes en instrument, en chair à profit. Au-delà des seuls athlètes, nous sommes tous incités à faire du sport afin d’améliorer notre « employabilité » et pour que notre corps soit bien préparé au travail capitaliste. Après le travail quotidien, il ne faut pas se « relâcher ». Tous à la salle de sport, avant de consommer du spectacle sportif devant son écran télé !
Gaston Lefranc